Kaa & Wolfran

And it crushed my heart
A travers les rues inhabituellement silencieuses de Fort Fort Lointain, on pouvait apercevoir une silhouette, solitaire, courir. Elle courait vite, mais ce n’était pas une fuite. Ses pas étaient bien trop décidés et bien trop vifs et certains pour que ce soit une fuite dans la panique. Pourtant, la panique était belle et bien présente dans le cœur de Wolfran, l’apothicaire. Mais pour la comprendre, il faut reprendre les évènements depuis le début.

La nuit était tombée depuis plusieurs heures, et le sorcier lisait tranquillement dans son petit salon, une tasse de thé fumante sur sa table basse. Puis il entendit du bruit dans la rue. Au départ, il ne s’inquiéta pas ; du bruit, le soir tard dans Ragtown, c’était habituel. En revanche, autant de bruit, un peu plus tard, avec des cris, des bruits de ruades…Il haussa un sourcil, déposa son livre sur la table basse et alla à sa fenêtre, l’ouvrant pour mieux y voir. Il héla un des badauds passant par-là et on lui intima de descendre, ils avaient besoin de tous les guérisseurs et apothicaires possibles au château, il y avait eu une explosion. Wolfran ne réfléchit pas plus longtemps et fila dans sa boutique, prenant sa valisette quand il faisait des visites à domiciles à l’époque de ses nombreux voyages, et emporta autant de produits semblant utiles qu’il le pouvait. Baume anesthésiant, alcool à désinfecter, bandages, onguent contre les brûlures, attèles…Bref, tout ce qu’il pouvait trouver d’utile et fila en direction du château. Il se fit même prendre en stop par une calèche qui y amenait déjà des sorcières blanches.

Une fois sur place, le chaos total. Le château était fumant alors que les gens tentaient de contenir le feu qui menaçait de se propager. Des blessés étaient éparpillés tout autour dans la cour du château, et déjà de nombreux et nombreuses guérisseur(ses) étaient présent, tentant de trier les blessé par ordre d’importance d’état. Wolfran alla voir une personne qui avait tout l’air du chef par intérim et se fit envoyer à divers patients. Il s’en occupa comme il pouvait, stabilisant leur état afin qu’ils puissent attendre les soins plus poussés que prodiguaient les Sorciers. Il travailla sans relâche, déterminé à ne pas perdre une seule vie ce soir, il en était hors de question. Durant des heures ce fut une cadence infernale, colorée de rouge sang. Celui des blessés qui teintait ses mains, sa tunique, à mesure qu’il travaillait. Puis ce fut l’accalmie et l’apothicaire put souffler un instant, pour se le voir couper net par une pensée. Une seule, toute simple, toute petite, un nom : Kaa. Est-ce qu’il était au bal ? Est-ce qu’il avait été blessé ? Ou…Pire ? Cette simple pensée le paniqua plus que de voir tous ces blessés. La plupart avaient été emmenés, plus loin. Il aurait pu vérifier sur place, en passant à travers les rangs de gens qui ont été soignés, et en avoir le cœur net. Pourtant, ce qu’il fit fut tout autre : il se leva et se mit à courir vers la ville, en direction de Romeo Drive.

S’il n’était pas chez lui, alors le sorcier tenterait à la Sirène Amputée, mais il voulait repousser au maximum la nouvelle si jamais…Il ne pouvait même plus le penser. Ayant vu ce que cet incident avait provoqué sur les autres visiteurs, il ne peut imaginer cela arriver à Kaa, pas à lui. Alors il court, à perdre haleine, repoussant ses limites. La fatigue n’est tenue à l’écart que grâce à l’adrénaline que sa panique interne provoquait, et rien d’autre. Il arrive, enfin, à Romeo Drive, prend le chemin du numéro douze et sonne, toque, fait en sorte que même endormi l’autre l’entende s’il est là. Les quelques secondes qui séparent ce moment de l’ouverture sont les pires de sa vie, alors qu’il croit l’impensable. Puis la porte s’ouvre, comme impossiblement, sur Kaa, et Wolfran ne réfléchit pas, il se jette à son cou, le serrant contre lui avec toute la force qu’il peut convoquer à cet instant, et murmure dans un soupir de pur soulagement.

"Merci Merlin tu vas bien…"

Et il reste ainsi, s’assurant que oui, il est bien là, qu’il ne va pas s’évaporer dans les prochaines secondes, minutes ou même heures. Se rassurant qu’il va vraiment bien, qu’il n’était pas à ce maudit bal qui a mal tourné…

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Encore une longue journée passée dans ce bar miteux. Il faut vraiment que je trouve un autre employeur, parce que ça commence vraiment à me courir sur le haricot, cette situation. Non seulement je ne suis pas bien payé, mes spectateurs sont pour la plupart des ivrognes, le bar est mal situé et en plus de tout ça, mon patron nous fait travailler le soir de Noël. Et si on avait d'autres plans ? Comme je ne sais pas moi, aller au bal organisé par Marraine exceptionnellement dans le château ? Là où j'aurais eu la chance de pouvoir rencontrer des tas de personnes influentes ? Ah ça m'énerve tellement que je manque de me prendre le bec avec le fût de bière ambulant qui me donne ma paye à la fin de mon service.

