Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

'boom boom boom', goes the dwarf.

Il avait fallu se stopper en plein combat à l'annonce d'un nouveau genre de Royauté. Marraine avait beau être un problème, Tracassin était un fléau. Leur fléau. Et dieu qu'il irait déclamer des poèmes à Marraine si elle reprenait le pouvoir volé par ce traître de bas-étage. Il n'avait rien vu venir, personne n'avait rien vu venir. Un tel concentré de vilainerie dans une si petite superficie relève forcément d'un quelconque enchantement, Cúchulainn ne voit pas d'autre explication. Rapidement, il avait couru les rues de Ragtown pour se sortir de la Griffe Marine et passer par les quelques habitations dont il connaissait les occupants. Pour une fois, il se surprenait même à aider un chevalier-flic qui ne savait par où commencer en lui montrant en vitesse où habitaient ceux qui auraient le plus besoin d'aide. Si on ne peut pas lui attribuer beaucoup de qualités au premier abord, il fallait reconnaître au loup une volonté de bien faire ce qu'il commence. Ses pas le menaient à toute vitesse chez Adaé, qu'il ne connaissait que peu, mais il savait qu'il n'avait pas fini d'entendre Iseut s'il ne s'assurait pas qu'elle était déjà enfuie loin. Puis il passa ouvrir les portes de quelques amis, de Taran qui ne devait pas être bien loin et même de quelques adversaires à qui il avait eu affaire au marché noir. Tous absents; ça n'était pas forcément une bonne chose s'ils étaient agglutinés dans les plus grandes rues de la capitale, les plus dangereuses aussi en temps de crise comme aujourd'hui, mais il se permettait d'imaginer qu'ils avaient déjà fui, loin. C'était tout ce qu'il pouvait espérer en aussi peu de temps.
S'il n'écoutait que son esprit, Cúchulainn aurait accouru à la grotte qui leur servait d'abri, s'assurer que Camil ne courrait aucun risque, mais il le savait capable de se débrouiller sans l'aide de personne alors que la capitale avait besoin d'aide pour sortir tout le monde et trouver cette foutue bombe. Machinalement, il passa à Rentre tes Joyaux Blancs, constater l'absence d'Iseut avant de se rendre à la Sirène Amputée. C'était beaucoup de pas fais pour rien, mais il se savait l'esprit plus tranquille.
Il n'eut pas besoin d'entrer dans l'établissement pour entendre les voix distinctes de Potté, Olga, Tibiscuit et Iseut. S'il ne savait pas ce qu'il en était de la plupart des habitants, certains de ses camarades étaient au moins réactifs. La porte s'ouvrit en hâte, avant qu'en sortent les figures les plus importantes des Lames de Cendres. Il n'adressa qu'un signe de tête à ceux-là, avant que Potté et Olga ne partent d'un côté, Tibiscuit à la recherche de Gretel et Elis et qu'Iseut ne s'aventure plus loin dans Ragtown, seule. Il se pressa d'attraper son bras pour la forcer à l'attendre et surtout l'entendre, balançant un vulgaire J'viens avec toi. Il n'y avait aucune question à poser en un tel jour, et beaucoup trop d'autres choses à faire. Le loup se défit du bras de la bergère, sans même questionner son regard peu enclin à sa présence. Elle n'aurait pas le choix, et il l'aurait portée pour la contraindre à marcher à ses côtés s'il l'avait fallu.
Avançant à toute hâte, Cúchulainn n'hésitait pas à gueuler pour rameuter toute personne susceptible de les aider. Les quelques portes sur leur chemin étaient ouvertes sans aucune retenue ni délicatesse, frappant souvent contre les murs auxquelles elles étaient attachées. Y a pas de temps pour l'Etiquette.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

'boom boom boom', goes the dwarf.

Depuis l’explosion du château à Noël, Wolfran se gardait bien de mettre les pieds près du château. Le plus près du château qu’il aille est quand il va voir Kaa dans Romeo Drive, autrement il est très bien à Ragtown ou dans la forêt à cueillir ses plantes ou à se balader en loup. Ayant toujours été quelqu’un de simple ; le sorcier ne possédait pas IMiroir. Il préférait amplement la compagnie de livres au coin du feu ou bien à simplement se rappeler de sa vie avant son arrivée à Fort Fort Lointain pour regretter de ne pas avoir fait l’acquisition d’un. Et puis il avait suffisamment de clients venant lui raconter tout ce qu’il avait besoin de savoir pour s’en passer ; toutes sortes de personnes, allant de la petite vieille femme un peu concierge sur les bords qui adorait raconter tous les derniers ragots au charpentier qui lui racontait un peu plus ce qu’il passait d’un point de vue social, en passant par le gens lambda qui le tenait informé des dernières nouvelles fraîches.

Sauf que les histoires de l’abdication de Charmant et de la menace d’attentat de Tracassin n’étaient pas arrivées jusqu’à lui par ces canaux-là. Ils arrivèrent quand il entendit des cris dans la rue, alors il s’approcha de sa fenêtre pour observer ce qu’il se passait dehors, pour ne voir qu’une foule fuyante. Que se passait-il, bon sang ? Une inquiétude se forma comme une boule dans le fond de son estomac, insidieuse et prête à envahir le reste de son esprit si elle en ressentait le besoin. Pourtant, Wolfran se força à bouger et à se diriger vers l’avant de sa boutique. Il n’eut pas le temps d’atteindre la porte cependant ; cette dernière s’ouvrit à la volée et un grand gaillard, qui le dépassait de facilement une tête et qui faisait deux lui en carrure, lui dit qu’il fallait évacuer. L’apothicaire resta interdit un instant, tant ce qu’il venait de se passer semblait irréel. Puis une question montra son nez dans son esprit : Pourquoi évacuer ? D’un coup, il eut des sueurs froides, en repensant à un renouvellement de ce qu’il s’était passé à Noël, et il se dépêcha de prendre sa sacoche de voyage en y mettant les essentiels de premiers secours pour tout et n’importe quoi, avant de filer hors de sa boutique pour suivre ce type qu’il ne connaissait ni d’Eve, ni d’Adam.

