Baptiste & Adélaïde

sacré mistigris !

La journée au salon était très calme, il faut dire que les climats de tension, c’est mauvais pour les affaires. J’ne sais quelque chose. Mais vu qu’il y a peu de travail avec les aiguilles, j’en profite pour m’avancer un peu sur des commandes de dessins pour de prochains tatouages que je vais faire faire au petit Leféroce. Eh oui, on ne dirait pas comme ça, mais j’ai écopé de former le fils d’un…je ne sais pas si on peut vraiment parler d’ami entre nous, mais disons d’un allié, le jeune Antoine. Ce petit a du talent et du sang-froid, deux choses très utiles et même nécessaire dans un métier comme tatoueur. Bon, il est doué avec les machines, mais pour tout ce qui est du dessin, il a encore de gros progrès à faire. Recopier les lignes pré-tracées par votre serviteur est déjà très bien et je mentirais si son aide n’était pas la bienvenue. Car s’il y a des journées très calmes, comme aujourd’hui, il y en a de bien moins calmes où avoir une autre paire de mains pour tatouer ou même simplement gérer l’accueil est bien utile. Hey, certains clients me demandent spécifiquement, qu’y puis-je si j’ai du succès ? Probablement qu’ils courraient dans l’autre direction si jamais ils apprenaient ma véritable nature ou peut-être même simplement l’état réel de mon œil gauche, mais comme on dit, bénis soient les ignorants.

Ce soir j’ai laissé les autres partir avant, ce qui me permet de ranger et fermer le salon comme je l’entends et c’est très bien ainsi. J’aime ces moments, quand la nuit tombe, que la seule compagnie et les seuls bruits sont ceux du vent qui s’engouffre dans l’endroit par les fenêtres mal fermées. J’aime prendre mon temps pour fermer boutique. Ce qui fait que lorsque je sors de F.A. Ink pour me diriger chez moi, il est déjà relativement tard. Mais je m’en fiche, ce n’est pas comme si quelqu’un m’attendait chez moi…

Et pourtant. Enfin, ce n’est pas exactement quelqu’un, mais quand j’ouvre ma porte, je sens quelque chose me frôler la jambe et je sursaute, ne m’y attendant pas. Allumant une lampe se trouvant près de la porte, je vois qu’il s’agit d’un chat noir. Je pousse un soupir, mais il n’est ni agacé, ni las. Plus amusé. Ces chats. J’ai beau de pas vouloir en posséder un moi-même (trop d’entretien et je ne sais pas si ça ne serait pas un peu cruel pour la petite bête d’en mettre une entre mes mains), ceux du coin ont tendance à venir squatter chez moi de temps en temps. La plupart sont des chats des rues, dont personne ne veut et je leur donne un peu de nourriture avant de les laisser repartir faire leur vie. D’autres, comme celui qui inspecte ma petite maison, sont des chats d’intérieurs, de ceux qui sont aimés et choyés par une maître ou une maitresse bien précis(e), mais qui venaient quand même me voir. Est-ce que j’émanais autant de solitude que même des êtres aussi indépendants que les chats décident de venir me sauver de cette dernière ? Je n’en sais rien, en revanche, je sais que je vais avoir de la compagnie ce soir.

Cependant, je ne m’attendais pas à ce que ce soit une autre compagnie que le chat en question. Ça faisait une petite heure que j’étais chez moi, j’avais effacé le sortilège qui cache mon œil, j’avais une tasse de thé fumante à mes côté et je lisais tranquillement, le chat sur les genoux, que je caressais d’une main distraite. Soudain, il se leva, et alla vers la porte, miaulant pour que je lui ouvre. Je me lève, posant mon livre, et va lui ouvrir. C’est alors que j’entends une voix de femme qui appelle un Mistigris. Je sors de chez moi, restant sur le palier, et observe le chat se jeter dans les bras d’une jeune femme. Je la connais d’ailleurs, je lui ai fait quelques tatouages.

"Alors c’est à vous que ce chat appartient, Mademoiselle Delaverrue. Il s’est faufilé chez moi un peu plus tôt. Mais il a dû vous entendre arriver, il voulait absolument sortir."

Je croisais les bras, m’appuyant contre le cadre de ma porte.

   

Baptiste & Adélaïde

sacré mistigris !

Adélaïde semble heureuse de retrouver son chat et je peux très bien le comprendre. Je les observe un instant, avant de détourner le regard. Ca peut paraître puéril, mais depuis ma débâcle avec Emeline, j’ai du mal à voir du bonheur autour de moi. La plupart du temps j’ignore royalement toutes ces démonstrations d’affections, mais parfois, certaines sont difficiles à ignorer. Si seulement je n’avais pas peur de griller ma nature, je me ferais une joie de jouer un tour à ceux qui se bécotent en pleine rue. Ne serait-ce que pour l’indécence de la chose. Pourtant je ne fais rien et ce n’est pas plus mal. Parfois je me raisonne simplement en me disant que je ne veux pas être comme celle qui m’a tout pris, je ne veux pas, encore, briser le bonheur des autres, mais je sais bien que c’est surtout par lâcheté que je ne fais rien. Je hausse les épaules quand elle me remercie.

"Ce n’est rien. J’ai l’habitude que les chats du quartier viennent me voir sans raison. Je ne refuse jamais l’entrée de ma maison à un chat." Je l’observe papouiller son chat encore un instant avant de me redresser, m’adressant de nouveau à elle "Est-ce que vous voulez entrer un instant ? Histoire de vous reposer avant de repartir chez vous. Je ne sais pas depuis combien de temps vous arpentez la ville pour le retrouver mais, surtout après une journée de travail, une pause vous fera sans doute du bien. Non ?"

Offrant un sourire en coin à la jeune femme devant moi, je me dirigeai ensuite dans ma petite maison dans Ragtown, laissant la porte d’entrée ouverte derrière moi. Je ne fis même pas attention au livre trainant sur le canapé, ni même au léger bazar (des dessins divers et variés) qui régnait dans mon salon. Après tout, je n’avais pas prévu de recevoir quelqu’un chez moi ce soir. Mais il faut croire que la solitude m’atteint bien plus que je ne voudrais bien l’avouer, vu que j’en venais à inviter une ancienne cliente chez moi après lui avoir rendu son chat. Allant directement à la cuisine, je sortis les deux boîtes de thé.

"Plutôt thé vert ou thé noir ?"

HRP: