Tibiscuit & Aliénor

Siouplé m'sieur Pâtacookies, prenez-moi !

Avec une certaine angoisse, je suis les indications menant vers Muffin Man qu'on m'a donné quelques minutes plus tôt. Un récapitulatif de mon expérience professionnel sous le bras, je tâche de ne pas montrer trop ouvertement que je suis plus qu'angoissée de me rendre là-bas. Bien sûr, il peut s'agir pour moi d'une merveilleuse opportunité de quitter définitivement le domicile de mon amie qui a eu la gentillesse de m'héberger après que je sois partie de la maison familiale.

Seulement, malgré les multiples assurances de ma logeuse temporaire, je ne peux m'empêcher de douter sur mes compétences pour ce travail. Il est vrai que l'annonce pourrait me convenir, je le conçois. Après tout, ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'on me demandait de faire une baguette ou un pain, je pense avoir une expérience dans ce domaine. Toutefois, je doute que son avis soit partiale car elle m'a dit la même chose pour les entretiens précédents...

Mais cette fois-ci je vais réussir ! Il le faut ! Je ne peux pas rester dans cette situation indéfiniment, quand bien même elle m'assure que cela ne la dérange pas. Même si le patron ressemble à un cancrelat ou est un despote en puissance, s'il m'accepte, je sauterai sur l'occasion.

Alors que je tourne à un embranchement où je peux apercevoir au loin un chapiteau dressé pour une quelconque célébration de celle qui nous sert de reine, ma relative confiance en moi concernant cet évènement à venir s'évanouit un peu.

Que va dire le responsable des recrutements quand il va se rendre compte que je fais apparaître des fleurs quand je parle ? Il va surement me mettre dehors manu militari comme un champignon de moisissure sur du pain qui n'a pas été mangé.

J'ai tourné des milliers de fois la scène dans ma tête pour tenter de trouver un moyen pour que mon futur employeur (ce que je souhaite ardemment) ne l'apprenne pas tout de suite et me considère sérieusement comme une potentielle candidate au poste. La seule solution que j'ai trouvé est de m'annoncer avant que je rentre dans la boutique puis de demeurer silencieuse et de me contenter de lui tendre la feuille où j'ai écrit de ma plus belle écriture ce que je savais faire.


Le courage retrouvé, je finis par apercevoir au loin ma destination. Je mets à enchaîner les pas de manière rapide, sans pour autant courir. En effet, si je suis angoissée à l'idée de savoir comment cela va se dérouler, je veux en finir au plus vite.

Soupirant afin de me donner encore un peu de courage, j'ouvre la porte doucement avant de dire aussi vite que possible, telle une salamandre ayant été dérangé dans son feu de cheminée :

-Bonjour ! Je suis bien chez Muffin Man ? Je viens pour l'annonce !

Première étape brillamment accomplie. Comme c'était à prévoir, plusieurs roses sont apparus et je m'empresse à les mettre en dehors de la boutique avant d'en refermer la porte.

Raide comme un piquet, je m'avance un peu dans la pièce tout en prenant soin de me dégager de l'entrée afin d'attendre. Seulement, comment pouvais-je savoir que mes rares mots ont été dit surement trop rapidement pour être compris de manière intelligible ?