Arrivant à son niveau, il posa une question qui allait, probablement paraître stupide mais bon, avec sa bouille, ça devrait passer tranquillement, à savoir : Qu’est-ce qu’il se passe ? On lui répondit rapidement, un attentat. Ou la menace d’un en tout cas. Le jeune homme pâlit d’un coup et pensa à la seule personne qui pourrait changer quelque chose à sa vie à présent : Kaa. Où était-il en cet instant ? Sauf ? Déjà loin ? Une part de lui aurait voulu qu’il vienne le chercher, parce qu’il était égoïste comme cela, mais une autre part, la majoritaire, priait tout ce qu’il pouvait qu’il soit déjà très loin de FFL ; il ne supporterait pas de le perdre, pas après avoir cru le perdre il y a quelques mois seulement. Wolfran remarqua une maison qu’ils passaient, lui et les deux autres qui semblaient mener l’évacuation dans cette partie de la ville, et il pensa aux quelques-uns de ses clients qui ne pourraient pas fuir rapidement, à cause de leur santé…

"Je connais des gens qui ne peuvent pas sortir seuls, il faut les aider à évacuer ; suivez-moi !"

Il n’avait absolument pas l’allure d’un chef, mais il espérait de le ton, des plus anxieux, de sa voix suffirait à faire comprendre aux deux autres qu’ils devaient prendre une autre direction, afin de privilégier ceux qui doivent être aidé. Il partit alors dans une rue perpendiculaire à celle qu’ils empruntaient jusque-là et fila vers une maison, celle d’un homme dont les jambes avaient du mal à le porter longtemps.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

Moi, j'aime quand ça fait 'boum'

" Je prends Ragtown. " Parce qu'il fallait faire vite et surtout, faire au mieux, Iseut n'avait pas hésité à s'imposer plutôt qu'à supposer. Parce qu'il y avait un nain qui risquait de leur causer bien des tracas et qu'il n'avait même pas le bon goût d'être kamikaze, la rebelle avait asséné ces trois mots sans l'ombre d'un doute ni souci de la hiérarchie. Elle avait dévisagé chacun de ses compagnons alors qu'ils s'étaient réunis dans l'urgence, sentant une terreur effroyable tenter de supplanter la rage folle que la trahison de Tracassin avait réveillé en elle. Elle ne savait pas encore comment, elle ignorait également le quand, mais il paierait. Cher. Elle lui trancherait sa tête auto-couronnée et la planterait sur une pique, avant de l'offrir en sucette goût vengeance aux charognards. Que ce bâtard de gueux prie pour que sa satanée bombe l'emporte dans son souffle, si par malheur elle devait exploser, ou elle lui ferait endurer mille morts, l'une après l'autre, une dent par une. Que cet enfant de putain s'arrange pour qu'aucun de ses proches ne périsse par sa faute ou ... Elle déglutit avec peine, inspirant profondément afin de garder contenance. Il était hors de question qu'elle se laisse aller à de si sombres pensées, quand bien même la présence de Tibiscuit, Potté et Olga les faisait ressurgir par vagues à chaque syllabe.

Elle quitta la Sirène Amputée plus tiraillée que jamais, à la fois soucieuse et concentrée, manquant ainsi l'imposante silhouette qui les guettait à côté de la porte. Elle refusait de se retourner pour adresser un dernier signe à ses comparses, craignant sans doute qu'il ne résonne comme un adieu. D'ailleurs, la bergère était convaincue que plus ses pas seraient pressés, moins elle se focaliserait sur ses angoisses et surtout, moins le temps jouerait contre eux. Des bénéfices qu'elle ne dédaignait pas mais qu'elle n'eut guère le loisir d'expérimenter dans l'immédiat. Une poigne se referma sur son bras et le chuintement caractéristique du métal glissant de son fourreau se fit entendre. Son épée contre l'étau de Cúchulainn. Elle rengaina immédiatement. " On s'occupe de Ragtown. " rétorqua-t-elle simplement. Pas de froncement de sourcils, ni même l'esquisse d'une désapprobation. Le je s'était fait on, parce qu'elle aurait pu agir sans lui mais que son contraire lui paraissait bien plus attrayant. Iseut n'avait rien d'une héroïne. Comme le commun des mortels, elle préférait se faire péter en famille que crever toute seule.

Ils remontèrent jusqu'au quartier malfamé, chacun sommant badauds et résidents de se joindre à eux, d'abandonner maison et commerce sans tergiverser. Elle ne cessa de beugler que pour répondre au garçon qui les avait interrogé timidement, tentant même un sourire un peu pâle en comparaison de ceux qu'elle pouvait déployer en temps ordinaire. Difficile de rassurer quelqu'un quand soi-même on craignait qu'un abysse ne s'ouvre sous ses pieds. De toute façon, il n'avait visiblement pas besoin d'être cajolé. Au contraire, sang-froid à l'appui, il les entraina vers une ruelle adjacente, là où, selon lui, leur assistance serait bienvenue.

Tandis que Forgéteinte accompagnait le commerçant dans la première maison, la bergère ouvrit chacune des portes du voisinage afin de vérifier que personne n'avait décidé de s'enfermer à double-tour en attendant que l'orage passe. A peine eut-elle poussé le battant de l'une d'entre elles qu'une main se referma sur sa gorge.


" Laissez-moi ! Allez-vous-en ! Voleurs ! Assassins ! " chevrota une voix de vieille dame. Si elle avait pu avoir la poigne de son âge, Iseut en aurait été fort aise. Mamie l'étranglait. En d'autres circonstances, elle se serait dégagée aussi vite mais également, aussi gentiment que possible. Ce jour-là, échauffée par la panique ambiante, elle se contenta d'un coup de tête en plein front sans cérémonie. La grand-mère vacilla et ce fut quand ses yeux se révulsèrent et qu'elle tomba dans ses bras qu'elle réalisa son erreur. " Pardon. Je suis désolée. Madame ? MADAME ? " Elle la secoua. Pas de réaction. " Eh mer... " Bon. Et bien, elle n'avait plus qu'à la charger sa victime sur son épaule.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

A la recherche d'une bombe. Foutu Tracassin.

