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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer


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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 15 Mar - 0:21



Dracula & Ebenezer
J'ai cassé mon cercueil...

La scène devait être cocasse pour tout spectateur extérieur. Dans cet immense manoir, une pièce dépourvue de décoration, plongée dans la lueur d’une fin de journée trônait au milieu un cercueil. En morceaux. Devant ce cercueil, un homme, l’air dépité, qui se pinçait l'arête du nez et maudissait intérieurement le rêve qui avait tant perturbé sa journée de sommeil. Les images étaient floues, mais il était certain que cela avait un rapport avec la traque dont il était la proie il y a quelques temps.

Dracula expira un coup et s'attela au nettoyage des débris de son cercueil préféré. Ce n'est pas qu'il n'avait aucun cercueil qui traînait dans le grenier - c'est qu'ils étaient aussi confortables qu'un lit à clous. Et même s'il avait toute la vie devant lui pour rattraper ses nuits, ce n'est pas aujourd'hui qu'il raterait une autre bonne journée de sommeil. Le travail terminé, il sortit de sa chambre, rejoignit le hall, empoigna sa veste, ajusta sa capuche et s'extirpa de son manoir. Heinrich parti, il était obligé de s'atteler à la tâche lui-même, et rapidement, s'il ne voulait pas arriver devant une enseigne fermée. Il se repéra facilement dans les dédales des rues mais n'avouera jamais qu'il dut demander son chemin à quelques passants. Son sens de l'orientation était aiguisé, mais sa journée avait été mauvaise et son esprit était encore quelque peu endormi.

Ses pas résonnaient sur les pavés d'une rue presque vide et Dracula s'inquiéta de voir la plupart des échoppes fermées. Il ne pouvait pas attendre demain, il devait faire cela maintenant afin de passer une nuit avec l'esprit tranquille. Le vampire avait prévu de changer son cercueil un jour ou l'autre, mais aujourd'hui n'était pas le jour où il pensait lui dire au revoir.
Il avait une idée assez précise de ce qu'il voulait. Du sur-mesure, évidemment. Le sur-mesure ne se construit cependant pas en un jour, ainsi devra-t-il sûrement se contenter d'un bon cercueil de remplacement en attendant le sien. Tant que celui-ci restait plus confortable que les siens, cela lui allait.

Enfin, il tomba nez à nez avec le magasin qu'il recherchait : la morte-tête. Qui semblait fermée. Un instant de panique s'empara de lui et il courut jusqu'à la devanture, colla sa tête contre la vitre, les mains en oeillère et inspecta l'intérieur. Quelqu'un était toujours là, tout n'était pas perdu ! Se déplaçant devant la porte, il toqua deux fois et attendit qu'on lui ouvre. Ce qu'on fit, quelques minutes plus tard. L'air étonné, un vieux monsieur barbu lui ouvrit la porte. Dracula n'entra pas directement - il avait conscience de peut-être empiéter sur le temps privé de cet homme et il comptait attendre l'autorisation. Cela ne l'empêcha pas toutefois de parler.

« Monsieur, merci de m'ouvrir à cette heure-ci. J'aurais besoin de vos services, immédiatement, car j'ai du faire face à un grand désagrément. » Il n'évitait pas la question du cercueil, non, il la retardait. Cela ne devait pas se voir tous les jours, un homme qui demande un cercueil pour lui-même, simplement parce que c'est plus confortable qu'un lit. « Voyez-vous, j'ai besoin d'un cercueil immédiatement. » Devait-il le laisser penser que cette course était pour un proche qui venait de rendre l'âme ? Non, il le saurait tôt ou tard, puisqu'il le ferait sur-mesure, ce cercueil. « J'ai cassé le mien, plus tôt. Mon sommeil a du être agité et il m'accompagne depuis quelques années déjà. D'ailleurs, ne sont-ils pas supposés tenir l'éternité, les cercueils ? Enfin, je m'égare, excusez-moi. »

Il inspecta l'homme quelques secondes, jeta un regard dans la boutique et aperçut un cercueil aux dorures magnifiques et qui semblait bien confortable. « Puis-je aller voir ce cercueil, au fond ? Je vous dédommagerais pour tout ce temps que vous passerez à m'aider ! » Il hésita à ajouter un petit rire sadique et à montrer ses canines, mais se ravisa. Peu de personnes prenaient cette blague au second degrés, après tout.
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 15 Mar - 11:14


Dracula & Ebenezer
Tout s’achète : l’amour, l’art, la planète Terre, vous, moi... Surtout moi.