Je parcours rapidement la distance qui me sépare de mon appartement, avec pour seule envie de m'affaler sur mon lit et dormir pendant au moins une semaine. Les rues sont désertes, la majorité des citoyens étant probablement au château en train de s'amuser. J'ai toujours la possibilité d'y aller, mais je suis trop éreinté pour ça. Une fois à l'intérieur, je ne prends le temps de me déshabiller entièrement, enlevant seulement mes chaussures, chaussettes et ma chemise, avant de m'écrouler sur mon lit. Alors que je me m'endors, il me semble distinguer comme un bruit soudain et retentissant, mais je suis trop épuisé pour y accorder plus d'attention.

Je dors d'un sommeil profond, qui me semble durer longtemps. Je pense que j'aurais dormi encore un moment si je n'avais pas été réveillé en sursaut par quelqu'un qui tambourine à ma porte. Ayant toujours la tête embrumée par le sommeil, je mets quelques instants à réaliser ce qu'il se passe, et l'autre continue de sonner et frapper sans relâche. Serrant les dents, je me lève et promets un sale quart d'heure à la personne qui me tire du lit. Je jette un coup d’œil à mon horloge et constate qu'il est encore très tôt, et que le jour ne doit pas encore s'être lever. Je roule les yeux et ouvre la porte.

A l'instant où mes yeux se posent sur mon visiteur nocturne, ma colère s'évapore : il s'agit de Wolfran, qui se jette à mon cou et me serre de toute ses forces, avant de murmurer à mon oreille des propos qui n'ont aucun sens pour moi. Je laisse mes interrogations de côté pour l'instant et  prend à mon tour Wolfran dans mes bras, l'attirant plus près encore qu'il ne l'est déjà, et enfouie ma tête dans son cou. Tout s'est déroulé très vite, et très instinctivement : d'une part j'ai voulu rassurer Wolfran qui en avait de toute évidence besoin, et d'autre part, je l'ai fait tout simplement parce que je me sens tellement bien à chaque fois que l'on se retrouve dans cette situation. Je ne saurais pas l'expliquer, c'est juste ce que je ressens.

Après un long moment passé ainsi sans rien dire, à écouter la respiration saccadée du jeune homme, je me décide enfin à me libérer de son étreinte, en le repoussant gentiment. Je regrette ce geste presque instantanément lorsque je me rends compte de son état : il est couvert de sang ! Affolé, je le guide par la main jusqu'au salon et le force à s'asseoir sur un fauteuil, puis m'agenouille devant lui, vissant mon regard dans le sien. Je tente de contrôler ma voix mais la tension la fait trembler malgré moi.

« Wolfran, qu'est-ce qui se passe ? Est-ce que tu vas bien ? Tu es couvert de sang ! Bon sang, est-ce que je peux faire quelque chose ? »

Je n'ai jamais perdu pied comme en ce moment. Le voir comme ça sans rien comprendre me met dans tous mes états, et je n'arrive pas à déterminer la raison qui me fait monter les larmes aux yeux. Je ne le regarde avec angoisse, ma main toujours entremêlée à la sienne en guise de réconfort.

Kaa & Wolfran

And it crushed my heart
Aucune hésitation, Kaa lui rendit son étreinte et Wolfran se laisse aller à cette étreinte, son visage enfouie autant qu'il le pouvait dans la chevelure brune de son ami. Une de ses mains avait trouvé place dans le dos du danseur, au niveau du coeur, et il se calmait en écoutant le coeur stable, fort de l'autre homme battre sans faillir. Il ne saurait dire combien de temps ils sont restés, enlacés ainsi, en plein dans l'entrée de l'appartement, la porte à peine fermée. Ça n'avait pas d'importance, le blond en avait besoin de cette étreinte et pas seulement pour se rassurer. Une fois que la panique a été effacée, il ne reste que le plaisir de recevoir et donner une telle étreinte, qui lui a manquée, même s'il ne s'en était pas forcément rendu compte. La fatigue aussi fit son apparition, le rendant docile et malléable dans les bras du serpent. C'est bien la seule raison qui permit à ce dernier de s'échapper à sa prise; sinon le sorcier aurait été plus que content de rester ainsi jusqu'au lendemain matin. Il émit tout de même un léger son de plainte.

Il se laissa guider vers le salon et asseoir dans un fauteuil, son esprit se faisant groggy de sommeil alors que Kaa prenait place devant lui, serrant une de ses mains dans la sienne. Durant une seconde, Wolfran ne comprit pas les questions que lui posait Kaa, ni l'inquiétude dans sa voix. Il plissa d'ailleurs les yeux, réfléchissant en même temps que le brun parlait. Oui, il allait bien...soudain il ouvrit tout grand les yeux et les baissa sur ses mains, sa tunique, tachées de sang. Pas étonnant que l'autre ait paniqué...il se dépêcha de cacher ses mains entre ses cuisses, tentant de cacher un maximum la vue du sang. Bon sang, il était venu là pour s'assurer que son ami allait bien, pas pour l'inquiéter avec ce qu'il avait pu faire avant d'arriver ici. Seulement pour cela, il aurait fallut que l'apothicaire ait pris le temps de faire un brin de toilette et de ses changer. Ce qu'il n'avait pas fait, évidemment. Il avait eu si peur pour Kaa que tout le reste lui etait sorti de l'esprit. En tout cas il valait mieux qu'il explique la situation. Ça serait plus simple comme ça.