Quelque chose s'était produit. L'ambiance désastreuse de l'arrivée de Tracassin sur le trône avait pris place dans la ville, mais c'était différent, maintenant. Kitty était à la Griffe Marine quand le vent de panique s'est emparé de l'endroit, se propageant rapidement à la ville. Car, c'était certain, des gens allaient mourir. Et rapidement, à en croire les rumeurs. Instinctivement, elle avait pris sa besace et avait évacué l'endroit, en même temps que tous ceux qui s'y trouvaient. Elle resta les bras ballants quelques secondes, se demandant s'il valait mieux sauver sa peau ou aider ceux qui voulaient sauver la leur. Elle n'était pas démunie de conscience, elle avait simplement un fort instinct de préservation.
Rapidement, entendant certains cris affolés des habitants qui étaient persuadés d'avoir une bombe chez eux, elle décida de donner un coup de patte à l'évacuation des habitants. Elle n'avait rien à y perdre et, en bonne santé, elle avait la chance de pouvoir courir vite, s'il le fallait. Elle passa dans la grande artère et aida un homme à descendre une valise avant de continuer son chemin. Kitty savait qu'elle n'était certainement pas la seule à vouloir aider à évacuer les gens ; encore fallait-il qu'elle trouve ces bons samaritains.

Il ne restait plus grand-chose de ce qui avait été, quelques minutes plus tôt, une grande rue passante. Nombreuses portes étaient ouvertes, les maisons abandonnées à la volée. Kitty résista à entrer dans toutes celles qu'elle croisait et d'y voler tout objet de valeur que les propriétaires pouvaient avoir oublié ; elle tentait de faire un beau geste, après tout. Elle n'allait pas ruiner cela en profitant de la faiblesse de certains. Elle espérait vivement qu'Adrastée avait eu la bonne idée de partir et de fermer sa maison mais elle n'en doutait pas, c'était une femme de bon sens. Au fur-et-à-mesure que les maisons défilaient, vides pour la plupart, Kitty pensait réellement qu'elle était seule. Ses pas s'arrêtèrent lorsqu'elle entendit de faibles cris : une vieille dame semblait appeler à l'aide. Cependant, sa voix ne se fit bientôt plus entendre et un bruit sourd envahit la pièce dans laquelle Kitty était rentrée. La scène était plutôt cocasse, en réalité.
Une femme essayait tant bien que mal de relever la grand-mère, dans ses bras, plutôt inconsciente. Kitty eut le sentiment qu'elle ne voulait qu'évacuer cette femme, aussi se dit-elle que de l'aide serait la bienvenue. « Attends, je vais t'aider » Pas le temps pour les présentations. Un bras sur chaque épaule, les deux femmes parvinrent à emmener la vieille dame à l'extérieur qui, entre-temps, se réveilla pour crier "Malotrus !" avant d'être inconsciente à nouveau.
Dans la rue, un homme passait avec sa charrette chargée de quelques valises. Kitty l'arrêta et chargea la vieille femme à l'arrière - elles n'allaient tout de même pas la transporter toute la journée, non ? Le but était de la sauver, de toute manière. Pas de mourir avec elle. « Tu es avec quelqu'un ? » demanda-t-elle à l'inconnue. Après tout, il valait mieux être plus que deux, pour évacuer une partie de la ville, non ? Elle aperçut deux hommes aller de porte en porte et ne put que supposer qu'ils faisaient la même chose qu'elle. « Est-ce que tu as une idée de l'endroit où la bombe aurait pu être placée ? Quelque chose d'évident, un lieu symbolique... » Elle secoua les épaules, comme pour s'excuser. Elle commençait seulement à se souvenir du chemin entre Adrastée et la Griffe Marine, alors connaître les endroits stratégiques...

Avant de pouvoir entendre une quelconque réponse, un homme passa en courant, chaque pas accompagné d'un cri d'horreur, et bouscula les deux jeunes femmes. Une chose était sûre : ça n'allait pas être une partie de plaisir.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

'boom boom boom', goes the dwarf.

C'était presque évident qu'ils ne seraient pas seuls, et Cúchulainn était reconnaissant de la présence de Wolfran et Kitty. Ceci dit, l'idée même que tous les gros bras et les grandes gueules de la ville se soient barrés et qu'ils ne soient que quatre pour essayer de faire bouger Ragtown, ça lui filait la gerbe. Quatre, (son regard tomba sur Wolfran dans sa boutique) et pas des plus costauds, c'était pitoyable tant que héroïque. Ou suicidaire.
Ne s'arrêtant pas à la Cuillère d'Absinthe plus longtemps, Cúchulainn continua ses entrées fracassantes à grands coups de bottes, gueulant de manière, il faut l'avouer, peu rassurante. C'est pas sa faute, s'il avait fait un mètre soixante forcément, ça aurait été plus ridi- hm, plus délicat, mais sa carrure avait au moins l'avantage de faire sortir les gens en vitesse. Faut dire qu'un sauvage qui défonce ta porte à grands coups de pieds et porte une hache à la ceinture, tu bouges tes miches en vitesse et tu prends pas le temps de l'appeler Mortecouille.
Jetant un œil de temps à autres à ses coéquipiers, il n'aurait pu s'empêcher de se taper un bon fou rire face aux mésaventures d'Iseut, s'ils avaient été un autre jour, mais il n'accordait pas vraiment de temps aux moqueries pour le moment. Les quatre passaient en vitesse dans chaque maison, chaque boutique qu'ils trouvaient, allant même explorer parfois au cas où certains se seraient enfermés à la cave ou au grenier. Ils arrêtaient régulièrement les charrettes et les cavaliers pour leur demander d'emmener avec eux quelconque personne trouvée. On disait de Ragtown que c'était un quartier où pullulait la vermine, mais Cúchulainn s'étonnait du nombre d'honnêtes gens qui n'avaient simplement pas les moyens de vivre ailleurs. Il s'étonnait des âgés que les jambes ne portaient plus et qui vivaient au premier voire second étage. Si ça n'était que de lui, il irait mettre le feu au cul de Marraine pour qu'elle corrige tout ça et leur file de quoi vivre convenablement – et il faudrait penser à demander à Jeiran d'inventer une chaise à roulette, comme un vélo mais pour les handicapés. Vous savez, plutôt que de faire des armes à la con.
A l'idiot qui bouscula Kitty et Iseut, Cúchulainn balança une pierre dans sa jambe qui le fit trébucher, et tomber. C'est une chose de pas aider les gens, mais tu pourrais au moins respecter les dames, truandaille que tu es.
Ne faisant que pousser une énième porte déjà ouverte, le loup s'avança pour alerter un couple âgé. L'homme ne s'aidait que de sa canne, mais il fallut porter sa femme dehors, faute de mieux. Cúchulainn essaya d'arrêter une charrette, puis deux, un cheval seul n'étant pas suffisant pour transporter un couple. Mais il faut croire que les fuyards se foutent pas mal des autres; s'ils n'aident pas à chercher ils pourraient au moins aider à transporter les plus mal en point. Délicatement, pour ne pas brusquer la dame – il avait quoi qu'on en dise un profond respect pour les plus âgés et s'en serait voulu de la blesser de quelconque manière –, il se tourna vers ses trois camarades toujours à la recherche d'autres gens. Eh. Son regard continuait de suivre les trois silhouettes qui ne réagissaient pas, avant de gueuler plus fort : Eh, y a moyen que vous m'arrêtiez une charrette ? Il ne pouvait décemment pas se mettre au milieu de la route avec cette pauvre femme dans les bras; les idiots ne sont pas ce qui manque à Fort Fort Lointain, encore moins à Ragtown, et il serait malheureux que l'un d'entre eux les percute. Lui sans sortirait, mais il doutait que la vieille dame en soit satisfaite. Faudra aussi aller voir du côté du Lotus Violine, ils doivent pas avoir l'esprit assez clair là-dedans pour se sortir tout seuls.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