De tous les jours du mois, il y en avait tout particulièrement qu’Ebenezer exécrait au plus haut point. Pire encore que les fêtes de fin d’années ou les anniversaires à répétition,  il lui prenait parfois le sentiment que cette journée noire était maudite tant sa récurrence –qui lui paraissait bien trop régulière pour être acceptable- et la douleur qu’elle lui incombait, lui faisaient frissonner la barbe. On parle ici, bien évidemment, du jour de paie.
Le maître funéraire était assis sur son fauteuil de velours, à admirer une dernière fois ces petites bourses de cuir renfermant le plus précieux des trésors que la race humaine n’ait jamais daigné mettre au monde, avant que de sales petites pattes ouvrières ne s’en empare comme les pigeons de miettes de pain sur le bord des ruelles. Il exalta un soupir contrit, à voir ces badauds tâter de si près le fruit de son dur labeur quotidien –ne doutez pas, il n’est pas chose facile d’offrir semblant de compatissance et sourire mielleux à des endeuillés à longueur de journée, surtout lorsqu’on est soi-même aussi bougon. Ses employés se succédaient en file indienne dans le bureau, avant de ressortir aussi sec, non sans ajouter un bref « Merci bien, m’sieur, à d’main » et l’homme en question ne pouvait s’empêcher de les jauger de son sourcil arqué, faisant attention au moindre détail, de peur qu’un des siens tente de s’échapper avec quelques schillings de trop.
Une fois le dernier salarié sorti, le septuagénaire pris soin de bien verrouiller la porte d’entrée, tous loquets abaissés avant de retourner dans l’arrière-boutique, où une théière sifflante l’attendait sur un poêle. Il extirpa un petit sachet d’aromates de sa propre sacoche et saisit sa tasse fétiche posée sur un petit établi. Après moult refus, il avait finalement cédé aux conseils –bien qu’ils se révélaient plutôt être des ordres déguisés- de sa chère gouvernante et avait accepté les services d’une druidesse toute jeune encore, qui lui avait proposé diverses préparations à thés et autre cataplasmes mystiques pour soigner ses insomnies. Celles-ci étaient devenues plus fréquences et violentes encore, s’accompagnant de leurs amies les délires et les sueurs froides. Chaque nuit lui paraissait un nouveau calvaire à surmonter, et les journées semblaient compter doubles.
Il s’apprêtait à siroter son thé dieu-seul-sait-quoi, soufflant pour en dégager la fumée, quand soudain, on frappa deux fois à la porte. Surpris, Ebenezer en sursauta si bien qu’une bonne partie du liquide brûlant se renversa sur le parquet ciré et ses mains calleuses. Il jura sur tous les dieux avant de se diriger vers la poterne appuyé sur sa canne. « Ça va, ça va, j’arrive ! » Il avait horreur des impatients, mais plus encore des clients désespérés qui ne saisissaient pas la notion « d’horaires d’ouverture ».  Scrooge allait sursauter une seconde fois devant la silhouette qui lui faisait face.
A la faible lueur des réverbougies qui éclairaient de leur flammèche tremblante les rues assombries, il ne parvenait à distinguer qu’une coiffure impeccable ornant un visage pâle aux lèvres fines et une carrure d’homme distingué portant un trois-pièces aussi sombre qu’élégant. L’homme néanmoins, paraissait quelque peu agité. « Monsieur, merci de m'ouvrir à cette heure-ci. J'aurais besoin de vos services, immédiatement, car j'ai du faire face à un grand désagrément. » Pour toute réponse, Scrooge grogna un « service » incompréhensible dans sa barbe blanche, et joignit à l’expression un geste évasif de la main. L’imprévu ne lui plaisait guerre, et cet inconnu n’était pas en bonne voie pour changer la donner. « Voyez-vous, j'ai besoin d'un cercueil immédiatement. »
