Bal de Snowel

the weather outside is frightful but the fire is so delightful

Quelle est adorable, cette petite. Elle a déjà tout saisi aux règles de la flatterie, et aussi sincères semblent-elles, elles gonflent avec ravissement l’égo du petit prince qui ne peut s’empêcher d’offrir un sourire aux deux invités très appréciables. Tant de blondeur dans un même cercle de connaissances, ça vous ébloui  forcément. « Je me nomme Svetlana Plumenfeu et je vous suis pour toujours redevables gentes sires. »  La demoiselle ainsi-présentée accompagna les paroles d’une révérence et Charmant hocha simplement la tête pour balayer la remarque d’un revers, jouant au modeste et preux chevalier qu’il se devait d’être. Jouant de politesse encore, les deux interlocuteurs firent part de leurs ressentis quant à la réception. Et de réception, l’ambiance se lançait avec plus d’ardeur, les notes s’enchaînant dans un rythme plus soutenu, les pas battant le marbre du sol avec ferveur et légèreté. Sans véritablement s’en rendre compte, Ledésirable marquait le tempo du bout du pied, l’esprit absorbé à moitié dans la conversation et à moitié dans les festivités. « Ça fait bien longtemps que je n'ai pas assisté à une réception royale, et c'est encore plus éblouissant que dans mes souvenirs. » Et le chevalier avait plus que raison. La pièce était décorée avec goût et harmonie, dans un élan pompeux certes, mais quoi de plus représentatif de leur régence ? Une fée au pouvoir, et une autre, organisatrice évènementiels, n’allaient pas se contenter du peu. Quitte à éblouir, autant le faire en bonne et due forme. « Je suis ravi que le bal soit à votre goût. »  Ah, qu’il était parfait dans ce rôle de beau-parlé et de courtoisie. Les compliments et les notes attentives lui venait avec un naturel si déroutant qu’il lui arrive lui-même de douter de sa propre hypocrisie. Enfin, la jeune femme reprit la parole, et Charmant coula un regard vers Dragée, qui virevoltait dans les bras de son cavalier. « Est-ce elle la fameuse Fée Dragée dont on voit les affiches dans les rues ? Sa grâce n’a pas d’égal dans ce monde. » En vérité, il y a bien de rares silhouettes qui valent celles de la fée, mais celles-ci sont si peu connues des peuples, ou si perdues dans le propre esprit de Charmant, qu’il ne parvient pas nier cette affirmation, la rendant ainsi plus véritable que jamais. « C’est bien elle, ma douce fiancée, ravissante n’est-elle pas ? »

Et soudain, alors même qu’il eut prononcé ces derniers mots, un silence de plomb s’abatit sur l’assemblée, qui se figea comme un seul homme. S’en suivit une déflagration magistrale, de celle qui vous ruine un brushing en moins de deux. Et de brushings justement, celui de Charmant s’écrasa contre le sol, sous la puissance de la pression libérée. Son corps se couvrit en une fraction de seconde d’une couche de poussière et de suie, alors qu’alentour, entre deux notes d’un acouphène saisissant, il ne perçu qu’un chaos miniature, la tombée de roches et des cris de douleur et de panique. Charmant se releva sans peine, après avoir évacué la fumée de sa gorge d’une quinte de toux. Ser Perceval, qui se relevait à son flanc s’en était sorti également. C’est alors que son attention se reporta sur la demoiselle avec qui il conversait il y a quelques secondes à peine. « Svetlana, vous m’entendez ? » La jeune femme semblait à demi consciente, sa tête avait dû rencontrer de plein fouet le rebord du buffet, désormais lui aussi à terre. « Si vous m’entendez,  battez deux fois des paupières. » Charmant était perdu, dérouté. Il ne savait que faire, comment réagir. On ne l’avait pas formé aux secours d’urgences, encore moins aux traitements post-attentats. Et d’ailleurs, si jamais des renégats accompagnaient cette explosion ? S’ils en avaient après sa vie ? Diantre, il devrait aller se mettre à l’abris. Il ne pourrait risquer de perdre sa propre vie. Mais sa réputation non plus. « Sire Perceval, je vous charge du sort de cette jeune femme, je dois aller m’assurer que nous ne sommes plus menacés. » Depuis le placard de sa chambre, entre deux nuisettes et ses étagères de chemises, le tout en valdinguant d’avant en arrière en enserrant sa peluche tyrannosaure qu’il conserve sous son lit depuis qu’il a six ans. Une fois éloigné du buffet, Charmant s’arrêta un instant, pour balayer la salle de bal des yeux, dans l’espoir de reconnaître des visages connus en bon état, plutôt qu’engoncé entre un demi-mur ou aplati sous le sapin. Ses iris rencontrèrent celle de Marie, qui semblait ne pas trop mal s’en sortir. Il se détourna vivement, à la recherche d’autres prunelles qui lui étaient chères, celles de Dragée, celles de sa mère. Et la panique envahit ses muscles lorsqu’après un tour d’horizon de la salle, il ne peut trouver sa mère en dehors des décombres.

   