'boom boom boom', goes the dwarf.

Wolfran fut à la fois content et surpris de voir que les deux autres le suivaient vers les habitations qu’il indiquait sans hésiter une seconde. Ils avaient peut-être des manières un peu…Rustres disons, mais ils semblaient avoir le sens des priorités et c’était déjà ça. Alors il leur indiqua deux-trois adresses tout en se dirigeant lui aussi vers d’autres adresses, faisant sortir les gens ou simplement en les prévenants (certains étaient malentendant voire presque sourds, alors il fallait leur dire ce qu’il se passait). Il vit la jeune femme blonde et une autre, brune, avec une de ses cliente arthritique sur l’épaule, visiblement inconsciente ; bon sang, que lui était-il arrivé ? Wolfran allait se diriger dans leur direction quand il vit la petite vieille dame relever la tête, hurler une insulte quelconque et reperdre conscience. Ah non, elle allait bien finalement. Il leva cependant les yeux au ciel ; cette femme était adorable quand elle venait dans sa boutique, mais il entendait suffisamment de gens lui raconter comme quoi elle avait tendance à être imbuvable dès qu’elle se sent menacée…Rien d’étonnant dans son attitude actuelle et Wolfran continua son chemin vers les autres maisons qu’il visait.

Il revint vers les autres pile pour entendre l’autre homme faire une leçon de vie à un type qui, une fois dit, repartit en courant aussi vite qu’il était venu. Peut-être était-ce le fait d’avoir déjà fait face à une situation de panique similaire, au bal (bien que l’ultimatum de voir une bombe exploser n’ait pas été à l’ordre du jour à cette époque), que le jeune homme pourtant pacifiste au possible, arrivait à rester aussi calme. Il refoula d’ailleurs la pensée du bal, afin de ne pas repenser au fait qu’il ne savait pas où était Kaa…Il se secoua mentalement, puis le fit physiquement quand il entendit la voix forte de l’autre homme de leur petit groupe disparate s’élever plus fort. Oui…Une charrette, pour la petite dame. Oui, évidemment ! Reprenant ses esprits, le sorcier se tourna vers la route d’où provenaient les charrettes, et repéra un homme qu’il connaissait bien, pour avoir aidé plusieurs personnes de sa famille, dont la dernière grossesse de sa femme.

"Monsieur Grainmoulu !" il fit de grands signes en direction de la charrette, qui ralentit avant de s’arrêter.
"Mr L’apothicaire ! Vous devriez partir, c’est pas tranquille dans le coin…"
"On doit encore aider des gens à sortir, d’ailleurs, est-ce que vous pourriez prendre madame sur votre charrette pour l’aider à quitter la ville, avec son mari ?" le meunier observa ses camarades avant d’acquiescer d’un signe de tête "Merci, je vous revaudrais ça."
"Nan, je vous dois bien ça. Mais faîtes attention à vous !"

Un sourire rassurant sur le visage, le jeune blond se tourna ensuite vers les autres, se demandant ce qu’ils pourraient faire de plus. L’autre homme parla du Lotus Violine et le blond eut une grimace en entendant ce nom. Il n’aimait pas cet établissement et il était la cause de son refus de vendre des remèdes utilisant de l’opium, mais en quantité minime. Cependant il marquait un point, un sérieux point même…Il soupira et s’y dirigea. Il n’y avait personne d’autre dont il se souvenait qui auraient besoin d’aide pour sortir alors autant passer aux cas difficiles. Bon sang, il détestait vraiment cet endroit…

"Une idée de comment les faire sortir rapidement ? Parce que pour sortir une ou deux personnes, les porter ça passe, mais là…on parle de facilement une dizaine de personnes, voire plus. Des suggestions ?"

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

Moi, j'aime quand ça fait 'boum'

L'arrivée de la brune était plus que providentielle. Rarement Iseut s'était retrouvée stupide à ce point - si on exceptait sa fâcheuse rencontre avec une cargaison de poissons. Il fallait avouer que jusqu'à présent, elle n'avait jamais assommé une vieille dame d'un coup de boule non plus, geste qui avait de quoi choquer la coupable elle-même. Heureusement que la nouvelle venue était moins impressionnable qu'elle. Elle accepta volontiers son initiative et, rassurée par le réveil bref de sa victime, la laissa glisser sur la charrette dénichée par la jeune femme.