Ebenezer frôla l’infarctus. Dans toute sa carrière, il avait bien évidemment magouillé avec quelques petits assassins fortunés dans le plus grands des secrets –parfois même pour le bien de la cour- mais jusqu’à ce jour, aucun prétendu meurtrier n’était venu sonner à sa porte de façon aussi brutale et s’annonçant sous un jour si explicite. Cela devait être le premier cas de cet homme, en plus d’être fort bien vêtu, il semblait n’avoir aucune expérience sur « comment se débarrasser d’un corps facilement en trois étapes ». « J'ai cassé le mien, plus tôt. Mon sommeil a dû être agité et il m'accompagne depuis quelques années déjà. D'ailleurs, ne sont-ils pas supposés tenir l'éternité, les cercueils ? Enfin, je m'égare, excusez-moi. »  Une onde de soulagement traversa le corps du vieillard. Il ne s’agissait donc pas d’un cas d’homicide, mais simplement d’un bourgeois aux mœurs plus qu’étrange. Si son âme n’était pas si cartésienne, il jurerait presque que l’individu se prenait pour un de ces vampires légendaires, mais ce n’était que foutaises ; les créatures les plus dangereuses du royaume à l’heure actuelle étaient les fées en période de soldes, pas les suceurs de sang évanouis dans leur sommeil éternel. Néanmoins, le personnage avait attisé sa curiosité maladive et ranimer un éclair de vivacité dans son regard. Et lentement, le commercial repris le pas sur l’effrayé. « Les nuits agitées sont un sujet que je ne connais que trop bien, croyez-moi, sire. Quant à la durée d’utilisation d’un cercueil, je ne peux vraiment m’étendre sur le sujet, aucun de ceux qui m’en ont acheté un jour ne sont revenus pour me donner leurs avis. » Il ajouta à sa remarque un petit rire cynique. Au moins, il était claire qu’avec les morts, il n’y avait pas trop à s’inquiéter des clauses de garantie ni du service après-vente. « Puis-je aller voir ce cercueil, au fond ? Je vous dédommagerais pour tout ce temps que vous passerez à m'aider ! » Au son du mot « dédommager », le bruissement d’une pluie d’or retenti dans son crâne et il offrit au client un sourire plus mielleux encore. « Monsieur a l’œil, c’est l’une de nos meilleures pièces, en effet. » Il l’invita à entrer, en s’effaçant de son trajet, avant de reprendre les devants jusqu’au cercueil exposé un peu plus loin. « Il a été façonné d’un seul bloc dans un tronc de sycomore importé tout droit de la contrée d’Afshin. Cette essence le rend très résistant aux affres du temps et aux intempéries. Aussi, ce modèle est sculpté à même le bois, et plaqué à certains endroits d’ornements aux fines dorures, réalisées par les meilleurs ébénistes des environs. » Ebenezer s’éloigna de quelques pas pour récupérer un carnet relié de cuir sur une desserte, avant de la présenter ouverte. « Si je puis me permettre, monsieur… ? » Il interrogea l’inconnu du regard, trop heureux d’avoir à faire à un potentiel acheteur aux idées si originales. « Tous nos modèles sont élaborés sur mesure et plusieurs options sont disponibles. Les couleurs, les textures, et l’épaisseur des étoffes et petits matelas sont à votre entière discrétion, bien évidemment. » Il tourna quelques pages parcheminés d’échantillons d’étoffes, invitant l’homme à parcourir de lui-même la bible de soie et de velours qu’il lui exposait. Et plus les doigts fins glissaient sur les carrés de tissus, plus Scrooge percevait le tintement de pièces rouler dans sa tirelire imaginaire.
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 15 Mar - 15:31