catacombes & balastrophe

une révolution se joue sur tous les fronts, même six pieds sous terre

Potté était de son côté. Potté. Était. De. Son. Côté. Alors pourquoi avait-elle autant envie de l'étrangler ?! Sérieusement. Non seulement, il avait omis de la prévenir de son plan, plan dont elle avait appris l'existence grâce au journal de Fort Fort Lointain, mais en plus, il donnait rendez-vous dans un endroit catastrophique question repérage, et il lançait les hostilités sans même les laisser dire quoique ce soit. Non, vraiment. Olga n'était pas de bonne humeur. Pourtant elle aurait dû l'être, elle qui rêvait sans cesse de ce moment. Débarquer au château, y mettre la pagaille et confronter Marraine en face-à-face. Des mois qu'elle tannait Potté pour se lancer, y aller, et enlever cette couronne de cette satanée tête. Et finalement, le voilà, ce moment tant attendu. Alors pourquoi cette aigreur ? Pourquoi cette réticence ? Peut-être parce que ce n'était pas un si bon plan que ça ... Elle aurait voulu en discuter avec le cerveau de cette opération, mais c'était déjà trop tard. Il avait déjà mis le feu aux poudres, dans tous les sens du terme. Ils avaient à peine eu le temps de se mettre à l'abri. Des débris leur tombèrent sur la tête, et chacun se protégea comme il put. La poussière était omniprésente, tentant de s'engouffrer dans leurs poumons réfractaires à la chose. Toussant, se masquant le bas du visage, Olga commença à grimper vers leur nouvelle destination, non sans râler intérieurement - bien entendu. Tout ça avait déjà mal commencé, et ça ne risquait pas d'aller en s'améliorant. Émergeant du trou béant que les explosifs venaient de former en plein dans la salle de bal, Olga observa les alentours, constatant les dégâts monstres qu'ils avaient provoqués. Un air grave sur le visage, l'Ogresse réalisa que les choses ne se passaient absolument pas comme prévu. Des blessés gisaient partout autour, parfois coincés sous des décombres, parfois juste assommés, ou inconscients. Aucun sang n'allait être versé hein ? Voilà une première résolution partie en fumée. Se fondant dans le décor - pour ça, ils n'avaient pas trop de mal, ils étaient tout autant couverts de poussières que le reste des convives - Olga se mit de côté en attendant Potté, continuant de détailler ce qui l'entourait, dépitée de voir un spectacle aussi désolant et affligeant. Le fameux matou l'ayant rejointe, la brune lui jeta un regard en coin, à la fois dur et blasé. Lui non plus ne devait pas s'attendre à ce que les événements prennent une tournure pareille, et il devait être aussi surpris que les pauvres victimes de leur fulgurant assaut. D'un calme glacial qui ne lui était pas naturel, elle continua de fixer Moustaches Rousses. « Je parie que ce n'était pas du tout ce que tu avais prévu, n'est-ce pas ? » Bien sûr que non. Il devait probablement s'en mordre les doigts, qui sait ? Lui qui semblait si confiant, comment se sentait-il en cet instant ? Alors que son plan avait déraillé ? Alors que l'un de ses objectifs n'allait pas être atteint ? « Ça t'apprendra à faire des plans tout seul dans ton coin ... » Rancune mal placée. Il était clair que ce n'était pas le moment pour ce genre de réflexion, mais Olga restait Olga, incapable de jouer les hypocrites. Le jaugeant de haut en bas, l'Ogresse finit par se détourner et par avancer au milieu des décombres, se dirigeant vers la probable localisation de Marraine, soit le fond de la salle, face à la porte, là où devait sûrement se trouver son trône. Ils étaient coincés, obligés d'avancer, alors autant aller jusqu'au bout.

Le bal de Snowël

winter waltz

La danse était délicieuse. Exquise. Pour un instant, il aurait été jaloux des quelques instruments ensorcelés – bientôt peut-être que sa profession disparaîtra, bientôt peut-être les concerts ne seront que des spectacles de magie. C'était déprimant, dépitant à s'avouer, tant qu'il en lâcha un soupir entre le deux et le trois de leur un, deux, trois. La soirée était merveilleuse. Divine. Pourtant, il s'ennuyait à en crever. C'était presque trop beau pour rester réel, et aussi hypocrite que ça puisse paraître aux vues de ses activités, toute cette magie lui filait la migraine. À vouloir faire du parfait, on en fait trop. La plupart du temps il gardait cependant son sourire, parce que c'était d'usage, parce que c'est comme ça qu'on fait. Il allait parfois se perdre dans les yeux et les cheveux de Rouge, parfois dans sa chimère aux yeux de jais, à quelques mètres et son sourire ne pouvait que s'agrandir. Parce qu'elle était trop belle et qu'il était trop mal. Mal foutu, mal à l'aise. C'en était touchant tant il avait l'air de vouloir courir, ailleurs, loin. Et après tout, il aurait du. S'il avait su, s'ils avaient su.
Il aurait aimé finir sa danse, s'il l'avait pu, mais s'estimait déjà bien heureux de ne pas s'être trouvé au plein centre de la piste, là-même où le trou béant s'était fait. Par réflexe tant que par surprise, Barthélemy ferma ses yeux aussi fort qu'il en était capable et serra sa cavalière dans ses bras. Elle avait beau avoir fort caractère, il ne servirait à rien face à la bombe. Sans aucune délicatesse, ils glissèrent violemment au sol, roulant sur quelques mètres. Les cris après l'explosion ne permettaient aucun repos à l'oreille, tant qu'il en avait des acouphènes. À lui faire croire qu'il ne pourrait plus jamais faire sortir une note juste de cette carcasse déjà bien cabossée. Quand il rouvrit les yeux, la fumée était trop dense pour y voir quelque chose. Il s'attarda à se redresser, lentement pour ne pas se blesser, lui ou sa cavalière. Il jeta un œil à la pauvre – qui dieu merci n'avait rien de plus qu'un gros choc. Sa main passa rapidement dans ses cheveux d'or, ses lèvres se posèrent sur son front pâle et poussiéreux, puis il se releva et la prit contre lui. La fumée se dissipait doucement, et il voyait des gens en sortir. Oh s'il avait pu il les aurait presque félicités, mais trop d'innocents se trouvaient-là pour qu'il le fasse. Atteindre Marraine était un but facilement qualifiable de noble – ils se vantaient probablement de faire le bien, de lutter pour du mieux –, mais attendre que le château soit au plus possible vide venait du bon sens. Elle aurait été plus facile à localiser, à atteindre, à attraper si c'est ce qu'ils voulaient; mais mettre en péril tant de vie était bien trop cher payée pour une monarque qui n'était pas aussi mal que d'autres le prétendaient.
Aussi rapidement qu'il estimait que c'était possible, Barthélemy accompagnait Rouge jusqu'à l'extérieur, prenant garde à ce qu'aucun autre danger ne se dresse sur leur route. Mais c'est le plus grand de tous qui frappa, l'appel des yeux de son passé, à nouveau. DRAGÉE ! Ça n'était pas son nom que le démon hurlait, mais il ne réfléchissait même plus. Un dernier baiser se posa sur le front du chaperon une fois mené à l'extérieur, avant qu'il n'essaie de lui faire trouver un sourire rassurant sur son propre visage. Prenez la première calèche que vous verrez et rentrez vous mettre à l'abri, d'accord ? Je passerai bientôt voir comment vous allez. Une caresse prit place sous sa joue avant qu'il ne tourne les talons et reparte à l'intérieur au pas de course, le sang encore glacé de ce cri. Il fit un tour rapide de la salle, évitant au maximum le trou de néant au centre du plancher, avant de trouver son tourment. Étonnement, un sourire choisit d'éclore sur ses lèvres et il se pencha à ses côtés. Le temps de voir s'il n'arrivait pas trop tard – même si il n'aurait pas pu, ce soir-là, arriver trop tôt. Tout va bien, tout va bien. Rien ne va bien, et tout jusqu'à sa voix le trahissait. Pour la première fois depuis longtemps, Barthélemy paniquait, de cette panique qui prend aux tripes et serre la gorge. Comme si ça allait changer quelque chose, il essaya de boucher le morceau de mur qui l'empêchait presque de vivre. S'il pouvait ensorceler les objets inanimés, bon dieu, s'il pouvait, mais tout était bien trop lourd pour lui seul. Alors il s'accroupit aux côtés de Poucet, ne trouvant rien d'autre à faire que dégager le visage du blessé de quelques mèches trop bouclées. Quelqu'un arrivera bientôt, nous allons vous sortir de là.. Il n'en savait rien, pas même sûr que quelqu'un ici se préoccupe d'aider les blessés plutôt que de fuir pour sa vie. Il avait l'espoir que le frère Cailloublanc débarque en trombe si ça n'était pas Dragée et sa magie, mais ne pouvait pas faire grand chose plus que rien. Comme pour paraître serein et rassurant, sa main se posa sur le bras bien habillé de Poucet, scrutant comme il le pouvait à travers la fumée, en attente du héros qui, à son grand dam, il n'était pas.