" Merci. " déclara-t-elle avec un hochement de tête avant de lui désigner les deux blonds qui se chargeaient des quelques habitants restant. " Oui, je suis avec eux. On essaie d'évacuer les impotents. " L'adjectif pouvait paraître assez insultant, néanmoins, sur le coup, la bergère n'en trouva pas de plus approprié. Et puis, bon, une bombe pouvait leur souffler à la figure d'un instant à l'autre, ce n'était pas comme s'ils avaient le temps pour les ronds de jambes. Elle s'arrêta pour réfléchir à la dernière question de la demoiselle. Quinze ans qu'elle trainait sa porcelaine à la Capitale, elle devait bien avoir une idée, non ? Au moins une toute petite ? " J'aurais dit le Palais Royal, en premier lieu, mais étant donné que l'autre fils de putain de demi-portion s'y trouve, il y a peu de chances ... " Pas le temps pour les ronds de jambes, on a dit. Elle se gratta l'arrière du crâne, ses méninges lancées à toute allure. Il pouvait très bien s'agir de Romeo Drive ou de Rollywood, où la plupart des riches commerçants et rentiers vivaient, des sous-sol du Port où s'entassaient vivres et autres marchandises pour le commerce, ou encore ici, où se concentrait bon nombre de la population ... Et toute l'activité illégale de Fort Fort Lointain. De sa richesse insoupçonnée et des détracteurs du royaume. Les rebelles, les mécontents, les contestataires ... Tracassin marquerait un grand coup s'il détruisait la Griffe Marine, par exemple. Il plongerait également la ville dans une terreur sans nom en rasant les habitations. La garde pourrait-elle seulement contenir un afflux de réfugiés venus des bas-quartiers ? Ce serait le chaos et une petite voix lui soufflait que rien ne ferait plus plaisir à ce magicien de pacotille. La joaillère dut lutter pour ne pas devenir livide. Pourvu qu'elle ait tort. " Ou alors, ici. A Ragtown. " lâcha-t-elle dans un murmure, tant et si bien qu'elle n'était pas sûre que son interlocutrice l'ait entendu et inconsciente de la portée de son hypothèse. Surtout que pour peu qu'elle ait compris, Iseut n'eut pas le temps de développer sa pensée. Un homme les percuta dans sa fuite désespérée, avant d'être stoppé dans son élan par Cùchulainn et sa grâce coutumière. " Toujours délicat, celui-là. " grommela-t-elle, très hôpital qui se fout de la charité. Lui n'avait manqué d'assassiner personne, au moins. Enfin, pas encore en tout cas.

Il restait une vieille dame à hisser sur un cheval et à nouveau, l'inconnue et elle s'en chargèrent de concert. Quand elles revinrent vers leurs deux compagnons d'infortune, Forgéteinte rappela le repère d'adeptes de l'herbe à chat et autres substances opiacées douteuses à leur bon souvenir et leur plus jeune compagnon s'empressa de s'enquérir sur la méthode à employer. La rebelle fronça les sourcils.


" On va espérer qu'en criant assez fort, ça réveillera la plupart. Sinon, un coup de pied dans quelques fondements devrait faire le reste. " trancha-t-elle avant de prendre la direction du Lotus Violine. En d'autres termes, tant qu'ils n'auraient pas vu, il ne lui apparaissait pas de stratégie plus pertinente. Et vraiment, ils n'avaient pas dix minutes à perdre en discussion stérile. " Vous deux, hm ... Comment vous vous appelez ? " La question était bien sûr pour le garçon et la jolie brune. " Donc Wolfran et Kitty, restez derrière nous. Au cas où. "


Ils remontèrent jusqu'au fumoir en continuant de rameuter la plèbe sur leur passage et à filer quelques coups de main. Arrivé devant, la bijoutière laissa l'homme-loup soigner leur entrée. Fracassante, comme les précédentes. Ce qui ne sembla guère perturber plus que ça la quelque demi-douzaine de personnes aux yeux vitreux présente. Seul le tenancier sursauta, visiblement plus alerte que ses clients. Et très mécontent de leur intrusion.


" Je peux savoir de quoi il s'agit ?! Vous êtes dans un établissement respectable et ... " La blonde l'arrêta d'un geste impatient. " Et qui risque de finir en feu d'artifices. Il faut évacuer. Maintenant ! " Le pauvre hère vira au blanc layette, affichant une mine d'incompréhension la plus totale. " Mais ... De quoi parlez-vous ? " Elle lui expliqua brièvement la situation avant de l'interroger : " Cette carriole dehors, elle est à vous ? " L'homme opina et elle se tourna vers le reste de la petite clique. " Ça devrait suffire pour ceux qui ne sont pas en état de marcher. " Sauf que le propriétaire, toute urgente et inédite que fut la situation, ne semblait guère enclin à servir de cocher. Elle le soupçonnait même d'avoir envisagé de fuir avec, seul, à peine avait-elle prononcé le mot "bombe". Quoi que "soupçonner" n'était pas assez fort. Son intuition se confirma à l'instant où il fit mine de prendre ses jambes à son cou vers la sortie. Elle dégaina son bâton de bergère calé dans son dos et s'en servit pour lui faire un joli croche-pied, presque aussi beau que celui de Cùchulainn quelques minutes auparavant. " J'ai dit qu'on en avait besoin. " râla-t-elle à l'attention du type affalé sur le plancher. " Par la Grande Mère ! Un peu de considération et de solidarité, est-ce trop demandé ?! " A croire qu'un concours de qui laissera le plus de gens derrière lui avait été organisé et qu'ils étaient quatre clampins à avoir raté l'inscription.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

A la recherche d'une bombe. Foutu Tracassin.

Kitty ne savait plus réellement si le chaos était dans sa tête ou s'il était réel. Personne ne semblait réellement s'affoler, à part elle et la jeune femme qu'elle venait de rencontrer. Elle rajouterait plus tard à sa liste les deux hommes qui se joindront à elles. Cela rendait la tâche d'autant plus difficile qu'il fallait convaincre les gens du danger, même si les charrettes et les cris à l'extérieur indiquaient un certain problème. Elle écouta l'assommeuse de Grand-Mère lui énumérer les points sensibles mais elle ne semblait pas vraiment savoir ce que Tracassin avait prévu pour eux. Personne ne pouvait le savoir, et c'était là son but. Foutu nain.
Un homme les rejoint et insulta le malotru qui venait de les bousculer - Kitty comprit rapidement qu'il était avec la jeune femme blonde.