Dracula & Ebenezer
J'ai cassé mon cercueil...

L'accès à la boutique offerte, le vampire laissa traîner ses yeux sur les autres objets exposés, mais c'était réellement le cercueil placé au fond qui l'intéressait. La qualité de l'objet était évidente et, en écoutant les éloges du commerçant, il ne put qu'être encore plus intéressé. L'homme lui plaisait bien, aussi. Il l'avait accueilli avec sourire et avait une touche d'humour qui plaisait à Dracula. Ses yeux aiguisés exploraient le cercueil au son des explications du vieil homme et il sut qu'il deviendrait son nouveau compagnon rapidement. Le cercueil, pas l'homme.
« Si je puis me permettre, monsieur… ? » Son corps pivota légèrement, inspectant l'objet qu'il tenait en main. « Tous nos modèles sont élaborés sur mesure et plusieurs options sont disponibles. Les couleurs, les textures, et l’épaisseur des étoffes et petits matelas sont à votre entière discrétion, bien évidemment. » Dracula acquiesça et se permit de prendre le petit ouvrage dans ses mains. Les choix étaient variés et cela ne pouvait que témoigner de la qualité de cette boutique.

« Pour la texture, j'aurais opté pour de la soie mais, en réalité, cela glisse beaucoup trop. Je pense plutôt opter pour du velours, noir, de préférence. » Combien de fois s'était-il cogné la tête lorsque, entrant dans son cercueil, ses pieds avaient glissé sur ses draps de soie ? Il ne referait plus cette erreur. Le seul avantage était que, assommé, sa nuit avait alors été plutôt bonne. « Concernant le matelas, j'aurais aimé un matelas assez dur mais confortable tout de même, pas trop haut mais bien fourré. Que me conseillez-vous ? »

Ses doigts continuaient à feuilleter le livre et chaque détail l'intéressait. « De combien de temps avez-vous besoin pour réaliser mes voeux ? J'en aurais besoin dans une dizaine d'heures. » Un coup d'oeil à l'extérieur lui apprit que la nuit était déjà bien tombée et que son cercueil ne serait sûrement pas prêt à temps. Après tout, les humains dormaient la nuit. « S'il ne peut être prêt pour le matin, je serais heureux de vous acheter un cercueil déjà prêt en attendant que celui-ci ne soit terminé. J'aimerais seulement qu'il soit un minimum confortable, lui aussi. »

Le vampire posa le livre dans les mains de son propriétaire et s'autorisa un petit tour du magasin. Peut-être trouverait-il quelque chose à son goût ? La boutique était bien agencée et très propre - les cercueils étaient mis en valeur, les pierres tombales également. Voilà bien une chose dont il n'aurait jamais besoin ! « Cela fait longtemps, Monsieur, que vous êtes installé ici ? » Peut-être était-ce de l'indiscrétion, mais il avait l'envie de mieux connaître ce commerçant qu'il serait, pour sûr, amené à revoir. « Je viens d'arriver et je ne connais pas encore très bien la ville, mais elle m'a l'air charmante. »

Son regard s'attarda sur l'intérieur d'un cercueil en velours, noir, mais avec quelques décorations colorées. L'extravagance de l'objet lui plut aussitôt mais cela ferait sûrement un peu criard dans sa chambre. Ses doigts s'attardèrent sur la texture et les motifs colorés. C'était définitivement doux et avait l'air confortable. « Serait-ce possible de broder mon tissu ? Je ne veux pas quelque chose d'aussi voyant, simplement quelques notes d'élégance. Est-ce vous qui effectuez ce travail ? Je dois avouer que c'est magnifique. »

S'il n'écoutait que lui, il rachèterait la boutique et dormirait dans un de ces cercueils dès le lever du soleil. Mais Dracula n'avait cure d'une boutique dont il ne pouvait s'occuper et se contenterait des conseils et de l'expertise du vieil homme.
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 15 Mar - 20:22


Dracula & Ebenezer
Tout s’achète : l’amour, l’art, la planète Terre, vous, moi... Surtout moi.

