Comme tout enfant né avant elle, Raiponce fut conçue un jour particulier. Cela aurait pu être un jour de fête grisante, un moment romantique entre adultes consentants mais... Non, la roue du destin en décida autrement.

Il était une fois, comme toute bonne histoire commença, un homme et une femme qui désiraient avoir un enfant -comme beaucoup me direz-vous-. Ce couple habitait à la frontière d'un désert, à côté d'un mur haut comme le ciel, mais pas plus haut qu'un arbrisseau. Un arbrisseau qui protégeait un jardin somptueux où mille et une merveilles poussaient. Un jardin de sorcière.

Et ce fut cette même sorcière, qui fut maitre de la naissance de la jeune femme.

Un jour, sa chère mère vint à regarder par la fenêtre qui donnait sur ce même jardin. Pourquoi cela ? L'ennui peut-être, qui sait. Dans tous les cas, aussitôt vu aussitôt fait, sa chère génitrice  fut prise d'une irrésistible, et surtout stupide envie de dévorer les Raiponces qu'elle pouvait apercevoir depuis sa maison. Mais elle ne pouvait n'est-ce pas ? Qui aurait envie d'affronter le courroux d'une sorcière pour d'insignifiantes Raiponces ? ... Son père.

Son cheeeeeer paternel, qui, voyant lentement dépérir sa tendre épouse, prit de risques considérables. Et s'il ramena avec succès cette plante à sa femme, le lendemain, elle en réclamait le double ! Plus les jours passaient et plus la paysanne en quémandait. Au point qu'un jour, monsieur se fit attraper ! Même, il tomba sur la sorcière au sens propre du terme ! Et manqua de faire un infarctus au passage face à l'hideuse laideur de la créature…. Enfin ! Afin d’être épargné, afin de pouvoir rapporter à la Dame de ses pensées ces chères Raiponce, il dut sacrifier l'enfant qui viendrait à naître dans les mois qui suivraient, et le fit sans la moindre once de réflexion…

Une petite enfant si vite arrachée à sa famille à peine née. Ce n'était pas une grande perte de toute façon ! Au lieu d'être élevée en paysanne, la petite sauvageonne butée que fut la fillette durant ses premières années de vie reçut bien rapidement l'éducation d'une grande Lady. Un gain considérable, pour la jolie jeune fille qu'elle était ! Bien loin d'être un gâchis ! Même si une seule chose manquait cruellement à l'adolescente au caractère si particulier : un ami. Quelqu'un avec qui discuter joyeusement de tout et de rien ! A la place de faire un monologue à ses chers livres qui lui tenaient compagnie dans sa prison d'ivoire... Enfin, elle avait du ménage à faire pour passer le temps, et des cours d'auto-défense, via un livre datant du dernier millénaire mais bon...

Ah oui ! Et ses cheveux ! ... Vous ai-je déjà parlé de ses cheveux ? De sa natte dorée aussi longue qu'un cours d'eau, plus résistante qu'une corde et plus horripilante que tout pour se déplacer ? Car oui, c'était au moyen de cette longue chevelure, que la vieille mère pénétrait dans la tour aussi haute que le ciel, en criant quelque chose qui ressemblait vaguement à :

« Raiponce sale gamine bouge-toi les fesses et balance-moi l'échelle!! »

.... Ou du moins quelque chose de plus raffiné, ma mémoire n'étant plus ce qu'elle était.

Jusqu'au jour où ce ne fut pas l'ancêtre, mais un parfait inconnu qui fit irruption dans la tour. Un prince qui avait été charmé par la douce voix de la captive -avait-il des soucis d'ouïe?- et qui, se cachant en apercevant la sorcière arriver, l'avait observé faire. Pour tout dire, la seule raison de sa présence ici était qu'il avait décidé d'en faire sa femme, et qu’il était bien plus sûr de son choix après l'avoir vue !

Elle qui ne connaissait rien au monde... accepta ? ... Oui oui. Et pour un seul motif : se barrer de ce trou perdu !

Mais pour pouvoir elle-même descendre, il lui fallait une corde non ? Une mission périlleuse pour le vaillant -et stupide disons-le clairement- prince ! Aussi cet accord scella leur promesse de fiançailles. Si évidemment, Raiponce, étourdie comme elle était, n'avait pas fait une bourde.

« Pourquoi êtes-vous si lourde ma bonne mère ? Le prince n'est que poids plume en comparaison ! »

... Idiote.

Ni une ni deux fissa, la marâtre qui désirait garder sa bonne pour elle toute seule, lui coupa sa tresse, ne laissant que lambeaux de son si bel atout et envoya la jeune fille faire un séjour au fin fond du désert, dans un charmant couvent affectueusement nommé « Fin du monde » !

Le prince ? Berné par le piège de la sorcière qui avait attaché à la fenêtre de la tour la tresse de sa protégée, nul ne sait ce qu'il advint de lui. Ni ce qu’il advint de la vieille dame par ailleurs.

Quant à notre chère Raiponce... Avouons-le ! Passer près de vingt ans dans une tour en solitaire avec pour seule compagnie des bouquins et sa propre conscience, -ainsi qu'occasionnellement une femme puant la vieillesse-, cette situation avait suffisamment mis sa patience en mode veille ! Alors finir sa vie dans un couvent perdu au fin fond du trou du cul du monde alors qu'il y avait tant à visiter, à découvrir, mille et un voyage et une VIE -parce qu'être cloîtrée chez soi ce n'était pas une vie- qui l'attendaient dehors, merci mais non merci !

Ni une ni deux, bonjour et au revoir, qu'elle soit fiancée ou non, et encore, pourquoi ressentirait-elle quelque chose pour un parfait inconnu -qu'elle avait vu quoi... dix fois ?-, elle n'attendit pas vraiment ce dernier pour venir la libérer et se tirer de là ! Après être passée par la case « retrait d'argent » dans un des coffres-forts. Elle avait lu cela dans un livre de survie, une fois, il n’y avait... pas si longtemps que ça en fait.

Aujourd'hui, et par une série de coups de chance -les cours de défense lui ayant servis finalement-, notre petite jeune femme blonde débarqua à Fort Fort Lointain. Certes l'accueil ne fut pas des plus chaleureux vu qu'elle se mangea aimablement, et avec tout l'élégance du monde, le sol grâce à un pauvre abruti !

Sa fonction ? Quelle question voyons ! Avec un tel don, il ne lui fallut pas bien longtemps, avant de trouver sa place dans un salon de coiffure ! Même si, avec son éducation, Raiponce pourrait viser bien plus haut~