Leur plan pour la suite fut établi rapidement : le Lotus Violine où, semblait-il, beaucoup de personnes auraient besoin d'être évacuées. Et pas des plus conscientes. Kitty ne pensait même plus à ses motivations, elle se contentait de prendre les ordres et de suivre son instinct. Elle n'avait pas de temps à perdre. Elle communiqua son prénom à la jeune femme - Iseut, et se réjouit intérieurement de faire équipe avec elle. Elle semblait savoir ce qu'il fallait faire. Kitty se contenta donc de rester derrière et entra à la suite d'Iseut et de l'autre homme, Cúchulainn, Wolfran à ses côtés.
Pendant qu'Iseut parlait et tentait d'empêcher l'homme de fuir seul avec sa carriole, Kitty tenta de réveiller les clients trop inconscients. S'approchant d'un homme, tête affalée sur la table, elle lui donna de légers coups pour le réveiller. « Allez, on se réveille ! Bouge tes fesses d'ici, et rapidement ! » Elle ne lui laissa pas le temps d'ouvrir les yeux qu'elle le prit par le bras et l'entraîna vers la-dite carriole. Il n'opposa pas beaucoup de résistance et elle eut le temps d'aider trois autres hommes à monter dans le véhicule. A quatre, l'affaire fut pliée rapidement et la calèche, pleine, partit à toute vitesse dans l'artère étroite.

« Nous n'avons pas besoin d'aller à la Griffe Marine. J'y étais lorsque l'alerte a été donnée, et tout le monde était sur le point de partir. » Elle ne savait pas s'il était bon ou pas de parler de l'endroit à des gens qu'elle ne connaissait pas, mais était-ce réellement le moment de s'en soucier ? Sa préoccupation première maintenant était Adrastée... « Il faudrait faire un tour du côté de Sweet Transvestite... Adrastée devrait être au courant mais il y a beaucoup de monde, là-bas. Si les filles étaient... occupées au moment de l'alerte, elles peuvent ne pas être informées de la situation. » Elle faisait elle-même partie des filles d'Adrastée, d'un autre genre de celles qui s'occupaient des clients. Mais elle les connaissait toutes. Cependant, elle attendit la décision d'Iseut et Cúchulainn, qui avaient l'air de connaitre Ragtwon mieux que quiconque. Peut-être y avait-il une autre priorité.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

'boom boom boom', goes the dwarf.

La blonde, Iseut s’il avait tout compris, proposa de hurler assez fort et il leva les yeux au ciel avec un sourire amusé. Oui, c’est sûr que ça pouvait fonctionner. Wolfran fit ce qu’on lui proposa, et resta derrière la blonde après avoir donné son propre nom. La scène qui se déroula sous ses yeux l’attrista. Les gens de Ragtown n’étaient pas connus pour être des enfants de cœur, mais de là à abandonner la plupart des autres derrière soi simplement pour essayer de sauver sa propre peau…C’était humain, c’est vrai, un instinct de survie profondément ancré en chacun des habitants de cette ville. Certains s’en déchargeaient par force de caractère ou apprentissage, comme les soldats de la ville. D’autre de par leur courage pur, comme les deux blonds avec eux. D’autres, comme lui, le faisait parce qu’ils ont toujours appris à aider les autres avant de s’aider soi-même. Il n’empêchait que ça l’attristait. Il reporta son attention à l’intérieur de l’endroit.

Beaucoup de gens à moitié comateux. Tout comme Kitty, il tenta une approche plus douce. Pas très effective. Il finit par avoir une idée, et alla vers la cheminée où se trouvait des braises, et y versa quelque chose. Rapidement, une vapeur se propagea dans la pièce, une odeur âcre et prenante, qui réveilla la plupart des gens présent, bien qu’ils ne soient pas complètement présents en termes d’esprit, au moins ils n’étaient plus des poids morts. A eux quatre, cela alla vite. Comme quoi, il faut toujours avoir des sels sur soi, on ne sait jamais quand ça peut servir ! Une fois la calèche emportant les gens du Lotus Violine partie, il fallait voir où ils allaient ensuite. Apparemment, la Griffe Marine était déjà évacuée. Une bonne chose. Ce fut de nouveau Kitty qui proposa Sweet Tranvestite. Un endroit dont Wolfran avait déjà entendu le nom sans jamais y être passé, il ne savait même pas ce qu’ils y faisaient à dire vrai.

"Si des gens risquent de ne pas avoir entendu l’alerte, il sera bon, en effet d’y aller. A moins que vous n’ayez d’autres endroits plus urgents ? On peut aussi se séparer, on couvrirait plus de terrain."

Il lançait quelques idées, mais rien ne lui semblait bien convainquant. Bon sang, les gens avançaient de tous les côtés, sans aucun ordre autre que la panique qui les animait. Ils allaient finir par aller partout sauf vers la sortie de la ville. Mais à eux quatre, avec quelques chevalier-flics, que pouvaient-ils faire ? Ils se feraient simplement piétiner…A moins qu’on ait quelque chose d’autre qui effraie les gens, au point de leur faire changer de route pour l’éviter. Il eut une idée. Une très mauvaise idée si on y réfléchissait deux secondes. Une que Kaa aurait détesté, pour la simple et bonne raison qu’il se mettait en danger, aussi bien de par les gens que par les autorités. Il s’exclama d’un « Je reviens » avant de détaler comme un lapin dans une direction opposé du groupe, et, après un deuxième virage, entra dans une maison abandonnée et se transforma, laissant l’humain devenir loup. Ce loup noir qui avait ses yeux. Il abandonna ses vêtements, il trouverait bien un truc, une cape ou autre, à emprunter à quelqu’un quand il devrait se retransformer. Maintenant, le défi était de ne pas faire savoir aux autres que c’était lui. Plus facile à dire qu’à faire.

