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FORT FORT LOINTAIN A FERME SES PORTES.
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we'll carve our names as the sun goes down - marie


FORT FORT LOINTAIN

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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptyVen 20 Fév - 21:54


marie & charmant
And as the world comes to an end
I'll be here to hold your hand

Le ciel coulait sur les vitraux, il s’infiltrait jusqu’au-dedans, ensevelissant la pièce dans des ténèbres épaisses. Et l’air frais combattait les vagues de chaleur déployées depuis la cheminée. Et Charmant combattait l’éveil, les yeux plongés sur la lueur vacillante de la bougie. Il la fixait, dans l’espoir de s’en lasser et de tomber enfin dans ce repos quotidien qui lui faisait défaut depuis quelques jours. Il demandait pas grand-chose, le nouveau roi. Juste un petit somme, de quoi se remettre d’aplomb avant de se lancer tête la première dans une énième bataille. Mais c’est connu, les combats les plus douloureux et fatiguant sont intérieurs. Et y avait un joyeux bordel qui commençait à s’amasser dans sa tête. C’est comme si son esprit écumait les marchés aux puces et n’apportait que des antiquités, des choses brisées. Sauf que Charmant, il avait pas encore trouvé la colle qui lui permettrait de réparer tout ça, ni l’enduit pour son vieux cœur rouillé et ses sentiments qui fonctionnaient plus bien. Il avait tout juste trouvé le temps de mettre son grain de sel un peu partout sur le royaume ; et voilà le résultat. Une mère disparue, une couronne sur la tête et l’incapacité entre ses dix doigts. Le beau tableau.
Aussi, les journées lui paraissaient éternelles, et les nuits comptaient doubles. Il les passait à ruminer ce qu’il avait fait dans la matinée et ce qu’il ferait dans la suivante, si jamais il réussissait à survivre jusqu’au lever de Soleil prochain. Sait-on jamais, il se retrouverait peut-être un jour empalé, la tête sur une pique brandie par une horde de sauvages qui hurleraient que la mort, c’était pour leur liberté. Il aimerait la leur offrir, la liberté. Mais il pouvait pas satisfaire tout le monde. Et, il avait déjà du mal avec lui-même. Il soupira un peu trop fort et la bougie s’éteignit. Le voilà les yeux plongés dans ceux des monstres de son enfance, suspendus aux chandeliers, la gueule ouverte sur leurs crocs acérés, prêts à dévorer ses rêves. Il les a toujours vu, en contraste avec la lumière de la lune, qui filtrait au travers des carreaux. Une Providence sarcastique, qui se drapait de la nuit pour gober le jour qui sommeillait en lui ; elle l’écrasait de son rire jaune silencieux, celui qui lui crachait aux oreilles qu’il devrait s'en tenir aux publicités pour shampoings de luxe plutôt que de tenter vouloir faire quelque chose de sa vie. Alors Charmant reproduisit le même rituel, depuis gamin. Il ferma les yeux et releva le drap au-dessus de sa tête. Pas vu, pas pris. Et finalement, Morphée répondit à ses appels de détresse.
Il faisait vachement plus clair, là-bas. Le soleil brillait fort et une brise légère secouait les feuilles encore vertes des arbres séculaires. Leur tronc noueux abritait des visages anciens, la mine paisible, qui observaient le monde de leurs pupilles de sève sage. Et par-delà des collines s’étendaient des champs entiers de jonquilles et d’herbes hautes où s’éventait un groupuscule de licorne, crinières au vent. Y avait le petit gazouillis des oiseaux, le doux clapotis de l’eau. Y avait même un nuage en forme de peigne et une fleur géante qui peignait la scène sur ses pétales. Et une musique lente mais entêtante, aux notes régulières, qui balayait l’endroit, qui passait d’une oreille à l’autre. Et au milieu de ce paradis pour fées, il y avait Charmant, vêtu tout de l’or du soleil, qui souriait. Il était étendu à même le sol, chose qu’il n’avait pas fait depuis des années. Ça lui rappelait avant, alors qu’il prenait le temps de parcourir chaque centimètre de chaque contrée, à la recherche d’hydromel et d’aventures. Ça lui rappelait quand il chevauchait son fidèle destrier, à travers blizzards et marées, déserts et forêts, en quête de cet idéal qu’il n'avait pourtant jamais réussi à atteindre. Il avait pas des objectifs très ambitieux, à l’époque. Il gardait en tête, comme une cerise mûre mise en bocal, l’idée de gouverner ; mais il avait dans le cœur l’envie de mener une vie bohème dont il pourrait réchapper avec un sourire sur  la trogne ; le genre de vie où un peu d’eau, trois pommes, un coin pour se poser et un peu de chaleur humaine suffisaient à vous revigorer un homme. Il se disait que ça aurait pas été si mal, s’il avait été quelqu’un d’autre. S’il n'était pas pourri comme ça, jusqu’à la moelle. Il avait bon cœur au fond, le roi ; c’est juste qu’il était plus gris que blanc et que certaines parcelles étaient vouées à jamais au noir de la peur ou à celui des regrets. Des mauvaises décisions, des stratégies inachevées, des choix manqués. Et on rattrapait pas quarante années d’une vie d’usurpateur en deux semaines de régence. Peut-être même qu’il y parviendra jamais, à son repentir. Mais c’est pas faute d’essayer. Il inspira l’air frais de ses songes à pleins poumons et les papillons dans le creux de son estomac s’agitèrent. Leurs ailes lui chatouillaient les entrailles et il se surprit à rire. Ça aussi, ça faisait longtemps.
Et puis il se retrouva à nouveau face au néant de la nuit. Les yeux ouverts, il fronça les sourcils. On toquait à la porte. Il poussa un nouveau soupire, désolé pour son quota de sommeil qui ne serait pas complet cette-fois-ci non plus. Mais soit, salus populi suprema lex esto, le bien du peuple est loi suprême. Il se tira de ses draps et enfila rapidement sa robe de chambre. Il faudrait qu’il pense à la faire changer, le parme n’était plus tendance cette saison. Il tira sur la poignée de sa double porte, et les éclairages du couloir révélèrent une silhouette familière sur le seuil. « Ah, dame Lopaline. » Il arqua un sourcil, frustré d’avoir été réveillé ainsi ; mais il ne put tout à fait lui en vouloir, elle ne serait pas présente, s’il n’y avait pas un problème urgent à traiter. Ou une Dragée contagieuse à éloigner du guérisseur royal, sur lequel elle pestait ardemment pour ne pas parvenir à la guérir dans l’immédiat de ses troubles intestinaux. « Que me vaut le plaisir de votre visite ? » Le ton est mielleux pour un bougon pareil, qui regagnait peu à peu l’habitude d’être en paix, dans le silence. Il s’apprêtait à ajouter que sa raison devait être largement valable pour venir le perturber ainsi, qu’ils aient retrouvé sa mère ou qu’il y ait un mort ou presque, mais il s’abstint en l’observant plus en détails. Marie n’était pas vêtue de son habituelle tenue de garde royale. Elle était en nuisette. Un demi-sourire supplanta à son air renfrogné et ses yeux brillèrent d’étonnement autant que sa voix prit une inflexion presque enjôleuse. « Eh bien, je savais que mon simple nom pouvait faire des ravages chez ces dames, mais je n’imaginais pas que vous soyez de ce genre. »
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FORT FORT LOINTAIN

Marie Lopaline
LADY, LADY OSCAR

Marie Lopaline

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⊱ pseudonyme : songbird
⊱ tête mise à prix : jessica de gouw
⊱ crédits : caf-pow. (ava)
⊱ arrivé(e) le : 13/09/2014
⊱ manuscrits : 474

⊱ tes licornes : princesse shéhérazade, beasthélemy, cúchulainn le maudit.
⊱ schillings : 438

⊱ ton conte : le prince casse-noisette et le roi souris
⊱ ta race : humaine, dieu merci.
⊱ métier : capitaine dans la garde royale, à fort fort lointain.
⊱ tes armes : une épée à la taille, une arbalète à la main. plus récemment, une arme à feu.
⊱ allégeance : pour, bien entendu.

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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptySam 21 Fév - 22:57



Charmant, Marie
La modestie, c'est de l'arrogance déguisée.

