Quelle rocambolesque histoire que celle de Poucette.

Poucette Toutepetite, car cela est son nom, est née non loin de la forêt enchantée. Ses parents, deux fermiers honnêtes sous tous rapports, avaient tant attendus l’arrivée de la petite fille, et furent heureux de la voir naître. Si seulement leur bonheur avait pu durer…Quand la petite eut passé ses huit ans, il s’avéra que les parents de la petite fille avaient mis en colère une sorcière noire de la région. Le père avait, accidentellement bien évidemment, tué le familier de la sorcière. Un terrible accident, vraiment et il est même venu s’excuser à la sorcière. Cette dernière, folle de rage, failli les tuer, ce ne serait qu’un juste retour des choses, non ? Sauf qu’elle vit la petite Poucette, recroquevillée derrière les jupons de sa mère, et elle eut une autre idée. Ces fermiers tenaient tant à leur petite fille…Alors elle enleva Poucette.

Sauf qu’elle n’avait pas eu le cœur à la tuer…elle était une sorcière noire, certes, mais elle n’était pas un monstre pour autant. Maintenant, il lui fallait trouver quoi faire de la petite. Oh non, la sorcière ne la garderait pas, elle avait bien assez de problèmes comme cela, inutile de s’embêter avec un marmot. Elle plongea Poucette dans un profond sommeil en attendant de trouver une solution. Quelles étaient les chances pour qu’une femme ne vienne lui demander de l’aide, à elle une sorcière noire, pour avoir un enfant ? Très faible, mais pourtant, c’est ce qui arriva. Elle vit là une aubaine pour se débarrasser de la petiote. Elle aimait les grandes entrées théâtrales, le drama, les choses avec du grand dedans. Alors elle mit au point tout un stratagème afin de pouvoir rendre l’arrivée de l’enfant le plus magique possible. Elle commença par réduire l’enfant à la taille d’un pouce, à peine, puis bloqua ses souvenirs des huit dernières années et enfin, la plaça dans un bouton de coquelicot. Insistant sur le fait que la future mère devrait planter le coquelicot et bien s’en occuper pendant trois jours avant d’espérer quoi que ce soit. Au moins, elle venait de faire une heureuse. Trois jours plus tard, grâce aux bons soins de la couturière qui l’avait achetée, Poucette se réveilla dans son coquelicot. Ce que n’avait pas prévu la sorcière noire fut que le sort de rapetissement ne s’amenuise pas avec son réveille…une erreur de dosage, sans doute. De ce fait, Poucette garda la taille d’un pouce, ce qui ne dérangeait pas outre mesure sa mère adoptive.

Durant des années, la vie de la petite Poucette fut tranquille, sans histoire. Elle chantait aux animaux passant près de sa maison quand elle en avait l’occasion, elle aidait sa mère dans ses ouvrages en allant faire des détails de broderies qu’aucun couturier, même le plus habile, ne puisse réaliser…Bref, une vie tranquille pour quelqu’un qui fait moins de dix centimètres de haut. Jusqu’à ses vingt ans. En effet, une mère crapaud passant par-là entendit la jolie voix de la jeune femme et, la voyant aussi jolie, aussi joviale et surtout, à une taille raisonnable, elle n’hésita pas une seconde. La nuit venue, elle enleva Poucette durant son sommeil, dans l’idée de la marier à son fils aîné, qui, pour le coup était aussi laid qu’un…eh bien qu’un crapaud gluant. Quand la rousse se réveilla, ce ne fut pas dans son lit douillet, mais bel et bien sur une feuille de nénuphar, accueilli hors des bras de morphée par la mère crapaud. Autant dire que la jeune femme eut un sursaut de surprise en la voyant ainsi, sans savoir pourquoi. Les explications qu’elle reçut furent simples.

"Il n’y a rien à expliquer petite. Ta vie d’avant ne compte plus, tu seras la femme de fils, un point c’est tout."

Trop aimable…Cependant, Poucette s’en trouva désespérée. Elle avait été enlevée à sa mère par cette bande de crapauds et elle ne savait même pas où elle se trouvait. Mais elle n’allait pas se laisser abattre si facilement…Quand, au bout de quelques heures, les crapauds partirent pour aller chercher à manger, la jeune femme se posta au bord de la feuille et appela à l’aide (bien que peu optimiste sur le succès d’un tel plan). Un poisson lui répondit, et il alla couper la tige de la feuille. Elle héla un papillon, puis deux, et enfin, le troisième était parlant, elle put lui demander un peu d’aide. Usant de la ceinture de sa robe, Poucette en accrocha un bout à la feuille de nénuphar et l’autre au papillon. Ainsi, elle pouvait se diriger un peu mieux que simplement par le courant. Elle rentrerait chez elle, elle en était certaine.