Bal de Snowel

Et le grabuge continue...

Je reste immobile un moment, contemplant le trou béant dans le plafond, abasourdi par ce qui vient de se passer, comme le reste du groupe probablement. Alors c'était ça, le plan génialissime des rebelles ? Faire exploser une bombe en laissant à peine le temps à la petite équipe de se mettre à l'abri ? Eh bin, si j'avais su, je l'aurais organisé moi-même, cette révolution. Je pensais qu'on aurait profité du bal de Noël organisé par Marraine pour s'introduire dans le château par un quelconque passage secret dans les catacombes en frappant sur quelques gardes au passage, pas qu'on allait faire une entrée explosive en plein milieu de la réception...

Personne ne bouge jusqu'à ce qu'Olga – parce qu'apparemment c'est le nom de la femme qui nous a conduit malgré elle jusqu'à Potté – commence une ascension plus ou moins laborieuse vers la salle de bal. Machinalement, je la suis en tentant de ne pas suffoquer à cause des débris et de la fumée laissés par l'explosion. Ce n'est que lorsque j'atteins le plafond, enfin, le sol du coup, que je me rends compte du véritable chaos que notre petite action commando a engendré : des gens courent et hurlent dans tous les sens, personne ne semblant comprendre ce qui vient de se passer. La fumée est trop abondante à l'endroit où je me trouve pour distinguer quoi que ce soit de détaillé, ce qui me force à tituber au hasard, butant sur des objets que je ne distingue pas.

Si je m'étais attendu à la vision qui s'offre désormais à moi, je ne sais pas bien si j'aurais accepté de faire partie de cette mission à la base. Qu'est-ce qu'il nous a dit, Potté, déjà ? Ah oui, ni morts, ni sang... Eh bin, va falloir revoir un peu ton programme, Moustaches Rousses... Pour ce qui est des morts, je ne peux rien affirmer, bien que certaines personnes semblent être dans un état plus que critique. En revanche, pour le sang, on ne peut pas se tromper, il y en a partout ! Presque tous les invités sont couverts de blessures plus ou moins superficielles, et plusieurs d'entre eux sont étendus inconscients à divers endroit de la salle. Du coin de l’œil, j'aperçois un jeune homme brun penché sur le corps de quelqu'un bloqué sous un mur. Je grimace en me disant que ce n'est vraiment pas comme ça que je voyais la révolution se faire : ce n'est jamais bon pour une cause quand ses membres commencent à agir comme des terroristes inconscients...

Cependant, je me ressaisis, mieux vaut aller jusqu'au bout maintenant qu'on est là, non ? Je me remémore les différentes missions confiées par Potté : attraper Marraine – ça c'est pour lui et Olga – s'occuper de Charmant et des gardes. Bon, très bien. Ça va être difficile de trouver Charmant dans tout ce raffut, d'autant que je ne l'ai vu que sur les photos prises pour Leroyal, alors je ne suis pas bien sûr de pouvoir le reconnaître. Je scanne donc la pièce pour trouver les gardes, beaucoup plus facilement reconnaissables, lorsque mes yeux se posent sur une silhouette  qui s'éloigne du buffet : Charmant. En fait, il n'est pas vraiment difficile à reconnaître, avec ses beaux habits et sa chevelure reconnaissable entre toutes.

Alors donc, ce sera toi, Ledésirable, je laisse tomber les gardes. J'affirme ma prise sur le pommeau de  mon épée et commence à me frayer un chemin à travers le chaos, incapable de supprimer le sourire sur mon visage.

le bal

il songea à ce que devait ressentir, disons, un renard face à un mouton en colère. un mouton, de surcroît, qui avait les moyens d’employer des loups.

Ils avaient finis par trouver l'instigateur de leur espoir, parce que les efforts payaient toujours. A bien y réfléchir, tout se payait un jour. Absolument tout. C'était une certitude pour le forgeron, tout autant que le discours de Potté lui avait redonné du courage malgré leur escapade épouvantable, et une évidence qui menaçait de sortir des entrailles du château : Marraine elle aussi allait payer. Elis ignorait pourtant qu'elle n'allait pas être la seule. En se relevant difficilement, après que les rebelles eurent tous dépasser le point de non-retour, ce fut sa première constatation, qui lui serra le cœur et le poussa à se hisser à travers les dégâts pour les constater pleinement. La salle de bal avait des airs de sa relation avec son frère. La fumée, les débris, le sang. Tout y était, à l'identique. Cette observation le fit froncer les sourcils, et il demeura immobile durant un instant afin de reprendre ses esprits, comme si rien n'était clair, alors que tout l'était finalement : Quelque chose n'avait pas fonctionner comme prévu. On disait souvent qu'on ne pouvait faire une omelette sans casser d’œufs, et cela devait être la même chose pour une révolution. Elis était presque prêt à accepter cette fatalité si cela aurait pu faire descendre de son trône la régente actuelle - ou un peu plus bas peut-être, six pieds sous terre par exemple, bien qu'il ne le pensait pas réellement. Mais ce n'était pas le cas, aujourd’hui, du moins à ce que le rouquin pouvait distinguer dans toute cette tragédie mal synchronisée. Ici, pas de révolution. Juste de la vengeance, aux vues d'Olga qu'il regarda se mettre à courir vers le fond de la salle, et puis des blessés, des dizaines, étendus sur le sol. Il ne reconnaissait pas la reine dans ces fragments rougeâtres, ni encore le prince qui devait épouser son passé. Alors quoi ? C'était pour cela qu'il était venu ? Il eut l'impression de n'être que le spectateur d'un véritable et authentique dérapage.