Les songes de Marie s'emparaient déjà de son esprit tout entier – c'étaient des silhouettes, des voix, des mélodies. Elle s'imaginait reine d'un royaume enneigé ou dirigeante d'une armée parfaite; aussi gracieuse qu'une princesse et dure qu'une marâtre. Pour sûr, Marie aimait se rêver plus haut qu'elle ne serait jamais – les parures de diamant lui allaient à merveille mais aucune tenue ne lui convenait plus longtemps si elle ne lui permettait pas de courir, de sauter, d'aller et venir sans gêne ni problème. Elle était parfois guerrière venue du fond des forêts, et parfois même elle n'était personne. Ses rêves étaient les royaumes de nouvelles couleurs et de senteurs enivrantes, de savants mélanges de noisette et de vanille, de fraise et de banane, parfois de choses qu'elle n'a même jamais senti. C'était rouge, c'était bleu, des arbres roses et de l'herbe pourpre, un ciel sans nuage et des étoiles infiniment grandes pour peupler le ciel le plus beau qu'elle ait jamais vu. Chaque réveil était une désillusion d'une nouvelle sorte; le mal de crâne après avoir trop bu. Mais elle ne s'était pas encore endormie.
La journée avait été longue, horriblement longue. La garde royale, aux vues des événements, se déployait d'autant plus aux quatre coins de la ville. Mais les circonstances actuelles faisaient que la priorité de Marie était en Dragée; il y avait suffisamment d'hommes dans le reste de la ville, sans compter les chevaliers-flics déjà présents en temps normaux. Elle restait alors aux côtés de la duchesse, que ce soit dans son temps libre ou des réunions importantes. Marie était là pour toutes les décisions, chaque instant, repas, respiration. Elle partageait les moindres secrets de la monarchie Fort Fort Lointaine, n'hésitant pas à émettre un avis quand la duchesse le demandait, en faisant l'effort d'adoucir ses jugements. Chaque matin, avant le réveil de ces royautés, Marie se levait aux aurores pour un entraînement dans la cour, comme ça a toujours été le cas, puis elle attendait dans le grand salon que la Dame s'éveille. Ça n'était pas une vie dure, pas même compliquée, mais Marie s'ennuyait quelque peu de ce quotidien routinier. Était-ce vraiment ce à quoi elle aspirait ? Dragée comptait bien évidemment dans les personnes qu'elle respectait le plus au monde, et la manière de penser ainsi que les obligations professionnelles de la Capitaine faisaient qu'elle aurait tué père et mère pour la protéger. Mais si le danger pouvait frapper à tout instant, il était possible que rien n'arrive, jamais, et chaque journée passée à protéger Plumosucre, aussi délicieuse soit-elle, était une journée de plus qu'elle ne passait pas à autre chose. C'était terne, ses journées, c'était morne et même mort sans trop l'être. Les robes et les parures des femmes de la cour ainsi que les belles toilettes des hommes les plus hauts placés occupaient le regard de Marie quelques instants, mais l'ennui était son plus fidèle compagnon. Chaque fin de journée, elle se heurtait douloureusement à la même conclusion, déprimante : ça n'était pas ce à quoi elle aspirait. Marie voulait courir, chevaucher, galoper, elle voulait défendre, oui, mais ce qui devait être défendu. Elle n'avait pas pu empêcher la bombe d'être placée et n'avait pour ainsi dire servi à rien depuis.
Pourtant, elle restait là, sans jamais faire défaut à Dragée. Elles étaient amies, après tout, et personne n'abandonne ses amis à moins d'avoir un minuscule cœur en échardes de bois. Mais aujourd'hui, elle avait eu interdiction d'entrer dans la suite de la duchesse et princesse. Ses pas avaient été stoppés devant la double porte en bois blanc, avant même d'avoir pu tourner les poignées d'or. « La duchesse est malade et refuse la visite de quiconque. » Elle avait eu beau insister, Marie n'avait rien pu tirer de cette porte close refusant de lui faire la conversation. Ainsi avait-elle passé la journée dans la cour du château, à s'entraîner sans trop s'éloigner. Elle avait croisé le fer en compagnie de différents adversaires, toujours aucune femme mais l'idée faisait son bout de chemin dans les esprits de certaines, à ce qu'elle avait entendu dire. De l'aube au coucher du soleil, Marie avait attaqué, armée de sa plus belle lame. Mais l'orangé du crépuscule avait forcé les soldats restants à rentrer un par un chez eux, à consigner la capitaine dans la chambre la plus proche de celle de la duchesse. Elle était ainsi logée dans le plus haut étage de la plus haute chambre du château, occupant la chambre du fond, à côté de celle de Dragée, elle-même à côté de la suite princière du nouveau Roi. Mais comme si l'ennui n'était pas suffisant, un malheur n'arrive jamais seul – que serait une vie sans surprise ni difficulté ?
Ses pieds tapotaient doucement la moquette à motifs blanc cassé, prête à s'abandonner aux bras de Morphée. Ses cheveux étaient déjà coiffés, bien qu'humides, et tressés en une natte parfaite dévalant son épaule; sa nuisette pourpre était parfaitement repassée par elle ne savait quelle domestique qui l'avait par la suite remise dans la salle de bain privative de sa suite royalement équipée. Les draps de soie délicatement écartés, Marie s'était glissé dans un lit beaucoup trop grand pour une personne seule. Mais encore une fois, quelque chose n'allait pas. Sa main passa encore et encore sur les draps, étonnamment humides. Mais elle n'était pas entré dans la chambre depuis le matin même, et n'avait rien remarqué de tel; de plus, la chambre se trouvait dans l'un des plus hauts étages, accessible à si peu de gens qu'il était impossible de penser que quelqu'un y était venu dormir, en profitant pour baver sur la soie blanche. Ça ne pouvait pas être un millier de choses, après tout. Mais Marie était du genre curieuse. Elle attrapa la grande chaise posée devant son petit secrétaire, et la fixa comme elle le pouvait sur le lit, grimpant dessus épée en mains. Elle n'eut qu'à tapoter le plafond de sa suite du bout de la lame, et tout juste le temps d'atterrir à terre avant qu'un torrent d'eau ne s'échappe à l'intérieur, sur son lit et tout le reste. Fort heureusement, elle avait fui jusqu'à la porte, ne pouvant que constater stupéfaite que ses affaires étaient hors de portée, et surtout, son lit inutilisable en l'état. Un long soupir clôt son malheur, et elle s'échappa de la chambre sinistrée, sans autre choix.
Elle pensa un instant à frapper à la chambre de Dragée, mais si la duchesse peut être gracieuse comme une.. chose avec grâce, elle peut aussi être la pire des fées qui soit, bien devant Marraine dont tout le monde se plaint sans cesse. Sa position obligeait cependant la capitaine à occuper une des chambres les plus proches de la sienne; elle frappa sans plus réfléchir à la porte du nouveau Roi, aussi ridicule que ça puisse être, qui ronchonnait déjà de l'autre côté de la porte. Ah, dame Lopaline. Que me vaut le plaisir de votre visite ? Tu parles d'un honneur. Elle s'apprêtait à parler, mais l'attitude mielleuse de Charmant lui fit hausser un surprise, bien surprise qu'un homme de son rang se permette encore ce genre de regard. Eh bien, je savais que mon simple nom pouvait faire des ravages chez ces dames, mais je n’imaginais pas que vous soyez de ce genre. Elle fronça les sourcils, tant outrée qu'amusée de la situation exceptionnellement étrange dans laquelle ils étaient. Elle tira doucement sur sa tenue, essayant vivement de la raccourcir sans succès – mais ne manqua pas de dévoiler son épée, des fois qu'il ait décidé d'amener ses propos plus loin encore. Pour un Roi que l'on dit préoccupé, vous me semblez dormir bien paisiblement. Elle observa avec attention son pyjama royal, certaine qu'il ferait retomber les ardeurs de bien des prétendantes à la place de Reine. Pardonnez-moi de vous décevoir, mon bon Seigneur, mais il ne s'agit que d'une inondation nocturne qui m'oblige à vous déranger. Ses paroles accompagnées d'une révérence, Marie se permit d'avancer d'un pas face à Charmant. Excusez également la manière dont je m'impose, mais je n'ai pas d'autre choix que de dormir dans votre suite, la mienne étant inutilisable. Je n'ai d'autre choix que de rester au plus près de votre fiancée, qui bien mal en point refuse de laisser entrer quiconque. Affichant un sourire suffisant, Marie entra sans demander son avis au blond mal brushingé, puisqu'il n'y avait pas à discuter – aucun autre choix n'était envisageable. Le protocole voudrait qu'une femme n'entre pas dans les appartements d'un homme fiancé, mais vous comprendrez bien que je n'en suis pas plus enchantée que vous. Je suis également certaine que l'immense bonté que l'on vous conte à travers le monde ne laisserait pas dormir une jeune femme à même le sol, me tromperais-je ? Un rire s'élevant doucement dans les airs, Marie secoua rapidement la tête, pas même sérieuse pour deux sous. Si le Roi n'avait pas le choix de la laisser occuper les lieux et n'était fiancé qu'officiellement, il avait toujours parfaitement le pouvoir de décider du sort de sa nuit à venir.
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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptyLun 23 Fév - 19:44


