Il est né ici, pas très loin, dans les contrées de Fort fort lointain. Son berceau était en forme de bateau et son père a le culot de lui reprocher aujourd'hui de vouloir partir naviguer. Franchement. Lorcan a eu, comme tous les enfant du monde, deux parents. Deux charmantes personnes, le père, Sami le constructeur de navires et sa ravissante mère Isabella, guérisseuse de profession, mère poule de cœur. Et aussi une tripotée de frères ; quatre aînés tous plus railleurs les uns que les autres ; Nathan, William, Toki et Pickles. De quoi vous forger un homme. Parce que Lorcan vous l'expliquera mieux moi ; devoir survivre à quatre boucs (mais sympas tout de même), y a de quoi vous tremper un sacré caractère. Mais, même si quatre frères insupportables ce n'est pas toujours facile, il n'en reste pas moins qu'il en a tiré de nombreux profits ; par exemple, Pickles, le plus jeune, était de la famille la plus fine lame. Et le meilleur professeur. A vrai dire, de tous ces frangins, c'est de lui dont Lorcan a été le plus proche durant toute son enfance et son adolescence.

En plus de quatre énergumènes (mais sympas tout de même), Lorcan a vécu avec autour de lui de nombreux numéros très spéciaux ; des marins, des pirates et des chiens à trois pattes. Tous se baladaient joyeusement sur le port, rencontrant le gamin et ensuite le jeune homme au détour des bateaux. Sa grande passion. Dans les yeux du blond s'est toujours reflété l'amour inconditionnel qu'il voue à la mer depuis ses premiers jours. Son grand amour. Mais toujours Sami lui a rappelé qu'il n'était que le lien entre terre et mer, ce qui liait les hommes à leurs racines, ce qui les emportaient sur les flots. Pas de grand rêve d'aventure permis pour le gamin, juste un peu d'espoir et une imagination fertile qui lui fera revivre les épopées fantastiques que lui content ses diverses rencontres.

Coincé dans un port à colmater les brèches des navires malmenés par les éléments, les pirates et les mauvais capitaines ou à donner naissances à de nouveaux vaisseaux prêts à affronter l'océan, Lorcan continuait de rêvasser, son désir de parcourir les mers brûlant toujours son cœur de marin. Mais il était hors de question pour Sami de laisser le dernier de ses gamins filer ; après quatre essais nuls, il était désormais inconcevable d'abandonner, au risque de perdre l'affaire familiale. Alors, au détriment des grands rêves du blond, le père le convint de rester sur Terre, dans tous les sens du terme.

L'amour familiale et le manque d'occasion gardèrent le jeune homme sur les rives durant quelques années. Sami, certain que son fils allait suivre la voie qu'il lui indiquait, ne remarqua pas de suite le danger potentiel que représentait Sinbad Septmers. S'il avait su, sans doute aurait-il remballé ce marin légendaire, au risque de passer à côté d'un chantier tel que le sien. Trois ans de travaux en tout, de quoi rapprocher le capitaine et le gamin. Sami le remarqua trop tard mais vu d'un mauvais œil la relation s'installant entre eux. Et il eut bien raison de se méfier.

L'Ecorchée était sans doute l'un des plus imposants chantiers du blond. Le voir finit l'avait à la fois couvert de fierté et causé un petit pincement au cœur. Kale et Sinbad allaient partir et lui, retournerait à son petit port, à écouter les poissonniers, les marins, les pirates, les chiens à trois pattes. Enfin, c'était dans un premier lieu, ce dont il s'était persuadé. Mais Lorcan, dans un élan de courage, de fougue et de rêverie, osa demander ce dont ses lèvres brûlaient depuis tout ce temps déjà ; rejoindre un équipage. Et pas n'importe lequel, non ! Celui de Sinbad Septmers, mesdames, messieurs, nul autre. Ses compétences et le manque de ressources humaines le firent engagé sur le champ. Le premier nouveau matelot d'une belle et grande famille.

Ce fut un peu un drame familial qu'annoncer son départ. Lorcan se souvient du déchirement perceptible qu'il y eut à cet instant entre son père et lui-même. Il en fut navré, dut retenir quelques larmes amères d'inonder ses joues. Il était un peu jaloux, c'est vrai, de ses quatre frères ayant pu choisir leur voie. Il ne voyait pas pourquoi, lui, n'avait pas droit à cette chance également. C'est cette pensée qui l'a encouragé à poursuivre son rêve ultime ; épouser, enfin, son amour de toujours, l'océan. Mais personne, dans sa famille, n'a réussi à comprendre son départ. Ainsi, depuis ce jour, il les évite, se contentant d'une visite de courtoisie quand le navire accoste.

Et voilà, six ans que Lorcan s'est engagé dans la fine équipe de Sinbad. Pouvoir voguer sur un navire construit de ses mains, ça, c'est carrément la classe. Et c'est bien pratique pour savoir comment le réparer ; c'est la principale occupation de Lorcan en tant que charpentier du rafiot. Il est aussi le mécanicien et un matelot fichtrement impliqué. Entre les chants qu'il lance sur le pont, les combats qu'il engage et les coups de main qu'il donne partout, c'est un gars qu'on ne regrette pas. Et puis, y a pas dire, lui de son côté, il kiffe bien les voyages de l'Ecorchée, même s'ils ne durent jamais beaucoup plus d'une semaine et demi. Au début, c'était assez tranquille, de simples petites livraisons. Et puis les caisses à charger ont changé, les quelques missions extras se sont multipliées. De quoi entraîner à la course - la fuite - les quelques hommes embarqués dans ce genre de plans foireux. Et Dieu, ce que Lorcan kiffe ça. L'aventure de toute une vie, celle dont il rêvait depuis toujours.

Des gars, Lorcan, il en a vu passer de toutes les couleurs sur le pont du rafiot, c'est vrai. Mais récemment, y a ce type qui a débarqué, le genre de mec qu'on retrouve facilement mort après deux jours, sans savoir vraiment ce qu'il a été foutre - avant de découvrir qu'il s'est empalé avec sa propre épée. De quoi (gentiment) se moquer. Mais parce que le blond n'est pas mauvais bougre, il a aussi aidé ce gars ; Hansel qu'il s'appelle. Et du simple pauvre mec qu'on a accepté de prendre sur le navire, il est passé rapidement au pote et puis au complice parfait. De quoi rendre encore plus agréable cette vie de rêve aux yeux du mécanicien. Seuls les tristes derniers événements ayant agité Fort Fort lointain ombragent le tableau de son existence. S'il n'est pas complètement engagé dans la lutte contre Marraine la Bonne Fée, il n'en reste pas moins qu'il peste régulièrement contre elle. A la moindre occasion qu'on lui donnera pour lui mettre des bâtons dans les roues, il foncera.