Fort heureusement, une silhouette familière refit surface, en le poussant à le suivre comme à l'accoutumée. Au moins son chien savait-il où aller. Comme quoi les animaux, même les canines teintées de rouge et la gueule recouverte de sang, semblait avoir plus d'esprit que leur petite troupe qui avait dégainé épée et armes en tout genre. Elis n'échappa d'ailleurs pas, lui non plus, à ce début d'assaut qu'il désamorça en se mettant à courir à l'instar de Cinead. Ce dernier s'éloignait du trône, du buffet, des personnes affalés à terre, de la vengeance même, de tout. Et le forgeron allait avec lui, car il commençait à comprendre.
Il retrouva ses esprits lorsque le pan de mur complètement ravagé se dessina sous ses yeux, qui se baissèrent sur les deux personnes se trouvant juste à côté - non, une personne seulement. L'autre était en dessous. L'autre n'était pas une personne. "POUCET !" hurla-t-il, torturant ses poumons poussiéreux par la même occasion, apposant sa petite pierre à l'énorme édifice du chaos local. Épée en main, il fut rapidement vers son frère, ruine parmi les ruines. Il évalua comme il put le mur qui était tombé sur lui, en même temps qu'il serrait ses doigts sur le pommeau de son arme en voyant qui se trouvait à côté du blessé - ce n'était pas une personne non plus. Pourquoi était-il ici ? Pourquoi toujours il se retrouvait à la place qui revenait de droit à l'aîné Cailloublanc ? Pourquoi une étrange amertume naissait au creux de la gorge de ce dernier ? "Le spectacle vous plait-il ?" murmura-t-il au meurtrier avec une rage non dissimulée. Il ne put s'en empêcher. Il aurait même voulu que Cinead s'occupe de lui, mais ce dernier gardait son rôle en tête puisqu'il s'était mis à lécher le visage de Poucet, moyen certes peu classique de le garder éveillé, mais non pas moins efficace. Après une demi-seconde de réflexion, Elis en oublia ses mauvaises impressions et rangea sa lame dans son fourreau, en se mettant à genoux aux côtés de son cadet. Ainsi, il se sentait si vulnérable, sans arme qui puisse vaincre ce mur-prison, le coeur battant la chamade, les sens en alerte mais le cerveau incapable d'établir un quelconque plan qui puisse convenir. Il perdait son sang froid. Il le perdait comme Poucet perdait son sang, et Marraine des secondes d'existence si les autres rebelles qui eux faisaient leur travail la trouvaient. "Poucet, tu m'entends ? Reste calme, n'essaie pas de bouger, je vais te sortir de là." dit-il en désespoir de cause, osant à peine l'effleurer de peur de le voir se désagréger sous ses yeux, comme un pantin de bois dans un feu gigantesque. Il mentait. Il ne pouvait pas le sortir de là, pas tout seul. Mais sa conscience, ou peut-être son cœur lui ordonnait de faire fuir le flûtiste plus vite que de lui demander son aide. Il savait pertinemment qu'il se comportait comme un idiot. Mais c'était ainsi quand on cédait à la panique, ce qu'il faisait doucement mais sûrement. "Levez-vous !" dit-il brusquement à l'intention de Barthélémy, après quelques secondes à vérifier si les blessures de son frère étaient aussi graves qu'il le pensait - elles l'étaient. Ceci fait, il fit de même, en murmurant une énième fois à Poucet de se tenir tranquille par pitié, et passa la main sur le pan du mur tombé. Le verdict tomba rapidement. Il ne pouvait le déplacer tout seul. Il doutait même pouvoir le faire avec l'aide du musicien. Ils n'étaient que des hommes, après tout. De pauvres humains sans pouvoir aucun. Il fallait se faire à l'idée. Ceci l'énerva tout bonnement, et il s'en prit donc à l'autre, presque content de pouvoir le faire. "Qu'attendez-vous ?! Ne restez-pas là !" Allez chercher de l'aide. S'il vous plait. Ces mots restèrent coincés à l'orée de son cœur, mais il espérait qu'il lise dans son regard. Puis il se détourna pour revenir vers le blessé, sans s'occuper du reste, car au final, le restait l'importait peu.

Tout allait bien, vraiment. L'ambiance était au beau fixe et, malgré les convenances, la plupart des invités s'amusaient réellement. Nemo regardait Marie du coin de l'oeil, tout en guettant le reste des convives. Charmant l'amusait beaucoup - il n'avait rien d'un homme. Le capitaine n'était même pas sûr qu'il eût été autorisé à monter sur le bateau de Sinbad. Il allait se servir une coupe, quand le sol trembla sous ses pieds. Un bruit sourd l'empêcha de distinguer ce qui se produisait avec clarté mais il vit des pierres se dérober, chuter, tombant sur des invités à une vitesse folle. Nemo avait fini au sol, apparemment sans aucune blessure. Une rapide inspection le trouva presque intacte, si ce n'était quelques coupures anodines. Rapidement, il se releva et inspecta le chaos, tentant de se rendre compte de l'événement qui venait de se produire.

Les rebelles. Ces gens qui s'ennuyaient à un tel point qu'ils préparaient un plan pour mettre des vies en danger. Il aurait dû s'en douter, bon sang ! Des yeux, il chercha Marie mais la foule était tellement dense qu'il mit beaucoup trop de temps pour apercevoir ses cheveux bruns. Sur le sol, près de la porte. Rapidement, il écarta les quelques paniqués de son chemin, auxquels il ne put s'empêcher de crier : « Arrêtez donc de vous presser, le pire est passé ! Contentez-vous de dégager d'ici, est-ce si compliqué ? » Non, ça ne l'était pas, la sortie était presque intacte.

La salle était sans dessus-dessous. Il n'entendait rien, sinon les cris et les pierres que l'on bougeait. Il arriva enfin vers Marie, qui, au sol, semblait tout de même consciente. Rapidement, il la prit dans ses bras et l'éloigna de la foule, de la salle, de ces rebelles qui devaient sûrement traîner quelque part et sortit dans le couloir, noir de monde mais presque intact. Là, il la posa délicatement sur le sol et mit sa tête sur ses genoux. Il lui suffisait de quelques minutes pour reprendre ses esprits.

« Marie, ça va ? » Il lui caressa les cheveux - plus pour la rassurer que pour lui montrer de l'affection. « On va rester là un moment, le temps que tu reprennes un peu tes esprits, puis on va sortir, d'accord ? Et voir un médecin, parce que je pense que tu en as besoin. » Un sourire. Accordé à celle qu'il avait accompagné toute la soirée. Comment un bal de Noël avait-il pu se transformer en catastrophe ? Et comment personne n'avait-il pu voir venir ce coup-là ?