Courant dans les rues, il grognait, hurlait. Il effrayait un peu plus les gens mais au moins, il pouvait les diriger, à l’instar d’un chien de berger avec les brebis égarées. Il finit par retomber sur le groupe qu’il venait de quitter et s’arrêta net. Il devait garder la bouche close à partir de maintenant. Parler serait le trahir, sa voix restait la même, bien que changeant de forme. Alors je ne dis rien, ne grognait plus, et me couchai même, afin de leur faire comprendre que je n’étais pas une menace. Maintenant, advienne que pourra…

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

'boom boom boom', goes the dwarf.

Des idiots, des raclures, des connards, ça n'était pas rare d'en voir à Ragtown – pour ne pas dire que la plupart en étaient –, mais ceux du Lotus Violine dépassaient toujours des sommets qui étonnaient Cúchulainn. Et le patron, c'était le pire. Il avait déjà eu affaire à lui quelques fois – il n'est pas rare que quelqu'un accoure à la Griffe Marine en recherche de quelqu'un pour l'aider à affronter telle ou telle enflure. En entrant dans l'établissement, Cúchulainn n'attendit même pas une seconde avant de prendre les deux premiers venus à moitié évanouis et de les prendre sur chacune de ses épaules, jusqu'à la charrette. Iseut s'en sortait ma foi très bien avec le gérant de la boutique, et il avait sa hache à disposition au besoin – ça ne lui ferait que trop plaisir de s'en servir. Il ne se retint pas cependant de bougonner en sentant la fumée provoquée par Wolfran prendre d'assaut la grande pièce. Ça avait l'air de marcher, oui, mais Dieu que ça puirait. Franchement, deux coups dans la gueule les auraient tout aussi bien réveillé sans les emmerder, eux, mais il ne fit aucun commentaire audible pour ses camarades. Il assomma un idiot qui commençait à gueuler, même pas bien réveillé, et le traîna sur la charrette avec tous les autres, avant de se retrouver avec Iseut, Kitty et Wolfran devant la bâtisse.
Son sourire s'élargit à l'écoute de Kitty – il semblerait que la Griffe Marine se munisse maintenant de belles créatures, et ça n'était pas pour lui déplaire –, qui proposait finalement d'aller à Sweet Transvestite, la maison close de la ville, oscillant entre légal et illégal. Aussi étonnant que ça puisse être, il n'y avait jamais foutu les pieds, mais Dieu qu'il se souvenait bien du chemin jusque là-bas. Faut dire que ces diablesses faisaient naître une tentation non négligeable en lui, et il n'avait jamais pensé qu'il irait la première fois pour essayer de sauver les gens d'une putain (c'est le mot) de bombe. Il hocha la tête à la proposition de Kitty, son sourire disparaissant progressivement. Fallait se reprendre, l'heure n'était ni à ses conneries, ni aux batifolages. Son regard se porta sur Wolfran qui s'en allait à toute vitesse, avant que lui ne se mette en route vers Sweet Transvestite. L'établissement a toujours l'air plein à craquer, avec la Sirène Amputée de vidée, je vois pas vraiment où aller d'autre. Il serait bon d'aller faire un tour à la Griffe, juste au cas où – j'y étais aussi, mais des idiots qui se cachent çà et là, y en a toujours là-bas.
A peine eût-il fait dix pas qu'une horde de gens se précipitaient dans le sens inverse, vers la sortie de la ville, hurlant et courant comme jamais. Par les Dieux, il n'avait pourtant enlevé ni son Charnel ni ses vêtements, et il ne voyait dans cette rue rien d'autre qui aurait pu faire s'agiter autant de gens aussi vite. Son regard se posa enfin sur un loup, à peu près aussi grand que lui l'était sous sa forme animale, mais d'une couleur totalement opposée. Cúchulainn avait beau ne pas avoir le plus gros QI du continent, il n'était pas dupe pour autant. Même s'il ne disait pas un mot – il savait ce que risquait un homme à se changer en animal au beau milieu de la capitale, même dans un tel contexte –, son instinct ne le trompait que peu. Wolfran qui part le loup qui arrive, c'était pas bien discret, mais son odeur et ses yeux le trahissaient bien plus encore. Il gardait de ses dix ans de loup un odorat bien sensible, et il aurait pu suivre le sorcier à la trace sans soucis. Il adressa un léger signe de tête au loup, sans s'alarmer plus, alors qu'il jouait lui-même avec son Charnel. Il y avait bien assez d'un loup dans la capitale, quand bien même il avait l'esprit humain, pour ne pas qu'il s'y mette – mais il s'en voulait un peu de ne pas y avoir pensé plus tôt, une telle forme pouvait faire considérablement avancer les choses, c'est sûr. Profitons-en pour foncer à Sweet Transvestite, je pense que les gens n'auront pas besoin de nous ici pour se tirer – et Wolfran sait où nous allons, il nous rejoindra probablement là-bas. Cúchulainn contourna le loup comme s'il ne savait rien, se permettant seulement de lui gratter l'arrière de l'oreille au passage comme il le faisait toujours en passant près d'un chien ou tout ce qui s'en rapprochait. Si quelque chose lui manquait, à lui, c'était bien ça.
Ils arrivèrent finalement devant la maison close, dont la porte ne souhaitait visiblement pas s'ouvrir. Il ne lui en fallait pas plus pour donner un grand coup de pied dans la porte, s'adressant sans attendre à la réceptionniste. Vous avez un moyen de faire passer un message dans toutes les chambres, ou va falloir faire du porte-à-porte ? Ca ne lui aurait pas vraiment déplu d'aller chercher des femmes sublimes à moitié dévêtues dans les chambres, mais niveau efficacité, c'était pas encore ça.

Iseut, Wolfran, Kitty, Cúchulainn

Moi, j'aime quand ça fait 'boum'

Le Sweet Tranvestite. Après les drogués, les filles de joie. Merveilleux.