marie & charmant
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« Pour un Roi que l'on dit préoccupé, vous me semblez dormir bien paisiblement. » Une parure de boucles brunes sur une épaule lascivement découverte, de la soie de purpurine en voile sur son teint de lait, des yeux bleus comme les plus profonds océans et une voix aux notes sucrées. Elle avait presque l’apparat d'une grande reine, la dame Lopaline, s'il n'y avait eu l'épée qu'elle affichait avec ce même regard de fierté quotidienne. Une princesse guerrière, alors. Une amazone moderne, qui troquait les flèches contre les mots. Charmant lui sourit par principe, l'esprit trop embrumé pour lui servir la moindre autre expression décente. « A chaque jour suffit sa peine, et à cela je répondrais que chacun mérite un temps de repos. » Il haussa les sourcils, appuyant le dernier mot, pour tenter une dernière croisade, vaine et terrible, contre l'envahisseur stagnant à ses portes. Si seulement tous les ennemis du royaume avait un minois si délicat, les traités de paix seraient bien plus nombreux et durables. L'image d'Attilanoüs, vieil empereur déchu de contrées plus lointaines encore que Saay, au visage taillé à la serpe et à l'odeur corporelle tout à fait proche de celle d'un jeune bouquetin ayant vécu sa vie entière dans une falaise de boue et de lisier, s'imposa à ses pensées et le roi mima une expression de dégoût involontaire. D'ordinaire, il réussissait avec plus de brio l'exercice d'un contrôle solide sur les pensées qui lui traversaient l'esprit. C'était d’ailleurs un atout bien souvent indispensable lors de ces conversations mondaines où mieux valait dire ce que l'on voulait qu'on entende de vous plutôt que ce que votre conscience formatait dans les recoins de votre crâne. Mais, il fallait bien l'avouer, l'âme est un fauve impitoyable, piégé dans une cage de chair et de sang, implorant les autres de lui ouvrir la porte de leur cœur. Souvent encore, elle est un navire imposant dont la manœuvre nécessite prudence et fortune. Et Charmant se plaisait à croire qu'il maîtrisait plutôt bien cette discipline élitiste. Jusqu'à tout récemment. Un mécanisme, quelques rouages s'étaient fragilisés, brisés sous le poids du silence et d'émotions trop longtemps conservées. Elles exerçaient une pression continue sur ses entrailles, lui laissaient ce goût de cendres pareil aux matins de gueule de bois dans le fond de la gorge. Elles déchiraient son palpitant chaque soir un peu plus ; et chaque matin, il attendait que les rayons du Soleil viennent caresser sa peau et cautériser ces plaies, quitte à user de prothèses de faux-semblants pour ne plus souffrir avec autant d'ardeur. Mais on éteignait pas si simplement le feu du conflit et ses braises constamment ranimées par d'autres nouvelles, d'autres rumeurs, d'autres critiques. « Pardonnez-moi de vous décevoir, mon bon Seigneur, mais il ne s'agit que d'une inondation nocturne qui m'oblige à vous déranger. » Le bon Seigneur en question céda le sourire à la mine interloquée. Il devrait en avertir le haut bâtisseur, le toit devait sans doute fuiter. « Excusez également la manière dont je m'impose, mais je n'ai pas d'autre choix que de dormir dans votre suite, la mienne étant inutilisable. Je n'ai d'autre choix que de rester au plus près de votre fiancée, qui, bien mal en point, refuse de laisser entrer quiconque. » Charmant s'apprêtait à lever un index en signe de contestation mais la capitaine ne lui en laissa pas le temps, se précipitant déjà à l'intérieur de sa suite. Trop long à la détente pour l'en empêcher. Le roi se sentait perdu. Mais une certaine forme de beauté pouvait transparaître dans le fait de se perdre. Parfois, il était nécessaire de se perdre, pour se retrouver. De s'effacer, de s'oublier pour mieux s'accepter et embrasser sa destinée, aussi funeste soit-elle. Durant ces jours, et tous les dieux savaient combien il en avait ainsi vécu, il était incapable de couper court à l'origine de cette dérive et encore moins de la contrôler. Il attendait alors que le mal passe et que le nœud dans sa gorge redescende de quelques étages. Il restait debout, sur le perron de sa vie à regarder en arrière et à conserver plus de pire que de meilleur. Souvent, le moindre geste d'autrui, la moindre parole suffisait à ramener l'apatride cardiaque dans sa réalité, et à lui apprendre à se laisser porter par le premier vent venu. Mais le vide qui l'enveloppait depuis quelques temps, ce brouillard qui lui nimbait la vue et la raison, ne semblaient prêts à s'estomper de si tôt. Et une mélodie accompagnée de son refrain, rire mielleux, le tira finalement de ce flot noir de pensées entremêlées. « Le protocole voudrait qu'une femme n'entre pas dans les appartements d'un homme fiancé, mais vous comprendrez bien que je n'en suis pas plus enchantée que vous. Je suis également certaine que l'immense bonté que l'on vous conte à travers le monde ne laisserait pas dormir une jeune femme à même le sol, me tromperais-je ? » Finalement repenti de son naufrage neural, le chevalier soupira sa fatigue avant de rebrousser chemin et de clore la porte vernie de sa suite. Il s'approcha à pas lent de la desserte disposée dans un recoin de la pièce, aligna une plume avec son encrier. Il releva les yeux et leurs prunelles se croisèrent, fusion de l'eau et de la terre. Il concéda alors, un demi-sourire las sur le visage, « Soit, vous n'avez pas tort. Et si cette générosité si grande qu'on m'attribue vous ait si bien connue, alors faites, occupez le lit ; je me chargerais du sol. » Redoutable ennemi de pierres grisées par le temps et l'usure des pantoufles, couvert de diverses couches de tapis aux origines multiples, il ne pouvait être si inconfortable que cela, en définitive. Et il avait connu des couches moins riches encore durant des quêtes qui lui avaient alors semblé éternelles et inachevées. Enfin, son code d'honneur bien ancré dans ses racines les plus profondes, il ne lui paraissait effectivement pas décent d'abandonner pareille demoiselle à sa détresse tardive. Il se servit une coupe de vin et en tendit une seconde, présentement vide, à sa colocataire nocturne, l'interrogeant du regard. Il porta ensuite l’élixir à ses lèvres et avala une gorgée amère. Il fallait compensation à son sommeil éveillé. « J'espère que votre journée n'a pas été trop éreintante ? Selon Dragée, passer la nuit à mes côtés n'est pas chose simple, je ronfle trop fort, semble-t-il. » Un air d'incompréhension feinte, mêlé aux notes auto-dérisoires de sa voix, passa sur visage, étonnamment plus détendu. Dos à son interlocutrice, Charmant fixait le grand vitrail qui donnait sur le balcon, et sous lequel s'étendait un royaume encore bien animé pour une nuit si sombre. Même dans la seule lueur des chandeliers et de l'âtre, il reconnaissait les contours et reliefs de sa si chère capitale. Il apercevait les dômes des églises, les toitures biscornues et inégales de Ragtown, plus à l'Ouest, les villas ensommeillés de Rollywood. Et droit devant ses iris, la ligne verte de l'horizon qui surplombait le port et les marées calmes. Que ce devait être bon de n'avoir que sa propre vie à gérer, sa propre aventure à bâtir et mener. « Votre occupation en tant que garde personnelle ne vous est-elle pas parfois trop routinière ? » Il coula un nouveau regard sur la combattante. Sans jamais oser l'admettre de vive voix, il avait toujours pris Marie en admiration pour sa bravoure et sa fougue. Il n'avait aperçut que  très rarement des femmes s'engageant ainsi pour la justice et la guerre et ne pouvait que d'autant plus apprécier ce goût chevaleresque qui leur était commun. Mais à l'observer ainsi, dans la pénombre dominante, il en venait à se demander si c'était véritablement la seule chose qu'ils partageaient.
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Marie Lopaline
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⊱ pseudonyme : songbird
⊱ tête mise à prix : jessica de gouw
⊱ crédits : caf-pow. (ava)
⊱ arrivé(e) le : 13/09/2014
⊱ manuscrits : 474

⊱ tes licornes : princesse shéhérazade, beasthélemy, cúchulainn le maudit.
⊱ schillings : 438

⊱ ton conte : le prince casse-noisette et le roi souris
⊱ ta race : humaine, dieu merci.
⊱ métier : capitaine dans la garde royale, à fort fort lointain.
⊱ tes armes : une épée à la taille, une arbalète à la main. plus récemment, une arme à feu.
⊱ allégeance : pour, bien entendu.

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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptyDim 22 Mar - 0:14



Charmant, Marie
La modestie, c'est de l'arrogance déguisée.