Le fait que cet homme cherchait à acheter un cercueil comme son propre lit étonnait toujours Scrooge, tout comme cette idée seule ne faisait qu’attiser de plus en plus sa propre curiosité. Il savait de récit historique que certains rois ou hauts dignitaires, pour s’habituer à la couche mortuaire, dormait eux aussi dans pareils coffrages les dernières années de leur vie afin de s’y préparer, mais c’était bel et bien la première fois qu’un individu venait lui faire une telle demande en chair et en os.
« Le velours est une très bonne alternative, il reste une étoffe élégante et résistante ; notre fournisseur nous l’importe directement d’une échoppe de tissage artisanale au nord du royaume. » L’intérêt que portait le bourgeois à son petit commerce était si inhabituel et pourtant si bienvenue que le septuagénaire ne tenait même plus compte de l’heure tardive qu’il était, du souper qu’il manquerait sans doute de peu, ni  même de ses courbatures qui rendait sa démarche boitillante. Alors que le client exprimait ses souhaits sur l’ameublement, il se saisit d’un petit calepin relié de cuir, histoire de prendre bien en notes toutes ses revendications. Après tout, le client était roi, pas vrai ? « En matière de matelas, justement, nous avons récemment sorti une nouvelle gamme, agrémentée de laine de mouton. Elle rend le matelas très confortable sans être trop lâche et possède une technologie innovante que des fées ont introduit, appelée « mémoire de forme », certes, c’est le modèle le plus coûteux, mais en terme de qualité, je ne saurais vous conseiller mieux. » Frénétiquement, Ebenezer griffonna les informations sur son petit carnet, spécifiant en haut de page que la commande serait prioritaire aux précédentes. Il ne pouvait se permettre de perdre pareil client, bien qu’extravagant. En tant que gérant et maître du funérarium, il était de son registre de fidéliser la clientèle, néanmoins, ce n’était pas chez les décédés qu’il pouvait tamponner les cartes de fidélité. « De combien de temps avez-vous besoin pour réaliser mes voeux ? J'en aurais besoin dans une dizaine d'heures. » Ebenezer failli s’étouffer dans une quinte de toux. Un pareil ouvrage, tout apprêté, en dix heures ? Le plus jeune s’empressa d’ajouter, après un bref coup d’œil au travers de la vitrine, qu’il serait prêt à attendre. « Je regrette, mais les délais pour du sur-mesure sont de trois à cinq jours ouvrés. » Il soupesa ses arguments, calculant mentalement les pertes et les bénéfices. Puis, l’esquisse d’un sourire fendit ses lèvres. « Mais, je pense qu’il est tout à fait possible de faire un petit effort sur le délai, tout comme sur la location d’un cercueil de rechange, durant l’attente ; choisissez celui qui vous conviendra ! » Il avait bien fait ses classes, le bougre. Pour pousser la clientèle à l’achat, il fallait lui faire plaisir. Un petit cadeau, un petit avantage, quelques politesses et le tour était joué. Tandis que le sieur faisait une petite ronde dans la boutique, Ebenezer en profita pour sortir un second catalogue, prêt à dégainer. « Cela fait longtemps, Monsieur, que vous êtes installé ici ? Je viens d'arriver et je ne connais pas encore très bien la ville, mais elle m'a l'air charmante. » « Ebenezer Scrooge ; et pour répondre à votre question, depuis toujours, je dirais. Mais, ne vous inquiétez pas, Fort Fort Lointain peut paraître immense au premier abord, mais on s’y habitue vite. » Il s’approcha de quelques pas de l’atypique qui détaillait un autre cercueil, cette fois orné dans un style plus rococo,  très en vogue auprès des Saayens dernièrement. « Tout à fait, nous avons un partenariat exclusif avec des couturières de la capitale très douées dans leurs ouvrages. Elles travaillent également pour la cour mais sur demande peuvent intervenir ici, beaucoup de nobles aiment à voir leurs armoiries ou leurs initiales brodés sur leur… dernier lit. » Ebenezer avait quelque peu hésité sur la fin de la phrase. Il continuait d’observer le nouvel arrivant, mais un détail l’avait interpellé. Scrooge voyait son reflet sur la vitrine, sa barbe blanche, ses traits tirés par le temps. Il s’apercevait clairement dans ses propres prunelles d’opale. Mais il n’y voyait pas son interlocutrice. Se pouvait-il que ? Feignant l’innocence, le vieillard se racla la gorge, et désigna des esquisses d’autres cercueils présents sur son carnet. « Quant à votre cercueil de remplacement, actuellement en stock, le modèle le plus confortable dont je dispose est celui-ci, le modèle « Empire amphibien » » Créé à l’apogée du règne du roi Harold, il était de forme plutôt basique, en bois d’ébène vernis, décoré de façon tout à fait simple mais en soit élégant. Pendant que l’homme feuilletait sa proposition, la curiosité repris le pas sur son esprit, et il ne put s’empêcher de le questionner à son tour. « Si je puis me permettre, que vous amène donc à la capitale ? Avec le capharnaüm ambiant qui y règne depuis tout récemment, je ne pensais pas qu’il s’agissait d’une destination encore si appréciée. »
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 15 Mar - 21:13



Dracula & Ebenezer
J'ai cassé mon cercueil...

Dracula était heureux de pouvoir faire ses courses lui-même, pour une fois. D'ordinaire, toute tâche imposant une sortie en journée requerrait le talent de Heinrich ; le vampire était heureux d'en faire l'expérience grâce à l'homme qui l'avait accueilli alors que son magasin était fermé. C'était une manière d'en apprendre plus, en grand curieux qu'il était, sur la fabrication de ses lits.
Il acquiesça lorsque le commerçant lui proposa un matelas « mémoire de forme », signifiant son désir de le retrouver dans son futur cercueil. Il n'avait encore jamais essayé cette nouvelle technique et il lui tardait d'en tirer les bénéfices rapidement. De même, il s'était douté que le cercueil ne pourrait être prêt dès le matin, mais il était surtout surpris de la générosité du dit Ebenezer Scrooge, qui lui offrit la possibilité de louer son lit d'appoint pour les jours à venir. Il le remercia promptement et se présenta à son tour. « Dracula Dentspointues, Monsieur Scrooge. J'imagine que je vais m'y habituer, oui, mais depuis mon installation ici, je n'ai pas eu beaucoup d'occasions de sortir de chez moi. »