Je n'étais pas venue pour ça. J'étais venue pour défendre les opprimés, pour dénoncer ce charnel mis en place, cette dictature de la bienséance et de l'humanisation. C'est pour ça, que j'étais là. Je n'étais pas là pour faire exploser la salle de bal, faire trembler les murs, blesser les gens et traumatiser tout le monde.
Non. J'avais eu assez de tout ça. Je ne pense pas que ce soit ce que Potté voulait. Cette petite escapade est devenue hors de contrôle. Du n'importe quoi. Après l'explosion, j'ai mis quelques minutes à reprendre mes esprits, et puis j'ai réfléchi. Nous devions entrer dans la salle de bal de toute façon. Qui pourrais-je trouver, là-bas ? Qui avais-je blessé, inconsciemment ? Des amis ?

Gretel... Gretel ne devait-elle pas y être pour le buffet ? J'arrivais. Avec tous les autres. Le chaos total. J'aperçus enfin le buffet mais à la place de Gretel, je voyais un amoncellement de pierres. « Gretel ! » Parmi les décombres, je tentais de me frayer un chemin. Je ne connaissais presque personne, ici. Gretel avait été l'une des première à m'accueillir et, surtout, à me donner une chance. Et elle était blessée. Je l'avais blessée. J'avais participé à tout ça.

« De l'aide, s'il vous plaît ! » J'arrachais un bout de nappe à peu près propre et l'enroulait autour de son bras blessé, qui continuait à saigner abondamment. Tout le monde était occupé à sauver quelqu'un. Et moi, je ne pouvais rien faire. On avait causé tout ça. Les lames de cendres.

Les lames de sang.

Le bal de Gnowël

Une soudaine explosion et Perceval se retrouva soudain à terre. Un instant sonné, il ne tarda pas à recouvrer ses esprits et se releva, vérifiant que Charmant, à ses côtés, n'était pas blessé. Bien que Perceval ne fasse plus partie des rangs des chevaliers de Fort Fort Lointain, il se sentait toujours responsable pour la protection de la famille royale, quelle qu'elle soit.

Hébété, le chevalier observa le prince se tourner vers Svetlana. La jeune femme, constata avec Perceval avec horreur, était toujours au sol, apparemment inconsciente. Que devait-il faire ? Il regarda le prince avec de grands yeux, espérant que Charmant sache quoi faire. Hélas, ce dernier lui confia la responsabilité de s'occuper de la jeune femme et avant que Perceval n'ait pu répondre, le prince s'éloignait déjà.

Des personnes criaient, s'appelaient, couraient dans la salle d'un blessé à un autre, mais Perceval n'avait d'yeux que pour Svetlana. Il finit par s'agenouiller auprès d'elle et lui prit doucement la main. Un peu de sang coulait d'une plaie au front, où elle s'était probablement cognée contre la table. Utilisant un coin de son manteau rouge, Perceval essaya d'essuyer le sang.

" Svetlana, appela-t-il d'une voix tremblante. "

La jeune femme marmonnait quelque chose, mais avec l'agitation ambiante, Perceval ne parvenait pas à comprendre ses paroles. Il se pencha vers elle au moment où elle rouvrait enfin les yeux.

" Sir Perceval ? "

Perceval esquissa un sourire de soulagement. Au moins elle le reconnaissait ! Mais avant qu'elle n'ait pu finir sa question, elle avait sombré une nouvelle fois dans l'inconscience. Perceval ne savait quoi faire. Il hésitait à la bouger, à l'emmener dans un endroit plus calme, ne sachant pas où elle avait pu être blessée autrement qu'à la tête.

Le chevalier, désemparé, se redressa et lança des regards désespérés autour de lui, espérant reconnaître une tête familière ou au moins attirer l'attention de quelqu'un.

" Elle a besoin d'aide ! S'il vous plaît ! "

Mais sa voix avait perdu de sa force habituelle. Il avait rarement eu l'occasion d'assister à ce genre d'événements. Perceval avait été entraîné à se battre en duel ou pour la guerre, à réagir face à des ennemis entraînés et armés. Jamais il ne s'était ainsi retrouvée au cœur d'une attaque visant uniquement des civils.

Bal de Snowel

And there were stars in her eyes, so much it blinded the night sky

Je commençais à sérieusement m’énerver de cette situation qui me semblait inextricable. Ou pas. Mais vous savez, j’ai beau être un adrénaline junkie, aimer se retrouver dans ce genre de situations (même si pas forcément consciemment), ne voulait pas dire avoir le cerveau qui fonctionnait de manière cohérente et opérationnelle tout le temps ! Le cas présent, s’il n’y avait pas toute la panique, toute la peur et surtout la désorientation générale, je saurais ce qu’il faudrait que je fasse. Du genre : sauter par-dessus le buffet, j’étais un ancien acrobate apr-

Nan mais tuez-moi c’est pas vrai. Il fallait que mon cerveau pense à comment il aurait réagi en cas de non-crise pour qu’il pense à ce qu’il fallait faire….Allo, les gentils messieurs en blouse blanche ? Je vous appelle pour réserver une place dans votre asile de fou. Bon, trêve de plaisanteries, il fallait que j’aille aider Gretel moi ! Enfin, Gretel et Mulan, qui est arrivée entre les deux. Je pris un peu d’élan et sauta le buffet renversé, manquant de me ramasser à l’arrivée, et alla directement vers les deux femmes avec qui je travaillais. Bon sang, quel merdier. Mais Mulan avait eu la bonne idée de faire un bandage de fortune à Gretel. Maintenant, il faudrait la réveiller avant de la déplacer…Sait-on jamais. Quelque chose fit tilt dans mon cerveau ; quand est-ce que Mulan était arrivée ? Je ne l’ai pas vue en arrivant…enfin, on verra ça plus tard. Pour le moment Gretel ! Je cherchais du regard quelque chose pour la réveiller plus ou moins ne douceur et vit un pichet de jus de…Je ne sais trop quoi, qui avait presque résisté à la déflagration. Je m’en saisis et en vida le contenu sur la tête de ma patronne (pourvu qu’elle ne me vire pas pour ça !)

"Gretel ! GRETEL !" Je lui tapotai la joue doucement, tentant de la réveiller, puis me tournai vers Mulan "Bon, si elle ne se réveille pas dans les trois prochaine minutes, on la porte et on la fait sortir, on est d’accord Mulan ?"