Charmant était d'une délicatesse inouïe, bien plus qu'elle n'aurait jamais pu l'imaginer. Il avait certes la prestance et l'assurance d'un prince – voire d'un roi –, mais sa présence avait jusque là toujours arraché à Marie une grimace insatisfaite. Bien loin de renier son caractère bien fait, la capitaine ne s'était jamais gênée pour donner son avis, lorsqu'elle y était invitée, à son Altesse. Elle restait bien droite, les mains vissées dans le dos derrière Dragée, observant tout ce qu'il se passait. Elle savait tout ou presque, tant de la vie de Dragée que de celle du Roi – et de leur vie conjugale inexistante. Si vraiment Marie en venait à se retourner contre la Royauté, celle-ci se prendrait une sacrée taloche dans la gencive. Mais elle ne dirait rien, et ils le savaient. Peut-être qu'ils ne s'en souciaient même pas, à vrai dire. Elle n'avait jamais eu de réelle conversation avec le Roi. Ils avaient échangé quelques mots, plus par force et politesse que par réel intérêt, et elle n'était qu'à moitié sûre qu'il l'ait déjà regardée dans les yeux jusqu'à récemment. Il avait probablement écorché le nom de Marie jusqu'à son couronnement, jusqu'à ce qu'elle vienne lui vouer allégeance, allant à contre-courant dans la masse de soldats. Jusqu'à ce qu'elle jure de se laisser trancher la gorge pourvu que lui y survive. Il avait toujours été clair pour Marie qu'elle le ferait, que n'importe quelle Royauté vaudrait mieux que sa vie, et qu'elle s'assurerait qu'il en reste ainsi. Mais c'était spécial, cette fois-là. Mourir pour les dirigeants, tous les chevaliers l'avaient juré. Marie n'avait pas une nouvelle fois juré à la Royauté, mais remit sa vie entre les mains de Charmant. Qu'il reste Prince ou devienne cuisinier.
Note : dans ce dernier cas, elle refuserait tout de même de goûter les plats en premier. Elle était chevalière, mais pas suicidaire.
Le sourire feint du Roi lui arracha un soupir silencieux, presque déçue qu'il se force encore. Elle le dérangeait en pleine nuit, mais ne s'attendait pas à ce qu'il agisse en pleine journée. La capitaine aurait été la première à râler et repartir s'allonger dans le lit, jambes et bras écartés comme une étoile de mer pour empêcher quiconque d'occuper la place à ses côtés. Elle se serait attendue à ce qu'il fronce les sourcils et prenne une voix mal réveillée pour lui dire de déguerpir et d'aller camper devant la porte de Dragée, histoire d'être encore plus près de sa Sainte Colique. Ses yeux trop pâles détaillèrent le visage fatigué du Roi, inquiété, presque malade. Aussi surprenant que ça puisse être, elle le plaignait, réellement. Charmant avait toujours eu des envies de grandeur et des tendances mégalomanes, mais le voir dans un tel état lui faisait de la peine. Il avait l'air d'être cet ours en peluche qu'on aime tellement qu'on l'amène partout, le secoue partout, court avec et le jette en gueulant mamaaaaan monsieur nounours il a perdu un œil, moi j'en ai marre il est trop nul, et que oui mais ma chérie, il ne fallait pas tirer dessus, et finalement c'était une preuve d'amour, tu comprends pas, l'autre jour j'ai entendu tonton dire que quand il a tiré martine c'était pour lui prouver son amour, et que ça part en pleurs et divorces. Mais nous nous égarons. À la place, Charmant aurait du se sentir être le plus bel ourson de la collection, celui qu'on garde avec soi quand on a peur et pour faire le beau devant les copains. C'était donc ça, de réaliser ses rêves ? D'atteindre ses buts ? Le teint livide et les poches sous les yeux, c'était obligé ?
S'avançant jusqu'au lit, aux commodes et aux miroirs, Marie sentait ses neurones bouillonner. Soit, vous n'avez pas tort. Et si cette générosité si grande qu'on m'attribue vous ait si bien connue, alors faites, occupez le lit ; je me chargerais du sol. Elle tourna vivement la tête, faisant tomber quelques mèches délicatement bouclées dans son dos. Oh, il avait pour sûr déjà vécu pire situation, mais la Capitaine se surprenait à presque s'en vouloir de lui imposer une telle nuit. Ses sourcils se haussèrent sous le coup de la surprise, alors qu'elle se rapprochait de lui, prête à répliquer. Il la prit cependant de court, lui tendant un verre à vin qu'il remplit, emportant le sien jusqu'à l'immense vitrail. Avalant une gorgée du bout des lèvres – doux Seigneur, quelle idée de mettre de l'alcool entre ses mains, cette nuit finirait mal, c'était maintenant presque certain –, elle se mouva en silence jusqu'au lit pour y poser son arme, avant d'aller se poster entre le vitrail et le Roi. Il était trop grand pour qu'elle puisse voir quoi que ce soit par-dessus son épaule, mais n'aurait raté ce spectacle pour rien au monde.
Une telle vue n'est pas offerte à n'importe qui, et même elle n'en a pas une aussi impressionnante depuis sa chambre – ou peut-être a-t-elle oublié de vérifier, elle n'est plus sûre. Les toitures colorées, les murs mal peints, les lanternes agitées de quelques gamins et des taxis-calèches à travers la brume nocturne, la lune qui se reflétait sur l'océan avec une délicatesse presque magique. Un sourire étirait ses lippes avant d'avaler une seconde gorgée, osant tout juste cligner des yeux de peur qu'un tel paysage ne se dérobe à la moindre occasion. Pendant un instant, il lui sembla même qu'il lui était possible d'apercevoir les côtes d'autres contrées qu'elle n'avait jamais visitées, mais ça n'était probablement qu'une illusion et un peu trop de rêves. J'espère que votre journée n'a pas été trop éreintante ? Selon Dragée, passer la nuit à mes côtés n'est pas chose simple, je ronfle trop fort, semble-t-il. Ses yeux ne se décollaient pas du paysage, étouffant un rire aux paroles de Charmant. Elle aurait voulu lui dire qu'elle l'entendait régulièrement jusque dans sa suite, à deux chambres de là, mais se retint au cas où l'envie lui prendrait de la foutre dehors. Le verre vide, Marie bougea du vitrail jusqu'à la bouteille, remplissant à nouveau son verre. Elle tenait l'alcool sans problèmes, mais pas bien longtemps. Votre occupation en tant que garde personnelle ne vous est-elle pas parfois trop routinière ? Sa gorgée de vin se coinça presque tant elle ne s'attendait pas à une telle question. Est-il réellement capable de parler d'autres choses que de shampoings et de masques capillaires ? La voilà surprise, dans le bon sens du terme.
Le bout de ses doigts caressait avec délicatesse les contours des meubles, s'attardant sur les moindres détails, n'en oubliant pas un seul morceau. Son autre main faisait tourner le liquide rougeâtre dans le cristal, donnant à la capitaine un air presque expert en vins. Vu le nombre de bouteilles qu'elle avait descendu dans sa vie, c'était une façon de voir les choses largement acceptable. Le bois des commodes lui semblait être le plus noble qu'elle ait jamais touché, alors que les tapis superposés avec goût au sol lui donnaient l'impression de voguer sur des nuages. C'était comme mourir de douceur à chaque pas, geste, respiration – l'odeur était fleurie tant que fruitée et lui rappelait une enfance qu'on lui donnait envie d'avoir dans les pubs, les soirs où elle se décide à allumer son miroir. Eh bien, je ne m'attendais pas à si peu de réticence de la part d'un Roi. Seriez-vous malade votre majesté, ou avez-vous seulement l'espoir que je sois tant choquée que j'en oublie la taille de vos cernes ? Un petit sourire redressa ses lèvres, avant de prendre une nouvelle gorgée de vin, le laissant couler doucement dans sa gorge. Le lac gelé de ses yeux alla transpercer Charmant de part en part, ne lui laissant aucune chance de survie. Malgré sa mine amusée, Marie demeurait sérieuse quant à l'état de leur dirigeant. Il était hors de question qu'il dorme parterre en de telles circonstances, et elle était bien décidée à trouver un terrain d'entente. J'espère que vous aurez la décence de vous contrôler dans votre inconscient dans ce cas. Si vous ronflez, elle s'approcha tout doucement, à pas de louve, venir murmurer à son oreille, je peux toujours frapper. Un petit rire lui échappa alors qu'une de ses mèches brunes tombait comme une plume sur l'épaule royale au-dessus de laquelle elle avait passé la tête. Elle n'y resta pas plus d'un instant, mais s'efforça de photographier mentalement l'image d'un roi plus perturbé qu'elle n'en a jamais vu. Retombant sur les pieds le moment suivant, Marie finit son verre, soupirant. Restant dans le dos du roi, elle finit par se poser comme une fleur sur le bord du lit, manquant de glisser sur les draps en satin. Y a-t-il une occupation qui ne soit pas routinière, ici ? Un sourire presque déçu étirait ses lippes, les yeux perdus dans le vide. Je n'ai pas voulu recevoir le titre de chevalier pour rester enfermée à veiller jour et nuit sur une personne royale. Je serais bien plus à l'aise à protéger un prince ou un roi au combat, mais les choses n'arrivent pas toujours comme on le voudrait. Le lit grinça doucement, et la capitaine s'amusait innocemment à balancer ses jambes d'avant en arrière dans le vide. Je ne remercierai jamais suffisamment damoiselle Plumosucre de m'avoir fait confiance, mais j'avoue rêver secrètement d'autre chose.. de combats, d'action, de danger. D'une voix un peu plus basse et absente, elle rajouta : Je ne sais pas si ce que je fais me correspond encore. Mais je le fais, tant qu'on ne me demande pas ce que je veux. Son regard se leva à nouveau, porté sur le roi de dos, que la l'éclat de la lune rendait presque mystérieux. Puis-je vous demander pourquoi de tels questionnements vous viennent-ils à l'esprit ? Auriez-vous peur de vous ennuyer de vos nouvelles fonctions, votre Altesse ?
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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptyVen 3 Avr - 20:02


marie et charmant


leave me to dream.