Non, il avait été trop occupé à s'arranger des détails avec les dirigeants de Yasen pour la livraison de sa potion et de sa poche de sang mensuels qui, il l'avait apprit, passeraient par les soins du Capitaine Sinbad.
Il examina encore une fois le cercueil présenté par Monsieur Scrooge, « Empire amphibien », et décida qu'il ferait l'affaire pour les prochaines nuits. « Oui, il me conviendra parfaitement. A combien s'élève votre location ? Je l'emporterais avec moi directement. » Oh, il voyait déjà les regards ébahis des gens de voir un homme, visage caché, transportant un cercueil. Mais après tout, quel autre moyen y avait-il ? Il n'était au courant d'aucunes coutumes de cette ville, il n'allait pas attendre des heures devant la boutique en espérant que quelqu'un ayant une calèche le prenne en pitié. Il avait une force surhumaine, autant la mettre en pratique !

« Si je puis me permettre, que vous amène donc à la capitale ? Avec le capharnaüm ambiant qui y règne depuis tout récemment, je ne pensais pas qu’il s’agissait d’une destination encore si appréciée. » Il était tout à fait honnête que l'homme pose des questions à son client peu habituel. « Je suis arrivé ici plutôt par hasard, en réalité. Je cherchais un nouveau pied-à-terre et l'environnement m'a attiré. Quant à l'anarchie régnante, je dois vous avouer que cela m'arrange plutôt bien. Pendant que le peuple s'occupe des affaires du royaume, il ne s'occupe pas de moi ! »

Il ne voulait ni en dire trop, ni pas assez. Il se doutait que Monsieur Scrooge voulait peut-être se rassurer et il voulait le mettre en confiance. Il n'allait pas l'agresser - où donc irait-il acheter ses cercueils, s'il tuait le propriétaire du magasin ? De toute manière, la violence, le sang, ça ne l'intéressait guère. Enfin, le sang, si, mais pas de cette façon.
Dracula avait remarqué que la ville était dans une passe difficile - dès son arrivée, il s'était abonné au FFL Times, afin d'être au courant des nouvelles. Il avait cependant encore du mal à saisir toute l'ampleur de la situation. « Concernant la régente, j'ai compris que celle-ci s'était enfuie suite à un attentat, mais certains demandent le retour de... Frek et Shiona, était-ce ? Etait-elle légitime au trône ? »

Oui, Dracula voulait acheter un cercueil. Mais si Dracula pouvait également apprendre des choses sur la ville et parler à des personnes - chose qu'il n'avait pas faite depuis plusieurs jours - alors Dracula prenait. Et monsieur Scrooge semblait enclin à la conversation. « Comment vivez-vous cela ? La situation a-t-elle un impact sur votre boutique ? » Il espérait vivement que non. S'il devait apprendre que cette échoppe fermerait bientôt par manque de clients, Dracula mettrait tout en son pouvoir pour que cela n'arrive pas. Les gens ne mesurent pas l'importance d'un salon funéraire.
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 15 Mar - 22:33


Dracula & Ebenezer
Tout s’achète : l’amour, l’art, la planète Terre, vous, moi... Surtout moi.