"Je n'ai rien Kaa. Ce n'est pas...le mien" dit-il en désignant vaguement le sang sur ses vêtements "Il y a eu...une explosion au château, durant le bal. On compte les blessés par dizaine...je n'y étais pas, pas au moment de l'incident. Je suis arrivé après, pour aider avec les blessés. Tous les guérisseurs et bonnes âmes ont été mobilisés. Quand on en avait fini de faire tout ce qu'on pouvait pour les blessés présents, j'ai pensé à toi." Sa voix se fit plus tremblante, à mesure que ses pensées de ce moment-là remontaient, menant les larmes à ses yeux "Je ne savais pas si tu étais allé au bal. Je ne me suis pas occupé de tous les blessés, alors je ne savais pas..." sa voix se bloqua et il dut prendre une grande inspiration avant de continuer "Alors je suis venu, pour voir si tu allais bien..." une nouvelle pause avant qu'il ne pousse un soupir "Bon sang pendant un seconde j'ai cru que je pouvais t'avoir perdu et je..."

Il ne put finir sa phrase, refusant de penser à cette possibilité. Alors il leva simplement les bras au ciel comme pour signifier qu'il ne savait pas quoi faire, il ne savait plus. Depuis combien de temps ne  s'était-il pas attaché à quelqu'un de manière aussi forte? Des années. Presque plusieurs décennies.

"Désolé. Je ne voulais pas t'inquiéter..."

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Je ne sais pas ce qui se passe, entre Wolfran et moi, mais je peux d'ors et déjà affirmer une chose : chacune de mes rencontres avec lui est haute en couleur ! Émotionnellement parlant, je n'ai jamais connu de chose plus intense que lorsque que je suis avec lui. C'est vrai, quand on y réfléchit : la première fois, outre la colère, j'ai eu droit à la perplexité et à la curiosité. La seconde a viré de la confession à un sentiment beaucoup plus complexe, une affection grandissante. Et ce soir... Ce soir, je pense que j'atteins le summum. Notre étreinte totalement inattendue n'a fait que confirmer mes impressions sur le jeune homme : Avec lui, je n'ai pas à me soucier de qui je suis, ou de ce que je dis. Je suis juste moi. J'ai envie qu'il soi près de moi, de le savoir bien, et pour être honnête, j'ai maudit celui qui est venu nous interrompre la dernière fois, parce que si ça n'avait tenu qu'à moi, ce moment aurait pu se prolonger encore longtemps. Oui, je crois vraiment que je tiens à Wolfran. Plus qu'à n'importe qui.

Malgré le fait que je sois complètement perturbé en sa présence, je garde un semblant de contenance, en me retenant de céder à tous mes instincts. Comme par exemple lorsqu'il dégage sa main de la mienne... Si je m'étais écouté, je l'aurais rattrapée avant qu'il n'ait pu esquisser un mouvement, mais j'ai résisté, pour la simple et bonne raison que je ne suis pas certain que Wolfran apprécie ce genre de geste venant de moi. Ça ne veut pas dire que je me suis empêché de suivre son mouvement avec désespoir avant de me reprendre, bien entendu. J'ai un certain contrôle, mais je n'ai vraiment pas l'habitude de faire face à des émotions si fortes... J'espère que Wolran ne s'en est pas aperçu, je ne voudrais pas qu'il soit mal à l'aise.

De toute façon, ce petit souci est vite balayé par l'inquiétude que provoque encore chez moi la vue de tout ce sang. Les traits tendus au maximum, j'écoute sans pour autant être rassuré les explications  de l'apothicaire, serrant les poings tellement fort sous l'effet de la pression que mes jointures me font mal. Il faut avouer que malgré les dires de mon ami, je ne me sens pas du tout rassuré. Une explosion pendant le bal ? Des dizaines de blessés ? Je n'imagine pas le chaos qui doit régner en ce moment même au château, et le stress qu'a dû subir le jeune homme pendant tout ce temps passé à s'occuper des blessés. Il doit être épuisé... Il me semble particulièrement bizarre de ne pas avoir entendu le vacarme créé par l'événement et malgré la situation, je réfléchis au pourquoi du comment. Je fais le lien par A plus B et conclus que le bruit sourd que j'ai entendu tout à l'heure devait être cette fameuse explosion. Bon sang, comment est-ce que j'ai pu me rendormir si facilement ? Je suis bien conscient que Wolfran n'a rien, mais je ne peux m'empêcher de me sentir coupable : et s'il avait été au bal et que je m'étais endormi, le laissant seul sous les décombres ? J'aurais bien baissé la tête sous l'effet d'une honte qui n'a pas vraiment lieu d'être, mais les paroles de Wolfran attirent mon attention comme un aimant.

Alors comme ça, il a pensé à moi. Mon cœur s'emballe en entendant ces mots, et j'oscille un instant entre le sourire béat motivé par l'idée que j'occupe ne serait-ce qu'une petite place dans son esprit et l'inquiétude persistante qui ne m'a toujours pas lâché depuis la vue sanglante. C'est finalement l'inquiétude qui prend le dessus lorsque je discerne, ou en tout cas crois discerner une faille dans la voix du jeune homme et des larmes dans ses yeux. Je pose ma main sur son bras, en signe de réconfort, et me rapproche lentement vers lui, tout en l'écoutant parler. Plusieurs fois, il se stoppe dans ses paroles, et chaque fois, j'ai l'impression que ma cage thoracique compresse mon cœur. Ça, c'est une sensation que je n'ai jamais expérimentée, et je ne peux pas dire que j'en raffole. Ce n'est que lorsqu'il a fini de parler – ou peut-être n'avait-il pas fini, mais je n'étais plus en position de me retenir – que je cède à mes instincts et l'attire contre moi, une main contre son dos et l'autre à la frontière entre sa nuque et ses cheveux. Une volonté dont je n'avais pas conscience m'empêche de la lui passer dans les cheveux pour les caresser et je me concentre sur ma propre voix pour ne pas céder à une énième tentation :

« Je vais bien ne t'en fais pas... Tout va bien maintenant, c'est fini, tu n'as plus à t'inquiéter...  Et je suis content que tu n'aies rien non plus.»