Sauf que rien ne se passe jamais comme prévu, c’est bien connu. Alors que cela faisait quelques semaines qu’elle dérivait plus ou moins (elle relâchait le papillon lorsque le courant était assez calme, le pauvre), se faisant apporter de la nourriture par des animaux et insectes de la faune avoisinante, elle se fit emporter de son nénuphar par…Un hanneton ?! Bon, au moins, il n’était pas gluant. On pourrait même dire qu’il avait du charme, si on omettait qu’il était un insecte et elle…une humanoïde au moins, à défaut de savoir précisément ce qu’elle était. Au moins, il la traitait avec respect, et n’avait de cesse de lui dire à quel point elle était belle, comparée à ce qu’il peut croiser toute la journée dans les hautes herbes…Et elle y a cru, naïve qu’elle était. Seulement, vous connaissez la pression des pairs ? Voilà ce qui l’a laissé sur le côté de la route, une fois de plus, distraite de son but : retourner chez elle. Rencontrant d’autres hannetons et autres insectes qui connaissaient celui qui l’avait emporté, ces derniers n’ont pas hésités une seconde à lui dire combien sa nouvelle trouvaille (bon sang, n’était-elle que cela ? Un prix à exhiber ?) était laide.

« Elle n’a même pas d’ailes ! »
« Regardez-moi ces jambes bien trop dodues et beaucoup trop longues ! »
« Et ses yeux ! Minuscules… »
« Dégoûtant ! » « Horrifiant »

Si bien que, alors qu’elle avait besoin d’un peu de soutien, le hanneton qui l’aimait bien, (du moins l’eu-t-elle cru) la chassa, avec pour seuls mots d’au-revoir « Il semblerait que tu sois trop laide pour moi… »

Dépité, enragée intérieurement et surtout paniquée par la situation dans laquelle elle se trouvait, Poucette vagabonda sans but jusque dans un champ. Le temps s’était rafraîchi, l’hiver approchait après tout, et elle venait à peine de passer ses vingt et un ans. Elle se demandait si c’était ainsi qu’était sensée finir sa vie, dans le froid, la neige…Le destin en décida autrement.

En effet, une souris des champs habitant ce champs la recueilli dans sa petite maison. Oh, ce n’était pas bien grand, mais elles avaient largement la place de dormir toutes les deux et de bouger sans se marche dessus. La souris lui proposa un marché : si durant l’hiver, elle l’aide à prendre soin de son voisin, la souris la laissait rester chez elle le temps que l’hiver passe. Poucette n’hésita pas à accepter. C’est ainsi qu’elle fit la rencontre de son voisin : une taupe presque aveugle, avec un goût prononcé pour la musique. Alors elle chantait pour lui, tandis que la souris préparait à manger. Habituellement, c’était la taupe qui venait chez elles, mais un jour il demanda à ce qu’elles viennent chez lui. Sur le chemin, la rousse remarqua une drôle de forme dans le couleur. Massive, mais pas…menaçante. Demandant ce que c’était, la réponse fut rapide :

"Une hirondelle. Elle est tombée là et depuis, elle est restée. Elle doit être presque morte à l’heure qu’il est."

Cette pensée horrifia Poucette, si bien que lorsqu’elle eut terminé avec la taupe, elle alla prendre soin de l’hirondelle. Tout l’hiver passa dans cette routine, Poucette prenant soin de l’hirondelle soit avant, soit après sa visite chez la taupe, puis elle rentrait. Un soir, la souris lui annonça une nouvelle qui lui donna une étrange impression de déjà-vu.

"Mr Lataupe veut t’épouser !"

Elle failli en faire tomber sa tasse de thé dites-moi ! Pendant de longs jours, Poucette tentait de refuser, expliquant que non, elle ne voulait pas se marier maintenant. Sauf que la souris avait de nombreux arguments dans sa manche. A force, Poucette céda, quelque peu lobotomisé dans l’idée qu’épouser la taupe aveugle n’était pas le pire qu’il pourrait lui arriver et lasse de devoir toujours se battre. Les préparatifs avançaient doucement, tandis qu’elle continuait d’aller prendre soin de l’hirondelle, à présent remise mais attendant des jours plus chaud pour reprendre son vol.

"Eh bien Poucette, tu as une petite mine aujourd’hui."
"Oh, probablement le stress Jacques."
"Comment ça ?"
"Le mariage. Je dois me marier avec Lataupe dans deux jours."
"Comment ça te marier avec Lataupe ?"
"Eh oui, il m’a demandé ne mariage il y a de cela un mois maintenant."
"Tu ne comptes tout de même pas l’épouser, si ?"
"Oh, ça ne sera pas si mal…" mais sa voix se brisa sur le dernier mot, un sanglot lui échappant
"Oh…Poucette…" Jacques l’entoura d’une de ses ailes
"Je n’ai nulle part où aller ; je ne sais même pas où je suis ! Au moins lui prendra soin de moi…"
Pendant un moment, les deux restèrent silencieux, hormis pour les quelques sanglots de la rousse, et Jacques reprit vite la parole.
"Tu seras peut-être en sécurité, mais tu ne seras pas heureuse. Toi, enfermée dans les sous-sol, incapable de voir le soleil durant le reste de ta vie ? Tu seras terriblement malheureuse…" soudain, il se redressa, usant de son aile pour faire relever le visage à Poucette "J’ai une idée. Quand je pars pour de bon, vient avec moi. Je te ferais voir le monde !"