Dracula Dentspointues. Ce nom lui évoquait vaguement quelque chose, comme une bribe de récit ou d'article de presse depuis longtemps déjà effacé de son esprit vieux et engourdis. Mais d'aussi loin que ses songes le lui permettaient, il ne se rappelait pas avoir déjà rencontré l'homme auparavant, aussi singulière et marquante sa présence soit-elle. Quoi qu'il en soit, derrière sa façade de client de luxe exigeant et poli, il n'en restait pas moins courtois et de bonne compagnie. Cela manquait terriblement à Ebenezer, les gens de bonne éducation. Il était clair que ce n'étaient pas les sourires malicieux et les sous-entendus graveleux de Gilgalad qui allait cultiver son esprit (même si au fond, il ne pouvait s'empêcher de toujours l'écouter d'une vive oreille). « Oui, il me conviendra parfaitement. A combien s'élève votre location ? Je l'emporterais avec moi directement. » Scrooge passa un pouce sur sa moustache de neige immaculée. Il n'avait pas souvenir d'avoir entendu le bruit de sabots ni le roulement d'une calèche, et à moins de loger à deux boutiques d'ici, transformer un tel fardeau était humainement inconcevable, seul. Et ce n'était pas sur le septuagénaire qu'il fallait compter pour l'aider dans cette tâche ! « Ma foi, je peux vous en proposer une petite somme, vous n'aurez qu'à régler le tout au moment de la livraison de votre lit définitif. »
Soudain, Ebenezer se souvint pourquoi la consonnace de son patronyme lui paraissait si familière. Dracula. Un homme éternellement jeune vivant la nuit, dormant dans un cercueil, ne voulant pas attirer l'attention du peuple sur lui, n'ayant aucun reflet dans le miroir et des dents aussi blanches que la pleine lune ! Soit il était ce comédien connu pour les publicités de dentifrices, soit il était le dernier vampire de son espèce qui avait défrayé quelque chronique diffamatoire quelconque. Et Ebenezer, ne savait trop quelle option, entre la diva au dentier aiguisé et la sangsue, était la meilleure à prendre. Il inspira une goulée d'air frais et fit abstraction de son jugement somme toute hâtif. Ce que le client faisait dans sa vie privée ne relevait pas de sa division. Mais son chéquier, oui.
« L'histoire du royaume est quelque peu chaotique et incompréhensibles ces derniers temps, il est vrai... La Fée a commis un coup d'État en balayant ses prédécesseurs, Shrek et Fiona, et beaucoup la juge usurpatrice, mais après tout, ce n'est pas tant la dynastie qui compte, c'est le détenteur du pouvoir. » Parler politique n'était pas l'une des occupations favorites du thanatopracteur, il s'en lassait bien vite, du fait de son désintérêt étonnant pour l'univers tout entier. Son champ d'action se limitait à ses proches et aux avis mortuaires publiés dans le FFL Times, du reste, il pouvait y avoir une invasion de gerbilles des déserts d'Afshin qu'il n'en tiendrait pas rigueur. « Comment vivez-vous cela ? La situation a-t-elle un impact sur votre boutique ? » « Mais je vous avouerais volontiers que la situation a bien un léger impact sur mon entreprise, depuis l'attentat qui a eu lieu, le service de préparation et de garantie d'obsèques a connu une augmentation d'inscriptions de vingt pour cent ! » Un sourire en coin passa sur ses lèvres tandis que son regard se perdait un court instant sur les moulures du coffrage face à eux. Oui, un tel bazzar ne lui conférait pas de souci particulier. Au contraire des affaires immobilières, les pompes funèbres étaient un marché en perpétuelle croissance.
« Si vous voulez bien, Monsieur Dentspointues, je suppose qu'il serait plus agréable de tenir cette conversation assis à mon bureau. Ainsi, je pourrais également établie le devis de votre cercueil et préparer la commande qui partirait demain dès l'aube. » Il s'écarta de quelques pas et indiqua d'un geste le fond de la boutique où trônait un bureau d'ébènes et trois chaises disposées de par et d'autres. « Désirez vous une tasse de thé ou une collation ? » Toujours brosser dans le sens du poil, c'était le plus important. Ebe déposa ensuite ses catalogues et carnets sur le plat de la table et tira une feuille parcheminée d'une liasse présente. Sous les yeux de Dracula, il remplit quelques cases informatives, avant de résumer brièvement. « Donc, vous avez choisi le modèle Présidentiel Deluxe, avec agencement de velours noir brodé, matelas à mémoire de forme et j'y ajoute une patine incolore qui évitera une détérioration trop rapide. Je peux également vous proposer d'autres options, bien que celles-ci relèvent alors du détail, il est parfois primordial de les aborder. » Scrooge lui glissa une liste écrite à la main sous les yeux. Parmi les options proposées se trouvaient plus d'une inutile comme innovantes. Poignée intérieure et extérieure en fer forgé, pieds doublés de tissus anti-dérapants, petit parfum d'ambiance prairie sauvage... Il y en avait pour tous les goûts et tous les prix. Il laissa le soin à son client de sélectionner les atouts dont il souhaitait disposer et sirota sa tasse de thé dorénavant froide. « Les motifs de broderies sont libre a votre imagination ; aussi pour l'entretien, je pourrais vous fournir un petit guide, il n'est jamais simple d'ôter des taches de graillon ou de ketchup, surtout du velours. Et croyez moi, j'en sais quelque chose, mon fils n'était pas des plus propres à table. »
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyLun 16 Mar - 22:07



Dracula & Ebenezer
J'ai cassé mon cercueil...

L'affaire de la location était pliée ; Dracula emporterait ce lit avec lui dès qu'il sortirait de cette boutique. Il ne pouvait se permettre de retarder l'échéance après tout - il avait besoin de dormir. Concernant les affaires du royaume, il fut heureux d'en apprendre un peu plus, mais étonné de l'avis du commerçant. Il pensait au contraire que la dynastie importait beaucoup, plus que le pouvoir. Une famille possède toujours plus de poids qu'un homme seul ayant fait un coup d'état. Cependant, il ne discuta pas les propos de Monsieur Scrooge - il était de sujets qu'il valait mieux éviter, dans une conversation avec un étranger. Ce qui le rassurait toutefois était que sa boutique marchait mieux - il était certain de la trouver ouverte la prochaine fois qu'il lui arriverait malheur.