Ce sont les seuls mots que j'arrive à lui dire, et avant de me perdre un peu plus dans cette étreinte, je  m'éloigne un peu trop brusquement et ajoute, après un raclement de gorge pour poser ma voix vacillante :

« Je peux t'apporter quelque chose ? Un thé peut-être ? Ou des vêtements propres ? Je ne suis pas sûr que les miens iront, mais tu pourrais au moins te laver, j'imagine que tout ce sang ne doit pas être très agréable ! Ma salle de bain est à ta disposition, en tout cas ! »

Je n'ose pas me relever, totalement perdu dans ce que je suis sensé faire, et prie pour que la situation ne semble pas trop embarrassante pour mon le jeune homme. Oh, elle l'est pour moi parce que je ne sais pas comment il va réagir, et une nouvelle forme d'inquiétude se fait désormais sentir...

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

L’étreinte que Kaa lui offre est rassurante, apaisante, en un sens et Wolfran se laisse aller à cette étreinte, posant son front contre l’épaule du brun, fermant les yeux une seconde. Il n’avait plus l’habitude de ce genre de montagne russe émotionnelle. Ressentir la plus oppressante des inquiétudes, une anxiété qui vous vole jusqu’à votre souffle même, vous glace le sang au plus profond de votre être et vous fige sur place ; juste avant de ressentir un soulagement qui remet tout en route et plus encore. Comment expliquer autrement la vitesse à laquelle battait son cœur quand il avait vu l’homme sujet de ses inquiétudes devant lui, bien vivant, sain et sauf, loin d’être blessé…Ou le manque total de retenue dont il a fait preuve, en l’étreignant ainsi, sans crier gare, simplement pour se rassurer lui-même ? Mais, finalement, y avait seulement habitué, un jour dans sa vie ? Oh, il a toujours tenu à ses parents, mais ils savaient prendre soin d’eux, il les connaissait suffisamment bien pour cela. Il y a eu t Nerissa et son époux, mais là encore, il savait qu’ils veillaient sur l’un et l’autres…non, eu final, jamais il ne s’était attaché avec autant d’intensité et aussi rapidement à quelqu’un. C’est…Quelque chose de fulgurant, qui n’a pas prévenu et qui n’est pas prêt de quitter les lieux. Wolfran en est content. Il se sent, en la présence du danseur, plus vivant qu’il ne l’a été depuis bien longtemps…

L’étreinte se brise, trop rapidement au goût de Wolfran qui dût faire un effort qui lui parut surhumain pour ne pas entourer ses bras autour des épaules de son ami et l’attirer de nouveau contre lui. Les paroles prononcées le ramenèrent à la réalité et il observa, l’air un peu absent, ses mains couvertes de sang, et se dit que oui, une douche ne serait pas du luxe. Sauf que là viens le dilemme ; d’un côté, il y a sa raison qui lui dit que ça y est, il est rassuré, Kaa va bien, il va bien, tout le monde va bien ou presque, alors il peut rentrer chez lui, prendre une douche, boire un bon thé et aller s’écrouler dans son lit afin de dormir et oublier les images de l’horreur qu’il venait de vivre (comme s’il le pouvait…oublier). D’un autre côté, son cœur lui hurlait de rester encore un peu, et au fond de lui, le sorcier sentait bien qu’il n’avait pas la force de rester seul, pas ce soir en tout cas. Il voulait rester encore un peu, jusqu’à ce que Kaa ne se décide à le mettre dehors, simplement pour profiter de la présence de l’autre…Finalement, ce fut la raison qui perdit le combat et il se pencha, posant son front contre celui du brun, fermant les yeux.

"Je ne veux pas m’imposer…Mais je pense que je accepter ton offre de douche. Je ne veux pas…Risquer de créer la panique dans la rue en rentrant chez moi tâché de sang."

Bon sang, il avait failli dire qu’il ne voulait pas encore rentrer chez lui. Il fallait vraiment qu’il fasse attention, la fatigue et la retombée d’adrénaline rendant son discours plus libre qu’il ne l’était avant. Kaa était son ami, c’est vrai, son confident, à n’en pas douter, mais il y avait tout de même des limites à cette relation. Des limites qu'aucun d’entre eux n’a citées explicitement, mais il ne fallait pas les ignorer.

Après avoir demandé à son hôte où se trouvait la salle de bain, il prit sa direction et ferma la porte derrière lui. Un à un, les articles de vêtements tombèrent au sol, c’est d’ailleurs là qu’il se rendit compte qu’il avait totalement oublié sa mallette sur le lieu de l’accident, mais tant pis. Des plantes, il en retrouverait, des onguents il en referait. Il passa enfin sous le jet d’eau chaude et fit en sorte de nettoyer tout le sang, sa vue devenant de plus en plus gênante, à mesure que l’eau chaude calmait son esprit, ravivait ses sens et le débarrassait de cette espèce de coton qui semblait entouré son esprit depuis qu’il avait commencé à s’inquiéter pour Kaa. Quand il sortit enfin de la douche, il allait mieux. Il se sentait moins groggy, moins anxieux aussi, mais toujours aussi fatigué. C’était une de ces fatigues profonde dont il ne se débarrasserait pas de sitôt. Il retourna dans le salon, une serviette autour de la taille, ses vêtements dans les bras.