L’élixir de sang coulait le long de sa gorge, déployant ses saveurs oniriques le long de sa glotte jusqu'au bout de son œsophage. Le cœur chaud du breuvage réveillait ses sens, engourdis par une succession de nuits trop fades et trop noires ; l'arrière-parfum plus sucré titillait ses narines d'autant de délices que son esprit divaguait lentement, laissant ses yeux couler sur le paysage qui se déroulait en bas de sa haute tour ; terre promise, prison dorée. Il avait besoin de s'enivrer encore, de boire à grande goulée l'air frais et le nectar automnal, de s'ancrer dans le présent, avant de trop sombrer dans le passé. Alors il regardait les ombres défiler sur les pavés d'argent lunaire. Il observait, au loin, des fantômes instable et flou se fondre dans la masse, sortir, rentrer, se mouvoir dans l'obscurité tombante avant de regagner les quelques points baigné de lumière qui éclatait, ça-et-là, au rythme des chandeliers embrasés. Fort Fort Lointain, c'était le nid qu'il n'avait jamais vraiment quitté, le terrier dans lequel il finissait toujours par se réfugier, c'était le début et c'était la fin ; c'était le centre du cercle, le point de non-retour d'un chemin qu'il s'était risqué à prendre, sans trop comprendre, sans trop penser, juste en rêvant. Il partait, les mains agrippées à l'échine de sa monture, et voyait les courbes de la ville derrière ses yeux. Mais maintenant, derrière ses paupière, il entrevoyait ce monde qu'il aurait pu explorer sans cesse, sans appréhension, sans retenue. Des déserts ardent, se déroulant comme une vague d'or et d'ocre sous le poids de l'astre stellaire, bombant son torse de sable et de poussière d'étoiles ; les déferlantes vigoureuses qui frappaient les rocs et les falaises d'îles austères aux nom imprononçables et aux tons de gris ; aux montagnes de blanc immaculé, aux pentes ardues et aux descentes lacérées. A l'adrénaline, son seul moteur, qui pulsait son nœud cardiaque comme rien d'autre ; qui dopait les entrelacs bleutés de ses veines, qui faisait naître la crainte et le désir d'entre ses organes, comme un geyser explosif qui lui retournait les entrailles. Parce qu'au fond -en dehors du mot « chevelure »- Charmant, il avait rien d'autres que trois mots d'ordre. Honneur, famille et chevalerie. « J'espère que vous aurez la décence de vous contrôler dans votre inconscient dans ce cas. Si vous ronflez, je peux toujours frapper. » La voix douce l'attira à la réalité et l'inflexion nordique le poussa à émettre un rire bref mais sincère, un éclat de voix qui n'avait pas retenti à ses propres tympans depuis trop longtemps, lui semblait-il. « Je ne doute nullement de votre capacité à me contraindre au silence, capitaine. » Une poignée de boucles brunes chatouillèrent sa nuque, et, dans le reflet du vitrail, il pouvait apercevoir la silhouette féline se retirer délicatement de son perchoir charnel, alors que le roi détournait le regard. Honneur. « Y a-t-il une occupation qui ne soit pas routinière, ici ?  » Il avait perçut le son des draps froissés plus qu'il n'avait remarquer que la garde s'en était retournée au lit, où elle avait précédemment posée son arme si fière, meilleure allié de sa survie, sans doute. C'était une chose que Charmant pouvait comprendre ; l'on ne se rend compte à quel point on s'attache aux choses, avant de soi-même le vivre. Les enfants ne représentent que peu à qui n'en a pas ; les animaux sont simplement des sous-genre trop peu civilisés aux yeux de qui ne les chéris pas ; les lames ne sont que de simples bouts de métal selon qui ne sait pas les manier. Elles sont bien plus ; elles sont extension des mains, des mânes. Un chevalier digne se rappelle de sa première épée comme de sa première bataille livrée. Accessoire qui paraît superflu ou mensonger aux hanches de beaucoup de beau-parleurs, mais qui, bien portée, équilibrée, de fer étincelant et à la poignée filée, s’avérait être meilleure coéquipière que le plus doué des écuyers ne serait jamais. Une épée était plus, elle était famille. « Je n'ai pas voulu recevoir le titre de chevalier pour rester enfermée à veiller jour et nuit sur une personne royale. Je serais bien plus à l'aise à protéger un prince ou un roi au combat, mais les choses n'arrivent pas toujours comme on le voudrait. » Toujours dos à Marie, ses lèvres se pincèrent en un rictus navré, alors qu'il fermait les yeux, plongeant à demi dans son deuxième univers de parade et de faux. Parce que le faux sonne doux aux oreilles, mélodie joignant allégresse et légèreté du coton. Beaucoup plus supportable que l'affreuse réalité, aussi enjolivée et dorée semblait-elle. Il n'y avait pas que les pauvres, qui se lamentaient de leur conditions. Des hommes étaient des hommes ; c'était dans leur instinct primaire, dans leur nature même, de n'être jamais tout à fait heureux de ce qu'ils ont. « Je ne remercierai jamais suffisamment damoiselle Plumosucre de m'avoir fait confiance, mais j'avoue rêver secrètement d'autre chose.. de combats, d'action, de danger. Je ne sais pas si ce que je fais me correspond encore. Mais je le fais, tant qu'on ne me demande pas ce que je veux. » Et les mots résonnaient étrangement familiers à ses oreilles ; une ritournelle bien trop connue de sa raison et de son cœur. Le roi s'était retourné, observait la dame de ses pupilles de bronze, tentant de percer son teint diaphane, pour en découvrir un peu plus sur celle qui se cachait derrière l'armure. « Puis-je vous demander pourquoi de tels questionnements vous viennent-ils à l'esprit ? Auriez-vous peur de vous ennuyer de vos nouvelles fonctions, votre Altesse ? » Savait-elle seulement à quel point sa logique était bonne ? Chevalerie. Dernier et pas des moindres, des mantras qui se faisaient arbitre de ses décisions, des tournants de son existence, l'un des fil intercesseur entre le pantin désarticulé qu'il était et la providence qui dictait sa destinée. Loi qui érigeait les battements de son palpitant, qui donnait le pas aux inspirations. Foi, qu'il s'appliquait à mettre en œuvre au possible. Il n'était pas né chevalier. Il était né enfant-rêve, enfant-loup, enfant-murmure, enfant-perdu. Il était enfant et n'était jamais devenu homme qu'après le premier duel remporté. Sa mère l'avait élevé dans la sécurité et l'amour maternel, lui avait appris à haïr et à chercher vengeance auprès de ceux qui destituent, qui volent, qui l'ont volé. Sa fin heureuse, celle qu'il aurait dû obtenir dès sa naissance, sous une couronne de laurier, lové dans un couffin de futur duc. Mais, sa chère fée de mère lui avait bien appris, lui avait bien fait comprendre. La vie n'est pas juste avec tous. Ce n'était la mort qui lui avait enlevé un père, c'était la vie. Et il s'était battu pour vivre, il s'était battu avec lui-même. Piégé entre la justice pour soi et celle pour tous. Elle avait pas un mauvais fond, l'égérie pour shampoings. Juste une paire pas assez imposante pour pouvoir affirmer clairement ses choix et ses opinions devant une génitrice despote mais aimante. Combattre pour protéger les causes justes, les faibles et tous ceux incapables de se défendre eux-mêmes. Garant des libertés et des valeurs comme le courage, la probité, la patience et la hardiesse. Étalon au panache blanc des cours, lion sauvage des joutes. Il était homme sans vraiment l'être, un marin perdu en mers, incapable de trouver l'étoile guide du nord, un marcheur qui ne savait plus suivre son soleil, un roi qui n'en valait pas la peine. « Cela doit paraître bien absurde et d'autant plus risible. Le nouveau roi, l'usurpateur, le traître qui a coulé les précédents régents dans l'oubli,  qui a noyé le royaume en moins d'un an, qui a ruiné plus de vies qu'il ne peut en compter. Celui-là même qui a tout fait pour accéder au trône et briser la limite entre ses rêves et la réalité ; celui-là même qui se lasse trop vite de sa condition pourtant si gratifiante et enviable. » Charmant accompagnait ses paroles de gestes amples et de touches d'inflexion ironique, acide. Honneur, famille et chevalerie ? Dans le cas présent, il se sentait plutôt malfrat, escroc et impuni. Bien sûr, son arrogance royale de naissance, les mouvements de sa crinière blonde et son sourire ravageur lui avait assuré beaucoup d'alliés dans son accession brutale ; sa mère s'était souciée bien assez longtemps de son image et de son influence au sein de la capitale. Mais il ne pouvait sans cesse garder les yeux fermés sur le monde qui l'entourait et la déchéance vers laquelle il menait peu à peu ce navire débordant. Gouverner n'était pas simple, être soi-même juge et jugé, encore moins. « Je défie quiconque de penser qu'être souverain est une tâche simple, donnée à tous. Mais je blâmerais d'autant plus celui qui ne sait pas, qu'une fois qu'on a tout gagné, on a plus rien à attendre, à espérer. » Il avait le palais et ses marches de marbre blanc, il avait le pouvoir et l'argent, il avait le titre et la couronne. Mais en gagnant ceci, il avait perdu quelque chose de plus important encore. Un but. Un fil conducteur. Alors il partageait plus que quiconque les sentiments nuancés de Marie, quant à sa condition de capitaine et garde. Le peuple s'imaginait de ces conditions une myriades d'aventures et de mirages où aucun jour n'est semblable au lendemain. Mais ils en oublient de posséder quelque chose qu'on ôte bien trop souvent, sans pour autant véritablement s'en rendre compte. La liberté. « Je ne dis pas que la qualité de régent ne me convient pas ; elle est simplement... » Il poussa un soupire, à la recherche de l'expression politiquement correcte pour ce genre d'aveu. « Insuffisante. » Il coula un regard en direction de Marie et sa cascade de boucles brunes, retombant sur la soie pourpre de son vêtement. Quelle image indigne devait transparaître à ses yeux. « Je n'entends pas par là que j'ai quoi que ce soit à reprocher à ma vie, sur le plan quantitatif, en tous cas. Mais, la réalité n'est pas aussi brillante et merveilleuse que le rêve le laissait miroiter. Il manque toujours ces palpitations quotidiennes, cette envie de partir au pas de course, ces raisons de se battre, pour quelqu'un, pour quelque chose, pour tout et n'importe quoi. » Il se persuadait lui-même, peu à peu, que l'ennui pouvait s'avérer plus mortel qu'une lance fichée en pleine poitrine.
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Marie Lopaline
LADY, LADY OSCAR

Marie Lopaline

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⊱ pseudonyme : songbird
⊱ tête mise à prix : jessica de gouw
⊱ crédits : caf-pow. (ava)
⊱ arrivé(e) le : 13/09/2014
⊱ manuscrits : 474

⊱ tes licornes : princesse shéhérazade, beasthélemy, cúchulainn le maudit.
⊱ schillings : 438

⊱ ton conte : le prince casse-noisette et le roi souris
⊱ ta race : humaine, dieu merci.
⊱ métier : capitaine dans la garde royale, à fort fort lointain.
⊱ tes armes : une épée à la taille, une arbalète à la main. plus récemment, une arme à feu.
⊱ allégeance : pour, bien entendu.

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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptyMar 14 Avr - 1:12



Charmant, Marie
La modestie, c'est de l'arrogance déguisée.