Et Vassilissa ? Je ne l’ai pas attendue, je ne sais même pas si elle a réussi à sortir sans encombre du château où si elle s’est retrouvé dans un mouvement de foule ou pire…Je préférais mettre les pensées concernant Vassi plus loin dans mon esprit. Si je commençais à m’inquiéter aussi pour elle, je n’allais pas réussir à faire grand-chose…

le bal de snoël

frozen

Le chaos. L’effervescence. C’est un carnage qui prend vie sous mes yeux stupéfaits, vidés de toute belle émotion pour laisser place à l’effroi. Les invités hurlent et fuient dans tous les sens, se heurtant les uns contre les autres en tentant d’éviter les pierres qui volent du sol pour se fracasser un peu partout dans la grande salle. Le temps ralentit et je me sens comme prise entre quatre murs, incapable de bouger, de faire quoi que ce soit, même de respirer. Mon coeur cesse de battre dans ma poitrine, et une douleur me lancine les membres. La peur. Le danger. J’ose à peine bouger, juste assez pour regarder derrière moi. Je ne sens plus la main de Poucet dans la mienne. Il me suivait de près, désormais, il a disparu. L’horreur et la terreur s’accaparent mon âme. C’est dans ce genre de situation qu’on se sent seul au monde, et soudainement, plus rien ne compte à part la vie. La survie. La rédemption. Je suis proche de ce qu’il reste du buffet, j’aperçois la rouquine et Denougatine en mauvaise posture mais certains invités viennent à leur secours rapidement. Des gardes se mobilisent aussi pour aider les blessés, et je soupire d’un léger soulagement face à la mobilisation malgré la peur qui assaillit tout le monde. Le prince a disparu, je l’ai perdu de vue et en lançant un regard vers le trône, j’aperçois celui-ci vide. Où est Marraine ? Les éclats sont tombés, la poussière envahit l’espace et les invités cherchent la sortie en trombe, du moins, ceux qui peuvent encore marcher. J’agrippe ma robe pour la relever légèrement et me mets à courir dans la direction opposée des portes d’entrée. Je ne repartirai pas sans Poucet.

« DRAGÉE ! » Mon coeur se réchauffe en un instant, quand il perçoit sa voix vibrante quelque part dans la foule. Mes épaules cognent dans quelques personnes mais je ne faiblis pas, ne perdant pas mon allure. Jusqu’à ce que quelqu’un me rentre dedans et que mes jambes flagellent sous le choc. La chute, rapide et insignifiante. Ma peau s’agrippe à un roc qui me déchire la joue. Un gentilhomme me relève. Je ne prends pas le temps de le remercier et continue ma course, ne sentant plus la douleur si ce n’est celle qui me martèle le palpitant à l’idée que Poucet soit gravement blessé. Nous ne sommes pas dans l’arène, il n’y a ni règles ni temps mort. Si l’on perd ici, c’est fini. Mes ailes trop fébriles refusent de me soulever, je ne prends pas la peine de regarder, mais je crois que l’une d’elle est un peu amochée. Finalement j’aperçois une silhouette animale dans la foule qui me redonne espoir. Cinead. Je cours dans ses pas, jusqu’à ce qu’il m’amène à Poucet, et Elis. Barthélémy est là aussi. Mais je n’ai pas le temps de réfléchir au pourquoi de leur présence auprès de mon champion que je me laisse glisser à ses côtés, attrapant sa main dans la mienne. Les larmes coulent devant ce spectacle de trop, et je prie en silence qu’aucun organe vital ne soit touché. « Qu'attendez-vous ?! Ne restez-pas là ! » hurle Elis à l’attention du flûtiste. Mais chacun sait qu’il est coincé et que les deux hommes n’auront pas la force de soulever cet énorme pan de mur qui lui broie la jambe. Je suis la seule à même de faire quelque chose et consciente du risque que je prends. Mais quelle autre alternative ai-je ? Je ne peux décemment pas regarder mon filleul mourir sous mes yeux. Je suis née pour le guider et le protéger au détriment de ma propre vie. J’utilise le peu de force qu’il me reste pour me relever. Les yeux grands ouverts, humides, je tends mes bras et dégage toute la poussière de fée qu’il me reste pour faire flotter le mur qui se lève peu à peu et vole quelques secondes avant d’aller s’écraser plus loin. À l’instant même où il atterrit avec grand fracas, mes dernières forces m’abandonnent et je sens mon corps me lâcher avant de plonger dans un sommeil de plomb. La magie a un prix, et les coupables le paieront cher.

Les catacombes

tiger! tiger! burning bright in the forest of the night

« Je parie que ce n'était pas du tout ce que tu avais prévu, n'est-ce pas ? » Non. Je n’ai jamais voulu en arriver là. Il n’était pas question de blesser des innocents et détruire des vies. Comment savoir, au vu de cette affliction, s’il y a des assassinés ? Ce n’est pas l’image que je voulais donner aux Lames de Cendres. Malgré moi, c’est pourtant cette pancarte que j’ai posée sur chacun de ses membres, dont aucun n’était conscient du plan que dont j’avais idée. J’ai engagé cette guerre seul. Mes initiés sont aussi innocents que les invités de ce bal. Je suis le seul coupable, et j’en porte la responsabilité. Comment, comment cela a-t-il pu déborder ? Est-ce que Merlin a omis de préciser à quel point les dégâts seraient phénoménaux, sénile comme il est, ou a-t-il menti en connaissance de cause ? Ou bien est-ce les catacombes qui n’étaient pas assez solides pour amortir les dégâts ? Y’a-t-il d’autres excuses que je peux me trouver ? Non, le seul coupable, c’est moi. Le royaume ne sera plus jamais le même après ça, mais je n’ai aucune certitude que les répercussions seront celles que nous attendons depuis si longtemps. Je ne suis pas fait pour diriger. J’étais un meilleur élément quand je n’étais que le valet de l’ogre. Leader, je ne fais que des erreurs. Ce n’est pas ma place. Je n’ai jamais voulu en arriver là, mais maintenant que j’y suis, je ne peux pas faire marche arrière. Abandonner, jamais.