"Merci pour la douche. J’en avais besoin…" La grande question était, que dire d’autre… ? "Je suis désolé d’avoir débarqué à l’improviste comme ça. »

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Il y a une personne qui se douche dans ma salle de bain. Pas de panique. Tout va bien. Bon sang ! Il y a une personne qui se douche dans ma salle de bain ! Et pas n'importe qui ! Wolfran ! Qu'est-ce que je suis sensé faire ? J'en sais rien, c'est la première fois que je reçois quelqu'un que j'aime bien plein de sang chez moi ! Mais pourquoi je panique comme ça c'est ridicule, j'ai jamais été dans cet état ! Attends, quoi ? Que j'aime bien ? Mais qu'est-ce que... Aïe, aïe ! Bon sang de table basse ! Ça suffit, Kaa ! Tu t’assois, tu respire. Il n'y a aucune raison de s'exciter comme ça. Pense de manière logique.

Wolfran est chez toi, traumatisé par une explosion qui a fait plusieurs blessés. Il a passé une bonne partie de la nuit à s'occuper d'eux puis il est venu voir si tu allais bien parce qu'il s'inquiétait. Il s'inquiétait pour moi... Rah, reste concentré et enlève ce sourire niais. Il est probablement éreinté par toute cette agitation, et là il prend juste une douche parce qu'il est couvert de sang. Voilà, pas de quoi en faire un drame. De quoi j'aurais envie à sa place ? De me nourrir, probablement vautré sous une couette... Je sais pas si ça lui conviendra, mais je sais pas quoi faire d'autre.

Alors, sortir deux tasses, faire chauffer l'eau, sortir de quoi manger... Quoi d'autre déjà ? Ah oui, la couette ! C'est pitoyable, me voilà à courir partout comme un lapin... Donc la couette, c'est bon ! Les vêtements ! Mais oui, quel abruti, il va pas remettre ses vêtements couverts de sang ! Bon, j'espère que ça ira à peu près et... L'eau qui déborde, oh non, mais pourquoi je peux pas faire attention ? Vraiment, je ne vois pas pourquoi je suis dans un état par - Ouch, je me suis brûlé mais ! Faut que ça s'arrête, je me reconnais plus, j'ai l'impression d'être Ulrich, à faire trois gaffes à la minute... On va rester concentré. On verse l'eau doucement dans les tasses, on amène tout ça sur la table basse du salon. Parfait.

Finalement, j'ai réussi à tout installé avant que Wolfran ne sorte de la douche. In extremis, ceci dit ! Je regarde le jeune homme et tente de rester concentré sur ce qu'il dit. Au moins la douche lui a fait du bien...

"Ne t'en fais pas pour ça, tu ne me déranges jamais ! Et puis je ne travaille pas aujourd'hui, alors je peux me permettre de raccourcir ma nuit pour toi !" Que ça sonne mal. Je prends la pile de vêtements propres et la lui tend. "Tiens, enfile ça, je ne sais pas si ça t'ira, mais l'avantage c'est qu'ils ne sont pas poisseux de sang ! Donne tes affaires, je vais m'en occuper !" Je me dirige à la salle de bain et laisse l'eau remplir l'évier. Je m'éternise là, regardant l'eau rougir, pour laisser le temps à mon invité de se changer. Puis, d'un pas lent mais bruyant - pour signaler mon arrivée et ne pas surprendre le jeune homme dans une tenue légère - je retourne au salon, et constate qu'il a fini de se changer.

Ça lui va bien, finalement, même si c'est un peu trop grand. Mais ce n'est pas le moment de penser à ça. Je m'affale sur le canapé, la couette par dessus moi, et fait signe à Wolfran de me rejoindre en tapotant doucement la place à côté.

"Tes vêtements sont à trempés, alors tu vas devoir patienté encore un peu. Désolé, je sais que tu dois être épuisé, mais on peut essayer de rendre l'attente confortable. J'ai sorti à boire, et à manger, alors n'hésite pas, tu es ici chez toi." Bon sang, c'est quoi cette phrase cliché ? Décidément, je perds tous mes moyens, et j'arrive pas à comprendre pourquoi. Il me faut un nouveau sujet pour briser mon embarras. Dans la panique, je me tourne vers le seul qui me vient à l'esprit - et qui je dois l'avouer me démange depuis que le jeune homme est arrivé. "Je sais que tu ne dois pas avoir très envie de parler de ça maintenant mais... C'est quoi la situation au château exactement ? Je veux dire, en terme de dégâts, de blessés... Et de piste ? Quelqu'un a une idée claire de ce qui a pu se produire ? Parce qu'une explosion, généralement, ça n'arrive pas tout seul..."

Pourvu qu'il ne se renferme pas... Ma curiosité me perdra un jour, j'aurais pu me retenir de poser ses questions, je ne veux surtout pas le mettre mal à l'aise. Enfin, dans ce cas de figure, j'ai plus cédé à ma panique intérieure qu'autre chose, mais le résultat reste le même pour lui...