Les lueurs de la Lune passaient à travers les immenses fenêtres comme les éclairages d'un spectacle nocturne. Son regard se perdait sur chaque détail, chaque poussière perdue dans un rayon de lumière. Les paroles de Charmant résonnaient dans son crâne comme si il lui avait apprit quelque chose sur elle-même. Votre occupation en tant que garde personnelle ne vous est-elle pas parfois trop routinière ? Si. Bien sûr que si. Marie se languissait de revoir les terres enneigées de Yasen, Marie s'ennuyait de ne plus pouvoir ressentir l'adrénaline des combats. Si elle avait voulu être une femme d'intérieur, Marie se promènerait au bras d'un gentilhomme dans les jardins yaséens, un sourire poli illuminant un visage entouré de boucles brunes. Cet entre-deux la mettait mal à l'aise ; elle n'avait pas été engagé dans l'élite du Royaume pour surveiller Dragée seulement, mais pour défendre son pays. Pour défendre la royauté de son Royaume. Si elle avait un temps soit peu de conscience professionnelle, Marie, même à minuit passé, grimperait sur son cheval et fouillerait les quatre Royaumes de fond en comble, sans oser revenir avant d'avoir trouvé Marraine. C'est pour ça, qu'elle voulait se lever le matin. Pas pour regarder Dragée se faire coiffer et complimenter, aussi parfait soit-elle. Quelque chose en elle était révolté de cette situation, révolté contre elle-même. Elle aurait pu partir en furie, obéir au serment qu'elle a prêté lors de son adoubement. Tu défendras les faibles. Elle n'était pas retourné à Ragtown, n'avait pas quitté la capitale depuis ce qui était arrivé à Niki. Elle craignait de revoir cette maison aux allures familières, ce parc à chevaux abandonnés, les mille et uns secrets cachés. Elle n'avait défendu depuis bien longtemps que ceux qui en avaient le moins besoin. Ceux qui auraient pu s'offrir les services d'un Royaume tout entier, mais l'avaient choisie, elle. Ça n'était pas juste, pour personne. Elle se défendait elle-même, à l'occasion, dans le procès que lui faisait son esprit tourmenté, mais n'allait que rarement plus loin que le bout de son nez. En bon petit soldat, personne ne lui demandait de s'occuper de ces gens-là. Des gens en lesquels elle se reconnaissait sans l'admettre, bien plus qu'en une Reine et une Duchesse. Tu aimeras le pays où tu es né. Oh, la sensation de la neige qui se glisse entre ses doigts lui manquait. Marie n'en pouvait plus de ce soleil qui tape et lui fait rougir la peau. À Yasen, le soleil ne révélait aucune autre couleur que celles des fleurs épargnées par la poudreuse. Était-elle encore seulement de Yasen ? Elle avait tant changé, depuis son départ, depuis la dernière fois qu'elle avait entendu la voix douce de sa mère et senti le regard fier de son père. Elle ne leur avait envoyé aucune lettre depuis trop longtemps, à peine un présent à Noël ; Marie devenait peu à peu ce qu'elle détestait le plus, et elle se plaignait bien plus qu'elle ne l'aurait cru. Quand cesse-t-on de se soucier de sa famille au point de ne plus même leur donner de nouvelles ? Elle était peut-être une bonne guerrière, mais elle apparaissait en son propre esprit comme étant une bien piètre fille. Pourtant, viendrait un jour où elle raccrocherait – que ce soit par force ou par sagesse – son arme au-dessus de la cheminée, mais elle resterait toujours une fille. Les choses étaient telles qu'elle se demandait si on la préviendrait, si quoi que ce soit arrivait à ses parents. Elle n'était probablement plus qu'un nom dont eux seuls se souvenaient, qui faisait un peu mal au cœur à prononcer, comme à chaque fois qu'on perd quelque chose, qu'on perd quelqu'un. Marie se sentait soupirer, alors que son esprit continuait à réciter sagement. Tu ne fuiras jamais devant l'ennemi. Tu combattras les infidèles avec acharnement. Tu ne mentiras jamais et tu seras fidèle à ta parole. Tu seras libéral et généreux. Sa gorge se serrait doucement. Le plus dur était de se rendre compte qu'elle avait toujours cru en ces valeurs, et qu'elle n'y correspondait plus. Marie n'affrontait plus l'ennemi. Marie ne rencontrait même plus les infidèles. Elle n'était fidèle qu'aux paroles des plus hauts placés, quitte à aller à l'encontre de la sienne. Marie n'avait pas de parole ; rien d'autre que son âme vendue aux Diables.
Cela doit paraître bien absurde et d'autant plus risible. Le nouveau roi, l'usurpateur, le traître qui a coulé les précédents régents dans l'oubli, qui a noyé le royaume en moins d'un an, qui a ruiné plus de vies qu'il ne peut en compter. Celui-là même qui a tout fait pour accéder au trône et briser la limite entre ses rêves et la réalité ; celui-là même qui se lasse trop vite de sa condition pourtant si gratifiante et enviable. Il la sortit de ses pensées rapidement, au point de la faire sursauter. Elle ne pouvait que comprendre ses sentiments, au complexe que ça puisse être. Elle, n'avait jamais été Reine de quoi que ce soit, si ça n'était Reine des jouets cassés, mais sa position dans la Garde lui avait permit d'être proche de plusieurs. Bien qu'elle leur soit loyale, les Rois et les Reines ont tout à envier à leurs sujets. Ils n'ont pas de liberté ni les occasions de réaliser quelconque rêve, et Dieu qu'une vie entre les couloirs d'un palais en devient terne. Marie l'avait vu avec Dragée, la Royauté n'a plus de secrets. Pas de place pour les amoures interdits ni rien qui sorte des rangs. Avoir le pouvoir, c'était bien beau, mais trop insipide à son goût. Il n'y avait plus de place pour rien, pour la vie, les combats, les amis. Un Roi n'avait personne d'autre que sa Reine, et si il cherchait à s'entourer de gens honnêtes il ne finirait pas que seulement seul mais aussi bien déçu. Je défie quiconque de penser qu'être souverain est une tâche simple, donnée à tous. Mais je blâmerais d'autant plus celui qui ne sait pas, qu'une fois qu'on a tout gagné, on a plus rien à attendre, à espérer. Les grands mouvements de Charmant contrastaient avec le peu d'épanouissement qu'il semblait ressentir. Elle s'en serait presque voulue de se rajouter à ses problèmes, tant que de ne rien pouvoir faire d'autre que d'assister à sa chute terrible. Pour sûr elle l'aidera à se relever, la face écrasée contre le bitume, mais elle aurait espéré pouvoir se persuader qu'elle n'en aurait jamais besoin. Non pas qu'elle ait jusque là porté le fils de Marraine dans son cœur, mais il était un Roi soucieux qui s'inquiétait autant pour son pays que sa personne. Et c'était, étonnamment, une qualité rare. Je ne dis pas que la qualité de régent ne me convient pas ; elle est simplement... Insuffisante. Elle soutenait son regard, mais cette fois-ci plus par compassion que par défi. Je n'entends pas par là que j'ai quoi que ce soit à reprocher à ma vie, sur le plan quantitatif, en tous cas. Mais, la réalité n'est pas aussi brillante et merveilleuse que le rêve le laissait miroiter. Il manque toujours ces palpitations quotidiennes, cette envie de partir au pas de course, ces raisons de se battre, pour quelqu'un, pour quelque chose, pour tout et n'importe quoi. Elle soupira, à son tour. Que l'on se rirait d'eux, si cette conversation devenait publique. Vous savez, une couronne est d'avantage une menotte qu'un vrai pouvoir. Les Rois et les Reines ont droit de vie et de mort sur n'importe lequel de leurs sujets, jouissent des pouvoirs d'un Dieu improvisé. Mais à jouer aux Divinités, on en perd sa qualité d'homme. Un petit sourire étira ses lippes. La situation était tout sauf risible, mais savoir que quelqu'un se souciait autant de problèmes semblables aux siens la rendait, ne serait-ce qu'un peu, heureuse. Comme si elle apprenait que la peste qu'elle avait ne la tuerait peut-être pas aussi douloureusement que ses voisins. Votre situation n'est pas à plaindre, loin de là. Vous êtes riche, puissant ; un seul de vos sourires ferait tomber n'importe quelle femme, qu'elle vienne de Saay ou de Yasen. Mais pensez que vous êtes un homme, avant d'être un Roi. La plupart des gens ne s'arrêtent peut-être qu'à votre rang, mais certains comprendront, vous le verrez. Aucun homme ne voudrait d'un tel semblant de vie. Tant de pouvoir, ça n'est pas sain. D'un mouvement gracieux, Marie se laissa glisser à terre, sautilla sur les tapis jusqu'à se planter devant lui. Une main se plaça sur la joue de Charmant un instant, comme elle l'aurait fait avec un enfant, dans l'espoir de capter toute son attention. Je n'ai connu que quelques Rois, peu de Reines, mais tous rêvent d'autres choses, à quelques exceptions près. Là où vous vous démarquez, c'est que vous êtes le seul à vous en rendre compte. Mais les pleins pouvoirs sont vôtres, offrez-les à un tiers et partez, rien ne vous retient vraiment, autre que votre titre brillant. Vous n'êtes qu'un homme, rien qu'un homme, et qu'importe comment les gens vous appellent ; aucun homme qui qu'il soit ne devrait être honteux de se rêver ailleurs. Elle posa une main amicale sur son épaule ; plus rien ne le retenait, c'est vrai, de même que plus rien ne la retenait. Elle n'avait plus autant d'attaches à ce pays qu'auparavant. Elle avait perdu l'étoile qui la raccrochait à ce ciel infini. Ses boucles brunes s'agitaient doucement au rythme où ses pas la conduisaient à nouveau jusqu'à la bouteille de vin, bientôt vide. Désormais vide. Mais il y a une chose merveilleuse à être un homme. Elle porta le verre à ses lèvres, les faisant rougir légèrement au contact du liquide.
Un homme trouve toujours un nouveau rêve. Cherchez, toujours, jusqu'au prochain. Ne vous arrêtez pas à l'un d'entre eux ; un rêve n'est pas plus qu'une vague dans l'océan.
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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptySam 23 Mai - 9:28


marie et charmant


leave me to dream.