Des rebelles s’attèlent déjà à notre quête et partent en direction opposées, se séparent les tâches entre gardes et nobles à attraper. Je vois le grand blond courir en direction du prince. Mais j’aperçois d’autres rebelles qui courent vers des blessés. Les tripes nouées, j’assiste à ce spectacle désolant en comprenant que des proches de mes initiés sont présents, et en mauvais état. C’est alors que je réalise, comme une lame s’insinuant lentement dans mon palpitant, doucereusement en prenant son temps vicieusement. Gretel. L’arroseur arrosé qui subit le contre-coup de ses actes, voilà à quoi je suis rendu. Son grand buffet est retourné, et c’est un coup de massue qui glisse jusque dans ma gorge quand je vois son corps de l’autre côté, évanoui. « Vas-y, je te rattrape. » dis-je à Olga qui ne se fait pas prier, avant de prendre appui sur le buffet pour passer par dessus et m’agenouiller aux côtés de ma belle. Qu’ai-je fait ? Elle semble paisible, les yeux clos, ne pouvant sentir la douleur que doit lui asséner son bras blessé. Je ne regarde ni la Lame brune ni le garçon qui sont autour d’elle et mord un pan de ma chemise pour l’arracher aux coutures. Son sang s’égoutte et glisse le long de mes doigts. J’en suis le responsable. J’enroule le tissu autour de la plaie de Gretel pour créer un garrot et la porte sur mes épaules humaines, capables de soulever ce qu’il me serait impossible en réalité. Je sors du château pour poser Gretel dans un taxi calèche et agrippe les épaules du brun. « J’ai besoin de Mulan, tu peux l’emmener seul ? Mettez vous en sécurité à son magasin, je viendrai dès que possible. » Je n’attends pas sa réponse et file à l’intérieur, en direction d'Olga. Plus j'avance, plus mon corps s'alourdit et le temps ralentit. J'ai beau regarder autour de moi, chercher celle qui était la réelle cible de tout ça, je ne la vois pas. Disparue. Je ne vois que douleur et affliction et le coupable, c'est moi.

Bal de Snowel

What should have been a wonderful night became a nightmare

Elle ne se réveillait pas. Bon sang, est-ce qu’on prenait le risque de la déplacer alors qu’elle était encore inconsciente ? Ce n’était pas une bonne idée, mais après, qu’est-ce que j’y connaissais ? Rien, je n’étais pas médecin, je n’étais pas un combattant, je n’étais même pas un foutu confiseur qui pourrait être digne du travail acharné que cette femme faisait ! Je n’étais qu’un saltimbanque, et encore, un de ceux qui savent faire un peu de tout mais rien de concret. Je n’étais qu’un petit vendeur, voilà ce que j’étais ; un simple vendeur inutile en cet instant. Je n’étais pas du genre à me lamenter sur mon sort habituellement mais LA, il faut dire que vu la situation, j’avais bien le droit de chouiner un peu. Surtout que  ça restait dans ma tête donc personne n’avait à le savoir au final.

Je tentais toujours de réveiller Gretel quand Potté arriva près de nous. Potté, celui qui avait mené cette révolution, qui avait forcément une part dans cette catastrophe. Non ? Ou bien mon esprit était bien trop embrouillé pour faire la part des choses correctement. En attendant, il n’eut même pas l’air de prendre ne compte notre présence à Mulan et moi et si il n’était pas en train de s’occuper de Gretel en faisant une chose plus que logique et nécessaire, à savoir un garrot correcte, je pense que je lui aurais fait comprendre sa douleur. Mais pas maintenant, pas ici ; je lui dirais ma façon de penser quand on aurait tous pu récupérer, qu’on aurait pansé nos blessures chacun dans nos coins, et qu’on penserait – presque – correctement. En attendant il continua de nous ignorer et prit Gretel sur ses épaules pour la faire sortir et la déposer dans un taxi-calèche. Encore une belle preuve de mon inutilité dans la situation actuelle. J’ai hésité à le laisser partir seul pour chercher Vassilissa, mais finalement j’ai suivi au pas de course. Pour m’entendre donner des ordres. Non mais pour qui  il se prenait ? Okay, peut-être pour le leader des Rebelles dont, malgré les apparences, je faisais encore partie aux dernières nouvelles. Donc au final, ce n’était pas si surprenant. Mais il n’empêche que j’ai eu envie de me révolter à cette initiative, comme si nous n’étions que des pions qu’il pouvait utiliser à sa guise. J’admets que pour le coup je devais être d’une mauvaise foi crasse, mais tant pis.

J’aurais pu lui dire non, l’envoyer se faire voir ailleurs chez les Yasenien ce que j’en savais, cependant je me tus et hocha la tête alors qu’il était déjà reparti pour je ne sais pas où, emmenant Mulan avec lui dans le processus. A plus mec, on se capte on se fait une bouffe ! Sérieux…Bon bin…J’ai plus qu’à aller à la boutique…Je regrettais de ne pouvoir rester plus longtemps afin de chercher Vassilissa, vraiment, mais les blessés avant tout. Je savais déjà qu’elle allait me faire sentir son désagrément, mais tant pis. Je pris les rênes du taxi-calèche et partis en direction de Romeo Drive, vers la boutique de Gretel. Arrivé là, j’allais préparer la table de la confiserie (comprendre : y installer une nappe et quelque chose qui soit suffisamment confortable pour l’y déposer en attendant qu’elle se réveille) avant de la transporter sur la dite table. De là…Je n’avais plus qu’à attendre.

Bon sang, durant cette attente j’ai eu tellement envie de frapper ou fracasser quelque chose, n’importe quoi, de hurler…Mais je ne fis rien, ne voulant pas détériorer la boutique. Mais bon sang ce que je pouvais me sentir idiot et potiche comme ça…

Bal de Snowel

Souris, une soirée ne dure pas si longtemps

Du bruit, des bourdonnements, des éclairs de lumière. J'entends mon cœur battre dans mes oreilles et ma respiration résonner dans ma cage thoracique. Ma tête me fait mal, mon bras encore plus. Je ne sais pas du tout qui je suis, ni où je suis. Je sais que j'ai froid, je sais que j'ai mal, je crois aussi que j'ai peur. Pour moi ? Non, ma vie n'a aucune importance. Pour qui alors ? Pour les innocents. Je mérite de ne plus être debout, je mérite d'avoir mal, je mérite d'avoir peur et je mérite aussi de mourir. Si on devait souffrir un milliard de fois pour toutes les vies que l'on a prises, alors je mérite plus qu'à mon tour de ne plus être. Je sais que je suis allongée dans la poussière, je sais que je gît sur le sol froid, je sais que je ne fais plus qu'un avec les débris. Et c'est ce que je mérite.

Ma vision est trouble, mais je me réveille peu à peu. J'ai mal, j'ai chaud, tout n'est que tornade de lumières et de couleurs, et je ne sens plus mon bras. Je sais que quelque chose me l'enserre, je sais que pendant quelques instants j'étais soulevée de terre, je sais que j'ai changé de place. Je sais que j'ai entendu des voix, et que ces voix m'ont percées le coeur de déchirement. Un ennemi, un ami, un ancien amour ? Je ne saurai le dire. Je n'ai aucune idée de qui je suis, je n'ai aucune idée de l'endroit où je me trouve. J'ai mal, j'ai peur, je ne suis qu'un lambeau de chair desséchée qui ne rime plus à rien. J'ai perdu mon identité, ma contenance, tout ce qui faisait de moi ce que j'étais.
Mais tu as mérité tout cela, Gretel.