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Le blond se mordit la lèvre quand Kaa fit allusion au fait de raccourcir sa nuit à cause de lui. Ce n’était pas son but, loin de là. S’il avait pris le temps de parcourir tous les blessés afin d’être certain que le brun n’avait rien, jamais il ne serait venu ici, réveillant le danseur d’un sommeil dont il avait probablement grandement besoin. Un sentiment de culpabilité lui étreignit la poitrine à cette notion et il faillit repartir dans la salle de bain pour se rhabiller et quitter les lieux aussi vite que possible, pour ne pas le déranger plus longtemps et le laisser dormir. Même s’il n’avait aucune envie de rester seul ce soir, à se repasser en boucle les évènements et images de la soirée cauchemardesque. Sauf que le brun le prend de vitesse et lui tend des vêtements ; les siens, pense Wolfran, et il sent ses joues chauffer à l’idée, sans trop savoir pourquoi. Il était logique qu’il ne le laisse pas se balader en serviette durant le reste de la soirée…En revanche qu’il lui prenne ses vêtements avant de s’enfermer dans la salle de bain pour, entre autre, lui laisser un peu d’intimité le temps de se changer. Le blond cligna des yeux un instant avant de se changer prestement, gardant la serviette sur la tête pour se sécher les cheveux (ce qui en soit irait vite, il les gardait suffisamment courts pour cela).

Les vêtements étaient un peu larges pour lui, bien que la longueur soit la bonne. Il faut dire que lui et Kaa n’étaient tout à fait taillé dans le même genre ; lui était certes grands et loin d’avoir de quoi se plaindre physiquement, mais le brun possédait les muscle allant de pair avec sa profession et ça se voyait…Non, pas par-là cerveau, pas par-là…Il secoua fermement la tête, comme si le geste physique pouvait dissiper les pensées qui lui étaient venue en pensant ainsi à son ami. Il fit quelques pas dans la pièce, retrouvant les mêmes éléments que lors de sa dernière visite, et vit ce qu’il avait préparé durant sa douche. De quoi manger, du thé…Cela le toucha, énormément. Bon sang, il venait au milieu de la nuit, le réveillant probablement d’un sommeil bien mérité après une soirée de travail à la Sirène Amputée, et il était au petit soin pour lui…

Wolfran était encore en pleine contemplation de ce qui se trouvait sur la table basse quand il entendit des pas arriver vers lui et il tourna la tête, voyant effectivement Kaa arriver, l’invitant à faire comme chez lui. Sauf qu’il ne le pourrait pas, parce qu’il respectait bien trop son hôte et ami pour cela.

"Tu n’aurais pas dû t’embêter, mais merci beaucoup…"

Il ne le disait pas, mais l’attention lui fit chaud au cœur et ce fut sans une once d’hésitation que le jeune homme vint s’asseoir à côté de Kaa, les jambes repliées sous son corps, une tasse de thé dans les mains, se tenant près, très près du brun et pas seulement pour profiter de la chaleur de la couette. Il ne le touchait pas, pas vraiment, mais était plus près que ce qu’une simple amitié aurait pu autoriser. Seulement, il avait besoin de le savoir là…Malgré son soulagement et être certain qu’il allait bien, la peur et l’inquiétude qu’il avait ressenti un peu plus tôt avaient été bien trop tenaces pour qu’il n’y ait pas des restes encore maintenant, et il agissait à présent beaucoup trop par instincts pour vraiment penser à ce qui était approprié ou non, sa fatigue aidant. Le léger silence qui s’installa entre eux était simple, tranquille, sans gêne réellement ; pourtant Kaa le brisa, en lui posant des questions…Sur l’accident. Wolfran se raidit une seconde avant de se détendre. Il n’avait pas spécialement envie d’en parler, mais…Il savait aussi que ça lui ferait du bien. Et s’il ne pouvait pas parler de tout avec Kaa, à quoi bon lui avoir révéler son secret en premier lieu ? Alors le jeune homme pris une longue gorgée de thé avant de se blottir tout contre le brun, sa tête sur l’épaule de l’autre, cherchant le réconfort pour affronter le récit qu’il allait faire.

"Le château tombe en ruine. J’ai cru comprendre que c’était une bombe, d’origine criminelle, qui aurait causé toute cette horreur." Son ton était fade, monotone ; il tentait de mettre el plus de distance entre lui et les évènements, pour ne pas sombrer. "Il y a beaucoup de blessés, mais à priori pas de mort, ce qui est tout de même un soulagement." Il se tut un instant, un frisson accompagnant une vague nauséeuse parcourut son corps tout entier avant qu’il ne pose la tasse sur la table, se blottissant un peu plus contre Kaa et dans la couette au passage "Ma raison me dit que je ne devrais pas abuser de ton hospitalité, notamment parce que toi aussi tu dois être fatigué…Tu as probablement travaillé hier soir…Pourtant, au fond, je…" il hésita un instant avant de lever les yeux vers le visage du brun "Je n’ai pas envie de me retrouver seul ce soir…J’ai peur de fermer les yeux, peur de revoir toute la soirée et pire encore défiler devant mes yeux si je le fais…"

Il ne devrait pas mettre ce genre de poids sur les épaules de son ami, il le savait, et pourtant il le faisait, parce qu’il en avait besoin et qu’il voulait être égoïste un peu, pour une fois…

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Si je m'étais attendu à cette situation en rentrant chez moi ce soir, j'aurais couru de la Sirène Amputée jusqu'à mon appartement pour que ça arrive plus vite. En fait, non, c'est ridicule, je n'aurais pas pu dormir... Et ça voudrait dire, d'une façon de penser assez tordue, que j'aurais eu hâte que l'incident au château se déclenche, ce qui est parfaitement faux. Je n'ai strictement rien à faire de ce qui s'est passé au château, plus maintenant. Maintenant, j'ai envie d'être égoïste, et de profiter entièrement de ce moment privilégié avec Wolfran. La seule chose que je regrette, presque instantanément, c'est d'avoir posé mes stupides questions sur ce qui  s'est passé...