Il ne fallait pas se méprendre, la bergère était tolérante et assez ouverte d'esprit pour ne pas froncer le nez de dégout quand elle croisait ses co-citoyens aux habitudes de vie ou au travail disons ... Peu communs. Elle collaborait même avec certains dans le cadre des Lames et cela ne la dérangeait pas outre mesure. Si certaines choses avaient pu la choquer lorsque Tristan et elle avaient débarqué dans les rues de la Capitale, elle avait eu plus de quinze ans pour se faire à ses travers. Pour tout dire, elle les acceptait même désormais sans peine. Non, le problème était juste le jour en lui-même. Dangereux, mal choisi, mal fichu. Cette peur qu'elle dissimulait derrière ses beuglements qui enjoignaient la plèbe de fuir le plus vite et le plus loin possible, derrière sa mine fière et déterminée. Cette envie beaucoup trop humaine à son goût de trouver une cave, un coffre-fort, n'importe quoi en attendant que l'orage passe. Quelle sacrée rebelle elle faisait !

Maintenant que la Sirène Amputée était dégagée - grâce à l'intervention de cette adorable bouille de Wolfran, en grande partie -, il n'avait plus qu'à se rendre à la maison close. Séparément ? L'idée ne l'enchantait pas vraiment et elle le fit savoir. Ce qui n'empêcha pas Wolfran de se carapater sans se soucier que Maman Iseut donne son accord ou non. Elle fronça légèrement les sourcils mais se garda bien de tout commentaire, son attention revenant sur Kitty et Lainn. Elle trouvait d'ailleurs que ce dernier regardait la brune d'un peu trop près et se dit que, décidément, même dans une ville au bord de l'apocalypse, certains avaient toujours un curieux sens des priorités. Enfin bon, pour ce que ça la concernait, de toute façon ...

Son compagnon ayant décrété que Wolfran les rejoindrait en chemin, ils reprirent leur route, toujours en alerte. Des cavalcades désespérées à contre-sens du leur la firent s'immobiliser un instant, le temps d'apercevoir un gigantesque loup noir courir derrière la masse terrorisée. De ce qu'elle en voyait, la bête ne semblait pas leur vouloir le moindre mal mais plutôt effectuer la même tâche qu'eux, aussi échangea-t-elle un regard entendu avec Cùchulainn. Elle n'avait pas la prétention de s'y connaître mieux qu'un autre sur les animaux magiques de Fort Fort Lointain, néanmoins, elle en avait croisé suffisamment pour savoir les reconnaître, surtout au vu de la situation. Un simple loup aurait déjà égorgé quelques passants sur son passage. Elle espérait simplement que l'idée ne viendrait pas à Forgéteinte de retirer sa bague car elle se voyait mal arpenter les rues effervescentes avec Kitty pour seule compagnie. Et dire que l'homme-loup pensait qu'elle ne l'estimait guère, s'il savait, il ne se sentirait plus de fanfaronner, le bougre.

L'entrée du Sweet Tranvestite dument forcée, elle profita de ce que le blond s'occupait de l'hôtesse d'accueil pour aller déloger les quelques clients qui patientaient sur les fauteuils molletonnés. La joaillère revint au moment où la réceptionniste bégayait un " Je... Je peux y aller moi-même mais euh ... Ça va prendre un peu de temps et ... " Iseut leva les yeux au ciel. Ils n'avaient pas, allez, une cloche ? Une alarme ? Un porte-voix ? N'importe quoi qui ramènerait tout ce petit monde fissa au rez-de-chaussée ? " Euh ... Non. Enfin, je crois pas ? " hésita-t-elle, visiblement assaillie par la panique. Par la Grande Mère ! Elle était stagiaire ou bien ? La bergère se tourna vers Kitty. Elle avait nommé la propriétaire des par son prénom, c'était bien qu'elle connaissait les lieux, non ? " Prend le relai, je crois que la demoiselle va nous faire une crise d'hyperventilation. S'il y a quelque chose pour rameuter l'établissement, déclenche-le. " Sauf si ce quelque chose ressemble à un détonateur, bien sûr, se retint-elle d'ajouter. Pas sûr que son humour soit très bien accueilli par les temps qui couraient.

Sur ces mots, elle s'empressa de grimper l'escalier et de commencer le "porte-à-porte" susmentionné. Ils n'avaient pas de temps à perdre encore une fois, malgré tout, au cas où certains ne saisiraient pas le caractère urgent d'un potentiel carillon d'alerte, elle ne se serait jamais pardonnée de les avoir laissé dans l'ignorance. Elle délogea un premier couple en train de se rhabiller avant de se diriger vers le battant d'en face. Un homme nu comme un ver, cuisses écartées et l'air nonchalant lui jeta un regard désapprobateur alors qu'elle débarquait sur le seuil. " Hey ! J'en avais demandé une propre ! T'es pleine de poussière et fagotée comme une paysanne, ça va pas être possible ! " clama-t-il bien haut et bien fort, histoire d'être entendu jusqu'au fin fond d'Afshin - d'où il semblait tenir son accent. La mâchoire inférieure de la bijoutière céda sous le choc. Il venait bien de ... Mais ... Quoi ?! Elle le dévisagea, ahurie, avant de se renfrogner aussitôt. Ni une, ni deux, elle empoigna fermement son bâton et dégaina son épée de sa main libre. " Il y a une bombe dehors. Dépêchez-vous de sortir. " Comprenant qu'il n'avait pas à faire à une femme de petite vertu et surtout, que la lame pouvait très bien finir entre ses cuisses ouvertes, le type sauta sur ses jambes et fit mine d'aller attraper ses vêtements. La lame en question frôla sa glotte et l'arrêta dans son geste. " Allons messire, vous n'en avez pas besoin. Après vous ! " railla-t-elle, hilare, tandis qu'elle lui désignait la porte du bout de son bâton. Il s'empressa de passer devant elle et elle en profita pour lui piquer la fesse avec la pointe de son épée, lui arrachant ainsi un cri de pucelle effarouchée tout à fait délicieux à l'oreille de la rebelle insultée. Elle sortit à sa suite, son sourire ayant cédé la place à une moue boudeuse. " Je t'en ficherais de la paysanne, moi ... " râla-t-elle tandis qu'elle remettait Sybelle dans son fourreau. Décidément, quelle journée moisie.

L'établissement lui paraissait en passe - sans mauvais jeu de mots - d'être vidé à son tour, ils n'avaient donc plus qu'à se rendre à la Griffe Marine.