Vous savez, une couronne est d'avantage une menotte qu'un vrai pouvoir. Les Rois et les Reines ont droit de vie et de mort sur n'importe lequel de leurs sujets, jouissent des pouvoirs d'un Dieu improvisé. Mais à jouer aux Divinités, on en perd sa qualité d'homme. La dame à la lame soupira faiblement, comme si elle noyait elle aussi les mêmes déboires, les mêmes désillusions, comme si elle savait. Comme si elle avait toujours su. Charmant l’observait, assise dans ses draps, il détaillait les mouvements de ses lèvres charnues qui lui dictaient ses pensées, qui le réconfortaient quelque peu. Dans son dos, il ne sentait que le froid de la nuit qui s’insinuait brièvement, avec volupté, comme un poison dans le vin, entre les rainures des carreaux jusqu’à son dos, ses épaules, ses omoplates, le nimbant dans les ténèbres lunaires, le poussant à avancer d’un pas pour se défaire de cette étreinte sordide. Les rayons de la lune étaient des glaives acérés qui poignardaient son dos, comme un ami qui retourne sa veste, l’appui d’antan, le dernier rempart qui restait, et qui finalement vacille jusqu’à s’effondrer, et lui briser quelques côtes au passage. Votre situation n'est pas à plaindre, loin de là. Vous êtes riche, puissant ; un seul de vos sourires ferait tomber n'importe quelle femme, qu'elle vienne de Saay ou de Yasen. Mais pensez que vous êtes un homme, avant d'être un Roi. La plupart des gens ne s'arrêtent peut-être qu'à votre rang, mais certains comprendront, vous le verrez. Aucun homme ne voudrait d'un tel semblant de vie. Tant de pouvoir, ça n'est pas sain. Le roi esquissa un sourire, quoi qu’il advienne, recevoir des compliments lui était toujours aussi agréable. Mais plus que les flatteries, les faits exprimés résonnèrent plus longtemps à ses tympans, imprégnant son esprit des adages que la jeune femme lui exposait. Celle-ci quitta son nid de satin pour revenir face à lui, ses orbes clairs plongés dans les siens. Il se passa un bref instant de silence, durant lequel Charmant ne put que savourer tendrement la pulpe délicate d’une main gracile sur le creux de sa vieille joue. Je n'ai connu que quelques Rois, peu de Reines, mais tous rêvent d'autres choses, à quelques exceptions près. Là où vous vous démarquez, c'est que vous êtes le seul à vous en rendre compte. Mais les pleins pouvoirs sont vôtres, offrez-les à un tiers et partez, rien ne vous retient vraiment, autre que votre titre brillant. Vous n'êtes qu'un homme, rien qu'un homme, et qu'importe comment les gens vous appellent ; aucun homme qui qu'il soit ne devrait être honteux de se rêver ailleurs. La paume glissa du visage à l’épaule et il se sentit frissonner, étrange mélange du vin, des paroles, des gestes et du sommeil. Dieu qu’il se rêvait ailleurs, il se rêvait partout sauf ici. Il se rêvait heureux, il se rêvait endormi, paisible, il se rêvait homme, il se rêvait chevalier, il se rêvait Charmant, celui qu’il avait toujours voulu devenir, ce reflet éclatant et bien meilleur de lui-même qu’il aurait voulu être. Gamin, il s’imaginait grand guerrier, peut-être le plus grand et juste de la contrée. Avec une armure étincelante, une lame légère et équilibrée ; les nobles comme les paysans murmurant mille éloges à son passage. Il avait toujours voulu être apprécié des autres, comme pour combler le vide interminable que l’absence d’un père lui avait laissé. Grandir sans modèle n’était pas simple, et il s’était embourbé dans l’idée que l’amour d’une peuplade entière suffirait à remplacer le regard empreint de fierté d’un père. Mais, malgré les efforts, les sourires, les jeux et les faux-semblants, il ne parvenait que trop bien à distinguer la sincérité de l’hypocrisie, le vrai du faux, les honnêtes gens qui croyaient en lui et ceux qui le méprisaient, un sourire sur la trogne mais une dague derrière le dos. Il avait toujours voulu bien faire, Charmant, mais il était pas très doué. Il entendit le son d’un liquide qu’on verse et retrouva le fil de ses pensées. Il n’avait pas même remarqué que Marie avait disparue pour s’appuyer sur le guéridon et se servir une dernière coupe. Mais il y a une chose merveilleuse à être un homme. Un homme trouve toujours un nouveau rêve. Cherchez, toujours, jusqu'au prochain. Ne vous arrêtez pas à l'un d'entre eux ; un rêve n'est pas plus qu'une vague dans l'océan. Il a de ces voix qui vous transportent dès la première syllabes, de ces voix qui vous réconfortent au premier mot, de celles qui vous motivent et vous poussent à aller toujours plus haut, et il y a tout simplement celles qui vous enivrent de toutes part, comme le meilleur des nectars. Marie avait une inflexion digne de celles-ci. Charmant en avait entendu des milliers, de résonnances et de voix, chantées, parlées, hachurées, murmurées. Il en reconnaîtrait certaine entre mille, comme celle de sa mère, ou de Dragée, qu’il avait trop l’habitude d’entendre, ou au contraire, pas assez, depuis quelque temps. C’était l’une des choses qu’il craignait le plus d’oublier. Les visages et les voix. Mais en cet instant, celle de Marie suffisait le contenir, à l’attendrir. Peut-être était-ce ses souvenirs embrouillés, le manque de sommeil, le vin, son état de vulnérabilité. Ou peut-être s’était-il finalement rendu admiratif de cette garde qui lui avait juré fidélité. Le roi se racla la gorge, avançant de quelques pas tout en articulant. J’ai fait de nombreux rêves dans ma vie. L’un d’eux, sans doute le plus important à mes yeux et mon cœur, était même aussi brillant que le soleil lui-même, aussi blanc que la peau de la femme qui l’avait porté en son sein. Il grimaça à la pensée même d’évoquer Blanche-Neige. Les premiers amours sont toujours une étape ardue à surmonter, et son retour au royaume n’avait pas arrangé les choses. Et quand bien même une part de lui-même ne cesserait jamais de se préoccuper d’elle, l’autre était immensément vide, prête à attendre qu’une autre silhouette vienne combler ce néant d’où dégorgeaient des sentiments par flots continus. Mais le destin et les dieux ne doivent pas consentir à la poursuite de mon bonheur ; systématiquement, les chimères que je m’octroie, aussi futiles soient-elles, tombent dans les poussières de l’oubli. Il soupira, la gorge obstruée par un goût de cendres et de regrets. Combien de désirs s’était-il déjà résigné à abandonner ? Trop, sans doute. Il avait appris de nombreuses fois de ses erreurs, la leçon lui avait été faite à maintes reprises, mais il ne pouvait s’empêcher de recommencer, jusqu’à ce que ça fonctionne. Il avança d’un pas encore, plongeant ses iris dans celles de la capitaine qui continuait à siroter sa coupe écarlate. Il n’avait alors jamais véritablement fait attention. A quel point elle semblait jeune, même dans la seule lumière des chandeliers. A quel point elle semblait forte, derrière son masque de poupée. Et je ne veux pas que le prochain rêve que je chasserais connaisse pareil sort, je ne veux pas qu’il ne soit qu’une vague. Charmant continua sa route, jusqu’à se retrouver face à la garde, ses yeux toujours fixés sur son visage immaculé. Il percevait les effluves de son parfum, doux et sucré à la fois, qui lui rappelait la vanille et les tartes aux citrons meringués. Il allait jusqu’à sentir son souffle chaud se mêler au sien. Il percevait les mouvements de leurs poitrines respectives, se soulevant en alternance, comme le rythme régulier d’une horloge. Il voulait qu’elle l’écoute, qu’elle le comprenne, qu’elle le sauve de sa chute si proche. Il se sentait près du gouffre, et étouffait l’appel à l’aide de son cœur avec des mots. Je veux qu’il soit un ouragan dévastateur, qu’il m’emporte aussi loin qu’il le veuille, qu’il me détruise tout entier s’il le faut, mais je veux qu’il me donne l’impression d’avoir vécu. Et il se détacha de cette proximité, soudain à nouveau conscient de la situation. Il était officiellement fiancé, et quand bien même Marie pouvait être au courant des revers de cette union purement professionnelle, un homme quel qu’il soit ne pouvait bafouer la dignité d’une femme quel qu’elle soit. Bien trop de choses dans cet univers n’ont que trop peu de valeurs, mais certaines, lorsqu’on fouille bien, se révèle être des mines, des trésors enfouis, des cadeaux de la nature, qu’il faudrait préserver et à jamais chérir. Les yeux toujours dans le vague, il se dégagea un peu plus et commis quelques pas en direction de la porte. Il appuya sur le bouton de l’inter-miroir-phone, et demanda à ce qu’on apporte une nouvelle carafe de vin. Il avait comme le pressentiment que la nuit allait être longue. Enfin, il se retourna, pour croiser à nouveau les traits fins de son interlocutrice. Et vous, Marie –si vous me permettez- jusqu’où iriez-vous, pour accomplir vos rêves ?
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FORT FORT LOINTAIN

Marie Lopaline
LADY, LADY OSCAR

Marie Lopaline

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⊱ pseudonyme : songbird
⊱ tête mise à prix : jessica de gouw
⊱ crédits : caf-pow. (ava)
⊱ arrivé(e) le : 13/09/2014
⊱ manuscrits : 474

⊱ tes licornes : princesse shéhérazade, beasthélemy, cúchulainn le maudit.
⊱ schillings : 438

⊱ ton conte : le prince casse-noisette et le roi souris
⊱ ta race : humaine, dieu merci.
⊱ métier : capitaine dans la garde royale, à fort fort lointain.
⊱ tes armes : une épée à la taille, une arbalète à la main. plus récemment, une arme à feu.
⊱ allégeance : pour, bien entendu.

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we'll carve our names as the sun goes down - marie  EmptyJeu 4 Juin - 21:07



Charmant, Marie
La modestie, c'est de l'arrogance déguisée.

Abandonner, c'était ça le plus compliqué, et Marie le savait. De sa vie, elle n'avait jamais abandonné quoi que ce soit d'autre que sa contrée natale. Ses vieilles armes, Hyle y compris, demeuraient dans sa maison, qu'elle ne voyait plus souvent mais refusait de revendre. Ses vieux habits étaient dans une malle, dans sa chambre. Des amis, elle n'en avait jamais eu beaucoup à abandonner étant donné qu'elle n'en avait pas eu plus à garder. Et puis il y avait eu la Garde, la Chevalerie, qu'il lui semblaient inimaginables à laisser derrière. Il y avait eu Niki, son Amour, mort-né, qui s'était arraché d'elle. Mais elle ne l'avait jamais abandonné. Quelque part, elle y pensait encore. Elle était comme une veuve à la perte de son mari; il n'y a rien qu'elle pouvait faire, rien d'autre que garder précieusement sa bague en dernier souvenir, mais elle ne l'abandonnait pas. Elle ne laissait pas aller ses mémoires et ses souvenirs, et quand bien même elle savait, elle savait qu'elle finirait par oublier la couleur de ses cheveux, la douceur de sa peau, l'intensité de ses yeux et le miel de sa voix, mais elle préférait laisser le temps faire ses affaires plutôt que de l'y aider et l'y contraindre. Marie n'abandonnait jamais, même ce qui ne valait pas la peine, même ce qui ne valait plus la peine.
Abandonner, c'était déjà reconnaître que quelque chose ne marchait pas. C'était admettre que même armé, on ne se défera pas de l'obstacle qui nous sépare de la réussite. L'abandon, c'était une défaite en soi, et Marie s'étouffait bien trop chaque jour dans sa fierté pour admettre qu'elle ait perdu quelconque bataille, qu'elle soit sur le champ de bataille, dans sa tête ou dans son cœur – quoi que les trois ressemblaient en ce moment, à peu de choses près, à la même chose. Chaque jour elle se paraît d'un sourire des plus convaincants qui, le soir venu, se craquelait sans la moindre délicatesse. Elle gardait la tête haute, seulement pour détourner l'attention de ses épaules qui cassent sous le poids des échecs cachés. Abandonner, c'était ça le plus compliqué, mais Marie ne s'y résolvait pas. Elle n'avait jamais réussi. Et en y pensant, c'était probablement là sa première faille. Son premier échec – ne jamais accepter les suivants.
Alors les échecs que Charmant se prêtait, elle pouvait les comprendre. Marie pouvait les accepter, autant qu'elle n'acceptait pas les siens, et essayer d'y trouver des solutions. Dans un dernier espoir de pouvoir se sauver elle-même. Elle n'était pas forte, elle n'était pas inatteignable, et pour une fois, aujourd'hui, elle acceptait ça. Ce soir Marie était Marie, et ça la soulageait tant que ça lui faisait mal, mais c'était un pas fait en avant. Si même le Roi se montrait sous un nouveau jour, alors elle pouvait le faire elle aussi. Ce serait un secret qu'aucun d'eux n'avait d'intérêt à révéler sous peine de se vendre avec. Ils étaient adorablement vulnérables, merveilleusement pitoyables. Mais ils étaient encore quelque chose, et ça avait un petit je ne sais quoi de réconfortant. L'ironie frappa Marie entre deux gorgées, à se rappeler de leurs conversations il y a encore de ça quelques mois. Il n'est pas sûr que de sa vie, Marie ait autant méprisé quelqu'un. Charmant était prétentieux, Charmant était superficiel et se reposait sur ses lauriers. S'il avait connu quelconque gloire, il était peu probable qu'elle soit due à un effort de sa part. Il n'avait pour jouer en sa faveur qu'une chevelure, œuvre des Dieux, et un nom qu'il devait à sa mère. Il n'était que la vermine de ce monde, ce qui va mal chez les hauts placés et l'incarnation même de ce que le peuple haïssait en la Royauté. Et pourtant, au clair de lune, comme un loup-garou se serait changé, Charmant était enfin vulnérable. Il n'était plus une chevelure ni un nom, il ne se cachait pas derrière les sourires et les courbettes. Et là, c'était évident, que Charmant était un homme. Un homme dans toutes ses failles et ses erreurs, un homme dans tout ce qui n'allait pas. Et là, seulement, Marie le savait digne de tout, et même de sa couronne. Et elle était fière d'avoir prêté allégeance à un tel Roi.