Nous étions assis tranquillement, près mais pas assez à ma convenance, et il a fallut que je brise le silence avec ma curiosité légendaire. Au moment où j'ai senti – et vu, parce que c'était très visible – mon invité se tendre en entendant mes questions, j'ai voulu me frapper, littéralement. Ce n'est pas dans mon habitude de me soucier de l'embarras que je peux provoquer chez les gens, surtout si c'est dans mon intérêt d'une manière ou d'une autre, mais la personne en face de moi en ce moment, ce n'est pas n'importe qui : il s'agit de Wolfran pour qui – et il serait futile et idiot de le cacher – j'ai définitivement une attirance particulière. Et pour rien au monde je ne voudrais le froisser, bien au contraire.

Je me tends donc à mon tour, en priant pour que le jeune homme ne se vexe pas ou pire ne décide de partir. Pourtant, à ma grande surprise, il fait l'opposé de ce à quoi je m'attendais et se blottit contre moi après avoir bu son thé, sa tête sur mon épaule. L'inattendu de cette action me fait presque sursauté, mais j'arrive à grand peine à me contrôler, et une fois la surprise passée, me réjouis de la situation. Mes bras bougent d'eux-même pour encercler doucement la taille de Wolfran, et je pose par la même occasion ma tête contre la sienne, respirant l'odeur de shampooing de ses cheveux fraîchement lavés à travers la serviette. Il y a deux mois, jamais je n'aurais osé faire une chose pareille. Je me serais pris la tête pendant un long moment, réfléchissant à toutes mes options, pour au final me raviser et ne rien faire, reclus intérieurement. Mais nous avons fait du chemin, lui et moi, depuis deux mois, et l'heure n'est plus à la réflexion. Mes instincts sont les seuls maîtres à bords, à présent, et le fait de penser à ce que pourrait dire Wolfran de mon comportement ne m'effleure même pas l'ombre d'un instant.

J'écoute donc Wolfran, notant au passage que s'il me parle des événements de la nuit précédente, il ne le fait pas avec enchantement. Sa voix le trahit, de même que le frisson qui le parcourt lorsqu'il en vient aux blessés. Je le sens se rapprocher encore de moi – si tant est que c'est encore possible – et en entendant la suite de son discours, j'ai du mal à déglutir. Il me dit encore une fois qu'il ne veut pas s'imposer, et ce n'est pas ce qui me choque, puisque j'ai compris depuis longtemps que Wolfran est quelqu'un de foncièrement gentil, et que c'est ainsi sa nature qui parle. En revanche la confession qui suit, je ne m'y attendais pas : il ne veut pas rester seul, parce qu'il a peur de revivre les événements du château. Pour la première fois ce soir, je prends entièrement conscience du traumatisme de cette soirée sur le jeune homme. Il n'y a pas de quoi être surpris, vraiment, n'importe qui serait dans le même état après ça, et je m'en veux de ne pas l'avoir réalisé plus tôt. Je parle sans réfléchir à ce que je dis, mais au fond, je sais que je n'aurais pas dit quelque chose d'autre de toute façon.

« Tu n'as pas à être seul ce soir. Je ne veux pas que tu le sois. Je ne veux pas que tu partes, Wolfran. Reste ici, aussi longtemps que tu veux, ça me fait plaisir. Et si tu as besoin, tu peux même revenir demain, et tous les soirs qui suivent, si tu en as envie. J'en ai envie. » Ma tête qui glisse vers son cou, et je laisse passer quelques secondes avant de murmurer « Et tu n'as pas non plus à avoir peur. Je suis là, maintenant, et je ne laisserais rien t'arriver. »

Je ne sais pas combien de temps s'écoule en silence après ma déclaration, même si j'ai conscience que ça dépasse la demie heure. Malgré toute ma volonté, mon corps succombe à la fatigue, et je me sens doucement m'endormir, sans pour autant desserrer mon étreinte autour du jeune homme. Je ne crois pas que j'aurais un jour envie de le laisser partir...

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Sentir les bras de Kaa autour de sa taille est quelque chose qui lui fait un bien fou. Ça lui apporte du réconfort, une présence qu’il n’a pas habituellement. Une chaleur humaine qui lui a trop longtemps manqué sans qu’il n’accepte de l’admettre, à son grand damne, maintenant qu’il ne peut pas faire autrement que s’en rendre compte. Il ne le regrette pas ; il retrouve ces sensations et cette chaleur si particulière en présence de quelqu’un en qui il a pleinement confiance, avec qui il n’a pas à se cacher et qui semble avoir besoin de ce genre de contact autant que lui. Il n’allait pas mentir cependant : sans les questions sur le château et la catastrophe de ce soir, il s’en serait mieux porté, honnêtement. Maintenant, il ne peut pas blâmer Kaa de sa curiosité. Lui aussi, à sa place, aurait voulu en savoir plus, pour juger un peu de la situation sans y avoir mis les pieds. Notamment pour l’aider si besoin était. Mais les rôles étaient inversés, et Wolfran ne pouvait s’empêcher de se dire que Kaa faisait un sacré bon job de le réconforter jusque-là. Certes, il restait silencieux, mais rien que sa présence, le fait qu’il fasse attention à lui, à ce qu’il voulait, le calmait énormément et repoussait ses démons.