Il fallut un peu plus pour la convaincre, mais pas tant que cela, au final. L’idée de ce mariage forcé, une nouvelle fois, la rendant plus malheureuse que jamais. Alors elle monta sur le dos de Jacques et ils s’envolèrent ensemble. Arrivant bientôt dans une ville, la jeune femme est vite repérée par des fées. Ces dernières n’ont que compliments, conseils et avis à lui fournir et pendant un temps, elle se sent submergée. Mais elle finit par s’en sortir et mieux encore, elle découvre que sa petite taille n’est que le fruit d’un enchantement. Ou plutôt d’une malédiction. Sur ce fait, elle convint les fées de lui rendre sa taille normale et très vite, se retrouve dans la taille d’une humaine normale.

Quelle révolution pour elle qui avait toujours vu le monde d’en bas…Les fées n’en n’avaient pas fini avec elle cependant, lui apprenant beaucoup sur la beauté, sur sa beauté plus précisément, et elle finit par y prendre goût. Cependant, elle a fui cette ville quand un fée la demanda en mariage. Accordé, il y avait bien pire qu’un fée à épouser. Surtout qu’elle aurait dû le voir venir avec ses jeux de séductions auxquels elle s’était plu à répondre (les fée lui ont fait gagner en assurance, au passage). Sauf que ses deux précédentes expériences de mariage forcé l’ont traumatisée et maintenant, toute demande en mariage se solde par la fuite de la demoiselle. Ce qu’elle fit, avec Jacques, ils partirent vers le Sud, elle à cheval et lui par les airs. Elle venait à peine de fêter ses 22 ans.

Pendant près de cinq ans, la jeune femme voyage un peu partout, hormis Yasen, son ami l’hirondelle n’aimait pas ce climat trop froid. Elle apprit beaucoup de chose, développant beaucoup sa débrouillardise. Mais si sa vie tenait plus de celle d’une baroudeuse que d’une vie bien rangée, elle n’en négligeait pas son apparence. Loin de là. Les leçons des fées ont laissées leur marque…Lors d’un voyage à Afshin, alors que Jacques s’apprête à repartir maintenant l’hiver passé, Poucette décide de rester. C’est ainsi que, sur conseil de son ami, elle va voir Nouroz, un homme fort sympathique et très accueillant qui ne ferme jamais sa porte à ceux qui en ont besoin. C’est chez lui qu’elle rencontre alors un des hommes qui ont le plus marqués sa vie : Jeiran Aurorefauve. Il est de trois ans son cadet, et un armurier inventeur. Cela intrigua Poucette qui passa de plus en plus de temps à l’observer travailler. Elle commença même à faire ne sorte qu’il mange et dorme presque correctement durant ses phases de travail. Elle fut même aidante sur plusieurs de ses projets, si bien qu’elle devint, tacitement, son assistante. Le clou fut quand il présenta son Cheval. Bon sang, il avait tant trimé sur cette invention…Elle était si heureuse pour lui ! Quand il partit en voyage, Jeiran proposa à Poucette de le suivre, ce qu’elle accepta sans hésiter. Elle ne cessait de découvrir de nouvelles choses avec lui, alors elle ne s’en priverait pas…

Ils voyagent ensembles durant 4 ans, où elle fut un soutien aussi bien qu’une amie. Seulement, la jeune femme commençait à vouloir se poser, s’installer quelque part et y rester, si pas pour de bon, au moins quelques temps. Elle aimait voyager, surtout avec Jeiran, mais il y a un moment où elle arrivait à saturation…ce moment est arrivé. Ils prirent des chemins séparés alors, bien que restant en excellents termes l’un avec l’autre. Poucette se dirigea alors vers la grande ville la plus proche : Fort Fort Lointain. Sans travail, elle n’aurait pas fait long feu ici. Elle a cependant réussi à trouver un travail comme chanteuse à la Sirène Amputée, où elle resta quelques semaines avant de prendre un autre poste : secrétaire à Leroyal. Le rêve. Il faut croire que son expérience avec Jeiran lui soit encore plus profitable qu’elle ne l’avait imaginé. Tant mieux.

Cela fait maintenant trois ans que Poucette est installée à la capitale. Pour tout dire, elle s’y plaît bien, même si Marraine…Disons que c’est différent. Pourtant, elle entend bien le peuple qui gronde, quand elle va faire ses courses, où quand elle se balade simplement en ville. Et très vite, c’est la catastrophe. Le bal de Snowel, et son explosion qui a fait tant de blessé. Elle n’y était pas allée, terminant des dossiers pour Mr Becnoir, et se trouvait horriblement chanceuse pour le coup…Puis l’ambiance allait en se dégradant. Elle apprit que Jeiran était arrivé en ville lui aussi, mais elle ne l’a pas encore recroisé en ville, et maintenant que Tracassin est sur le trône et Marraine disparue, qui sait ce qu’il va leur arriver demain ?