« Gretel ! De l'aide, s'il vous plaît ! »
Gretel ? Oui, ça me dit quelque chose... Une voix de femme, une voix familière, celle de quelqu'un que j'apprécie beaucoup vient de crier à l'aide. Mais pourquoi ? Pourquoi je connais cette voix ? Pourquoi autant de détresse ? Je ne sais pas si je vois correctement, mais une cascade de cheveux aussi noirs que l'ébène me tombent dessus très rapidement, et je sens que l'on me touche, que l'on me regarde. Un visage de femme, un visage de femme très gracieux mais étonnement dur, déformé, déchiré ? Des yeux en amande autrefois si rieurs, si doux, aujourd'hui ils ne reflètent que l'inquiétude, quelque chose de désespéré, mais pourquoi ? Pour moi ? Pour... Gretel ?

Gretel, c'était moi, c'était celle que j'étais. Maintenant, que suis-je ?  Un débris. J'ai laissé tout ce que je suis sur le sol de la salle de bal, jonché de tout et de n'importe qui. Mais je n'entends plus les cris, je n'entends plus le bruit, rien d'autre qu'un froissement de tissu nerveux près de moi. Je sens que l'on me fixe, je sens que l'on aimerait faire autre chose que rester près de moi. Je sens que l'on n'est pas à sa place.

J'essaye de dissimuler ce "on" qui me tient compagnie, et je parviens à distinguer entre mes cils le visage autrefois si rieur de mon collègue, Alexei. Il n'est plus qu'inquiétude et stress, et il ne tient pas en place. Je suis allongée sur la table de ma boutique, ma robe en lambeaux, mon bras qui me lance avec un tissu poisseux qui me l'enserre. Rouge ? Non, avant il était blanc. Maintenant il est rouge. Rouge de mon sang ? J'ai mal. J'essaye de me relever sur mes coudes, mais ils se dérobent sous mon poids. Je mets cinq bonnes minutes à m'asseoir, et la tête me tourne affreusement. De l'écorce de saule blanc... Si seulement j'en avais sur moi ! mais comment je me souviens de tout ça moi ? Alexei... Alexei est toujours là.

Et cette voix, cette voix féminine dans ma tête, celle qui appelait à l'aide, qui appelait pour moi... Mulan, ma belle et consciencieuse Mulan, elle qui était penchée sur moi entre les monceaux dévastés de l'architecture chancelante, celle qui essayait de m'aider. Mais où est-elle maintenant ? Est-ce qu'elle a seulement réussi à se sauver ? A se mettre en sécurité, à échafauder un plan pour que l'on ne la condamne pas pour traîtrise elle aussi... Ma Mulan, une rebelle ? Est-ce que cela lui ressemble ? Elle n'est pas une femme du peuple qui attend que les hommes reviennent de la guerre en ne cherchant que très peu à avoir des nouvelles du front. Non, elle est la franche, la directe demoiselle de Saay, celle qui fonce tête baissée mais pas sans réfléchir. Elle est sauve, il ne peut en être autrement. Elle est forcément en sécurité.

"Alexei... Comment on est arrivés jusqu'ici ? Et où est Mulan ?" Son visage est tordu par l'inquiétude, et j'ignore si c'est à cause de moi ou de la jeune femme qui est venue avec lui au bal. "Ta cavalière, comment va-t-elle ? Elle n'a rien ? Tu devrais aller la rejoindre, t'occuper d'elle..."
Un lancement absolument affreux me coupe dans mon discours. Bon sang ! Je ne sais absolument pas ce qui se trouve sous ce pan de tissu, mais ça me fait tellement mal que je hurle alors que j'essayais de bouger mon bras. Nom d'un macaron, ce n'est pas possible... Et si je perdais l'usage de mon bras ? Comment je ferai pour tenir encore ma boutique ? Et mon arc ? Et ma tête qui n'arrête pas de tourner...

Et si l'on devait m'amputer, qu'est-ce que je dirais à Hansel ? A Potté ? Sont-ils seulement au courant que j'étais là, pendant l'attaque des rebelles ? Bien sûr que non, pourquoi s'occuperaient-ils de toi ? Les rêves de grandeur des uns et des autres se concrétisent, pendant que moi je meurs dans l'ombre. Tu étais destinée à cela, Gretel. Tu es celle qui se sacrifie pour la réussite de ceux que tu aimes.

"Alexei, je vais bien, d'accord ? Alors retourne chez toi, et regarde si ta logeuse va bien. C'était elle, n'est-ce pas, à ton bras ? Si tu es inquiet pour elle, alors tu ne dois pas la laisser seule. Moi, je vais me débrouiller, j'ai déjà connu pire."
C'était entièrement faux. Des blessures, j'en ai eu durant mes chasses aux sorcières. Mais jamais d'aussi importantes. Je n'ai jamais eu aussi mal de toute ma vie, du moins pas physiquement.

J'ai chaud, j'ai de plus en plus chaud, et des gouttes de sueur coulent sur mon front. De la fièvre maintenant ? Oh non, c'est plus grave que ce que je pensais... Il faut que je trouve de l'alcool, quelque chose pour me désinfecter, et rapidement...
Mais tout tourne de plus belle, et je ne peux faire autrement que me rallonger sur la table, en espérant que cela va calmer un peu la fièvre. Heureusement, il n'y a qu'Alexei avec moi. Je prie pour que Potté n'apprenne rien de ce qui m'est arrivé. Je ne veux pas le voir débarquer avec la bouche en coeur pour me seriner une centième fois "Je te l'avais bien dit". Non Potté, je t'en prie, je t'en supplie, sauve toi vite, et sauve toi loin. Et pourtant, que donnerais-tu pour qu'il soit près de toi, à cet instant ? TOUT.
La fièvre me ravage pour de bon, mais j'ai encore toute ma conscience. Bientôt, je serai sous son contrôle et je commencerai à perdre la tête... Je ne pourrais rien faire contre cela. Je suis trop faible pour tenter quoi que ce soit pour me soigner. Et la frustration que cela engendre de savoir que l'on est totalement conscient qu'il faut agir vite, et pourtant on est totalement impuissants. Bonjour la crédibilité. Maintenant Alexei ne me croira plus, c'est sûr... Pourtant, s'il est arrivé quelque chose à son amie parce qu'il n'était pas là pour la protéger à cause de moi, jamais je ne me le pardonnerai...