Après sa petite confession, il avait voulu éviter le regard de Kaa. Parce qu’il avait peur que ce dernier ne décide de le laisser seul à ce moment-là s’il continuait à le fixer avec ses yeux trop pleins d’espoir. Parce qu’il ne voudrait peut-être pas avoir à gérer un type d’une telle instabilité émotionnelle, pas ce soir. Pourtant il le surprit, encore, avec ce qu’il dit. Qu’il lui propose de rester…Ca l’étonnait, mais pas tant que ça, il avait déjà prouvé que sa présence n’était pas dérangeante pour le serpent ; cependant, qu’il dise clairement vouloir qu’il reste, vouloir l’aider, c’était nouveau. D’où ça sortait, il ne saurait le dire, mais il profita allègrement et totalement égoïstement de la sensation des bras de Kaa autour de lui, de son visage dans son cou…il inclina, d’ailleurs, légèrement la tête dans le sens opposé, pour lui laisser plus de place. Wolfran leva une main pour la passer dans les cheveux du brun, encore et encore, profita de leur douceur et de ce contact intime avec son hôte.

"Merci Kaa…" il ne sut quoi dire d’autre sans risquer de dire des énormités.

Un long moment passa et c’est quand il sentit sa propre main retomber sur ses genoux que le blond se dit que, peut-être, il serait temps d’écouter son corps et d’aller dormir. Oh, il aurait très probablement pu dormir ainsi, dans cette position. Mais il savait que ça n’engendrerait que des courbatures et autres douleurs articulaires le lendemain au réveil et il ne voulait pas cela pour Kaa non plus, qui lui avait en plus besoin de bien dormir pour son travail de danseur ; une courbature mal placée et c’est l’horreur pour une soirée de travail. Alors il retourna sa main dans les cheveux du brun cette fois dans l’idée de le réveiller un peu.

"Kaa ? Tu devrais aller te coucher. Si tu restes dormir comme ça, tu vas attraper un torticolis, ou pire encore…Kaa ?"

Il secoua très doucement et très délicatement la tête du danseur. Si l’apothicaire voulait que son ami aille dormir dans son lit, il n’imaginait pas une seule seconde qu’ils partagent le lit. Pour lui, la logique était qu’il dorme dans le canapé. Il était bien assez grand pour l’accommoder et lui permettre de passer une nuit tranquille. Il admettait volontiers qu’il aurait bien passé la nuit ainsi enfermé dans les bras de Kaa, mais ça serait beaucoup trop abusé de son hospitalité et surtout de son amitié pour lui que de faire une chose pareille.

Kaa & Wolfran

Please, talk to me

Les yeux clos, j'avais fini par cesser de lutter contre le sommeil. Il faut dire que je n'étais pas aidé dans cette lutte : la chaleur de la couette, mêlée à celle de mon étreinte avec Wolfran, aurait largement suffit à m'endormir, mais comme si ça ne suffisait pas, mon invité me caressait doucement la tête, ses doigts courant dans mes cheveux, m’ôtant toutes mes forces, comme par enchantement. Le tout combiné à la fatigue d'une nuit de sommeil interrompue constituait un mélange parfait, m'endormant sans que je m'en rende compte.

J'aurais volontiers dormi comme ça, dans mon canapé, blotti contre le jeune homme. C'est la première fois que j'ai droit à autant de proximité avec quelqu'un, et par n'importe qui ! Je ne pense pas que je me serais retrouvé dans cette situation si la personne avec moi avait été... Je ne sais pas, disons Ulrich... Bloqué entre le monde des rêves et la réalité, j'ai pris conscience que ma relation avec Wolfran allait bien plus loin désormais que la simple amitié, sans pour autant arriver à mettre une étiquette dessus... Toujours est-il que  si le jeune homme ne m'avait pas délicatement tiré de mon sommeil, j'aurais continué à dormir, probablement tard dans la matinée, ne serait-ce que pour profiter de sa présence.

Mais ses caresses, plus que ses mots que j'avais du mal à saisir, encore embrumé par mon demi-sommeil, me forcèrent à ouvrir les yeux. Il avait probablement raison, mieux valait que j'aille me coucher. Je ne sais pas si je suis parvenu à articuler une phrase intelligible ou si je n'ai fait que déblatérer une suite de grognements, mais je voulais m'assurer que ça ne le gênait pas de dormir sur le canapé. Je ne me souviens pas non plus de ça réponse, ou même si j'ai eu une réponse, mais j'ai fini par trouver le chemin de ma chambre, laissant mon invité dans le salon. Mes draps était terriblement froids, et une grimace de regret se peignit sur mon visage. Ça ne m'empêcha pas de m'endormir en quelques secondes, mes dernières pensées allant à Wolfran, que je pouvais distinguer à travers la porte que j'avais laissé grande ouverte exprès.

Le lendemain matin, c'était comme si j'étais bloqué dans un rêve : le jeune homme était là, déjà habillé alors que je me levais à peine, et nous avons prit le déjeuné ensemble, discutant de banalités. Je ne pense pas que mon sourire niais, qu'on pourrait aisément rebaptiser mon "sourire à Wolfran", m'a quitté une seule seconde. Une grande partie de moi ne voulait pas le laisser rentrer chez lui lorsqu'il a finalement rassemblé ses affaires pour partir, mais je savais parfaitement que je ne pouvais pas le garder ici indéfiniment. Je l'ai donc regardé partir sur Roméo Drive depuis ma fenêtre, après lui avoir proposé plus que nécessaire de le raccompagner.

J'ai fixé l'horizon un petit moment après l'avoir perdu de vu, puis je me suis assis à l'endroit même où nous étions installés la veille, blottis dans la couverture. Après ça, il me semble que je me suis endormi, mais je n'en suis pas vraiment sûr...