J’ai fait de nombreux rêves dans ma vie. L’un d’eux, sans doute le plus important à mes yeux et mon cœur, était même aussi brillant que le soleil lui-même, aussi blanc que la peau de la femme qui l’avait porté en son sein. Les yeux de Marie se perdaient dans la flaque de vin perdue au fond de son verre. Elle aussi avait eu nombre de rêves. Elle aussi, avait eu le rêve, qui s'était écrasé la gueule en plein vol. sa gorge s'en nouait encore. Mais le destin et les dieux ne doivent pas consentir à la poursuite de mon bonheur ; systématiquement, les chimères que je m’octroie, aussi futiles soient-elles, tombent dans les poussières de l’oubli. Au fond, elle se serait même risqué à avouer que Charmant et elle étaient pareil. C'est le fléau des rêveurs, d'avoir trop d'espoirs et d'attentes et de tomber de haut. Et malheureusement, leur chute était sans fin, le puits sans fond. Marie tant que Charmant avaient eu des dizaines, des centaines de rêves, entassés dans une urne sur la cheminée. De leurs rêves, ils n'avaient connu que la déception qui leur succédait. C'était amer, c'était piquant, parfois tranchant. C'était les amours envolés, c'était le manque d'aventure et de danger. Elle ne se souvenait pas exactement de ce qu'elle attendait, avant d'en être arrivé là, mais elle savait très bien que si son grade dans la Garde était enviable, elle avait plus perdu que gagné. La frustration, le doute, la colère, ça n'étaient pas des choses qu'elle aurait souhaité à quiconque, et surtout pas à la gamine en elle qui rêvait de son uniforme. Si elle avait su, bien des choses auraient changé.
Marie releva la tête, croisa le regard de Charmant qui s'était approché sans même qu'elle le remarque. Leur conversation s'éterniserait peut-être jusqu'à la fin du monde, mais elle ne savait pas comment ni avec qui d'autre elle aurait pu arracher ce poids qui lui pèse depuis longtemps. Elle était reconnaissante, vraiment, pour tout ce qu'elle avait. Mais Dieu que sa reconnaissance était tintée de tristesse. Et je ne veux pas que le prochain rêve que je chasserais connaisse pareil sort, je ne veux pas qu’il ne soit qu’une vague. Elle se forçait à lever la tête, pas par fierté mais pour suivre son regard au bout du monde, ne pas manquer l'impact d'un seul mot qui passait la frontière de ses lèvres. Je veux qu’il soit un ouragan dévastateur, qu’il m’emporte aussi loin qu’il le veuille, qu’il me détruise tout entier s’il le faut, mais je veux qu’il me donne l’impression d’avoir vécu. Il n'y avait plus rien pour elle dans le verre à pied qu'elle gardait précieusement, et elle n'était pourtant pas plus détendue. Les larmes menaçaient de s'échapper à tout moment, et si ça n'avait été qu'elle, elle aurait voulu hurler à la mort jusqu'à s'en péter les cordes vocales. Bien trop de choses dans cet univers n’ont que trop peu de valeurs, mais certaines, lorsqu’on fouille bien, se révèle être des mines, des trésors enfouis, des cadeaux de la nature, qu’il faudrait préserver et à jamais chérir. Avec toute l'ironie dont elle était capable, Marie laissa échapper un rire quelque peu nerveux. Son esprit priait les Dieux pour que leur vin arrive bientôt, et elle priait pour que l'alcool l'emmène loin, où même les larmes ne l'atteindront plus. Impatiente, elle tendait de récupérer une dernière goutte rouge au fond de son verre, priant pour qu'elle fasse la différence, en vain. Et vous, Marie –si vous me permettez– jusqu’où iriez-vous, pour accomplir vos rêves ? Marie se laissa l'instant de la réflexion. Si elle en avait eu des tas, c'est vrai, elle ne se connaissait plus beaucoup de rêves à ce jour. Marie aurait juste rêvé de.. partir, loin, à l'aventure. De se servir de son épée pour autre chose que les entraînements, elle aurait rêvé de se blesser, oui, mais dans la folie du combat, de perdre un bras s'il le fallait, de risquer sa vie si c'était nécessaire, tant qu'elle retrouvait cette adrénaline qu'elle ne trouvait nulle part ailleurs que sur le champ de bataille. Marie rêvait du bruit des armures qui se cognaient, Marie rêvait se la poussière qui s'élevait de la terre. C'était une folie, mais elle était incroyablement douce à ses oreilles, et Marie aurait retourné des mers entières pour retrouver la symphonie du danger. Doucement, elle commença : Au bout du monde. C'était doux, voire timide, mais il fallait du temps pour trouver les mots exacts. J'irais au bout du monde. Un sourire traversa son visage, un instant. Je nous connais nombre de désaccords, votre Altesse, mais je dois admettre qu'il n'y a rien de plus attirant qu'un ouragan gigantesque. Marie s'avança, silencieuse à l'entente du domestique qui amenait la carafe de vin dans la suite princière. Elle se cachait dans les ombres des armoires, passant inaperçue, jouant aux fantômes, jusqu'à ce que la porte se referme et qu'elle n'entende plus de pas dans le couloir. Elle fit le chemin, à pas de loup, jusqu'à la carafe pleine, et remplit les deux verres vides sur la commode, apportant le sien à Charmant. Mais elle ne s'approchait pas trop près, tendant plutôt son bras de toute sa longueur. Pourvu que le rêve que je chasse en vaille la peine, je me fiche du prix à payer. Marie porta son verre à ses lèvres, doucement, savourant cette fois jusqu'à sentir les arômes fondre contre sa langue. Je suis de ceux qui pensent qu'un rêve est la chose la plus forte qui soit. Ils peuvent être doux et réconfortants, mais parfois, certains vous mettront à terre pour mieux vous entailler. Mais un rêve, s'il peut être dévastateur, est avant tout ce qui fait avancer quelqu'un. Marie se recula, doucement, n'avalant pas une goutte avant d'arriver à la fenêtre, et d'observer longuement. Avez-vous déjà entendu parler de ce qu'il y a, au-delà du monde que l'on connaît ? Des étoiles, de l'espace ? Pour certains, monter là-haut, c'est le rêve d'une vie. Elle sourit niaisement, les yeux rivés sur les constellations, l'éclat des étoiles jusqu'au fond des yeux. Il y en a qui vous diront que c'est impossible, et idiot, qu'ils pourraient mourir à aller là-bas. Mais si c'est leur rêve, alors ils n'arrêteront pas d'essayer. Et certains mourront à l'essai. Discrètement, une larme se faufila sur la joue de Marie, avant qu'elle ne l'essuie sans un bruit. Je pense que quand il s'agit de rêves, la question n'est pas tant de réussir que de s'y essayer. Doucement, la vin descendait la gorge de Marie, alors que ses pensées la libéraient un peu de tout ce qu'elle ne savait pas avoir en elle. Quand j'aurai trouvé un rêve, moi aussi, alors je ferai tout ce qui m'est possible pour le réaliser. Et si je n'y arrive pas.. Elle haussa les épaules, doucement, avant de se retourner vers Charmant. Et même si je meurs avant d'y arriver, je ne pourrai pas m'en vouloir de ne pas avoir essayé. Mon rêve aura bercé mes pensées, jusqu'à la dernière, et je ne pourrai que mieux faire dans une prochaine vie. J'en décevrai peut-être beaucoup, mais je sais que c'est la chose à faire. Si elle avait pensé la même chose ces dernières années, alors peut-être Marie serait-elle aux côtés de son Prince des Jouets. Si elle avait tout fait, tout, pour concrétiser son rêve, si elle s'était battu non pas contre mais pour lui, si elle l'avait suivi en courant et qu'importe sa robe de bal qui s'en serait abîmé, alors peut-être que Marie aurait connu son rêve. Elle n'en était pas sûre, mais la logique était là, et plus jamais elle ne voulait refaire la même erreur.
Son regard se perdit dans les traits de Charmant qu'elle distinguait sans problèmes malgré l'obscurité, sa poigne resserrée autour de son verre de vin. Mais je crois que je n'ai pas eu plus de succès que vous en ce qui concerne nos rêves. Je n'en ai plus que les fantômes qui me hantent parfois, et je m'effraie à l'idée de me tromper. En une gorgée ou deux, son verre était à nouveau vide, et Marie bien moins assurée.
J'y pense parfois, et j'ai peur. J'ai peur qu'il n'y ait plus aucun rêve qui m'attende, j'ai peur d'avoir desséché la mer. Vous comprenez ?

RP abandonné :kyu:
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