Il accepta l'invitation à rejoindre son bureau, déclina celle d'une boisson ou d'une collation, et écouta patiemment. Même s'il était riche à n'en plus savoir que faire, Dracula aimait savoir où son argent allait. Il était certain aujourd'hui de bien le dépenser. Il se retrouva avec une liste devant les yeux d'une multitude d'options et pris le temps de les étudier une à une. « Rajoutons les pieds anti-dérapants, et une poignée à l'intérieur du couvercle. Ainsi, j'aurais moins de mal à le soulever lors de mon réveil ! Quant aux broderies, je laisse libre choix à vos couturières ; j'aimerais simplement que cela soit sobre mais raffiné.  »

Il fit glisser la liste de l'autre côté du bureau et pesa ses futures questions. Il pouvait arrêter cet entretien ici, donner l'argent et partir, ou questionner le vieil homme encore un peu. Oui, Dracula manquait cruellement de compagnie, ces temps-ci. De plus, Monsieur Scrooge n'avait pas l'air effrayé par sa présence, quand bien même il avait remarqué que Dracula était différent des autres - le vampire sentait qu'il savait.
« Vous avez donc un fils, Monsieur ? Que cela doit être agréable, de rentrer chez soi et de savoir que vous êtes attendus ! » Dracula repensa aux courts instants qu'il avait passer avec Lucy et Mina, à cette sensation de savoir qu'il comptait pour quelqu'un, qu'il était aimé et chéri, attendu. Mais rien ne valait la peine de se replonger dans ces souvenirs douloureux, causes bien souvent de ses insomnies. « Voyez-vous, je vis seul dans mon manoir. J'ai un majordome, Heinrich, que j'estime beaucoup, mais nous ne vivons pas vraiment sur les mêmes horaires. C'est probablement lui que vous verrez, d'ailleurs, lorsqu'il viendra récupérer mon nouveau cercueil. »

Ah, Heinrich. Son majordome, son confident, son compagnon de tous les jours. Dracula ne pourrait survivre sans lui - il lui était vital, il représentait le lien entre le manoir et l'extérieur, entre le jour et la nuit. Mais il était heureux d'être ici, ce soir, au bureau de ce vieil homme apaisé par l'argent mais torturé par son passé. Ils n'étaient peut-être pas si différents, au final. Aucun d'eux n'était accepté dans aucun monde et leur déambulation forcée leur faisait parfois subir la vie. La seule différence était que Dracula, lui, était riche. Et immortel. « Ce fut un plaisir pour moi, Monsieur, d'avoir bénéficié de vos services. Votre gentillesse et hospitalité m'ont touché et je ne saurais vous remercier de m'avoir accepté dans votre boutique à cette heure-ci - je m'en excuse, d'ailleurs. »
Ce qu'il aurait du faire depuis le début. Mais, que voulez-vous, même les plus galants perdent parfois leurs manières !
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 29 Mar - 1:13


Dracula & Ebenezer
Tout s’achète : l’amour, l’art, la planète Terre, vous, moi... Surtout moi.

Ebenezer griffonnait de sa calligraphie cursive et appliquée ce que lui dictait son client, prenant soin de bien référencer chaque option choisie. Intérieurement, il jubilait comme jamais. Il était sur le point de conclure l’affaire la plus fructueuse de sa semaine, si ce n’était de son mois. La plus part des gens qui rendent visite à sa boutique étaient soit de nobles personnes en quête d’une prévoyance obsèques fiable et élégante, soit de simples gens, simplement proche du défunt en question, qui ne cherchaient pas à dépenser leur salaire pour un coffrage en bois sculpté, si c’était pour le mettre sous terre ou l’enflammer comme le faisait les habitants du nord, au bord d’une barque branlante, flottant à peine sur un lac noir.
« Vous avez donc un fils, Monsieur ? Que cela doit être agréable, de rentrer chez soi et de savoir que vous êtes attendu ! » Scrooge s’en voulait déjà d’avoir abordé le sujet. Les mots étaient sortis par mégarde, comme une déclaration sans fond véritable, de quoi meubler la conversation. Il ne s’attendait pas à ce le sire Dracula relève la note, et encore moins à ce qu’il poursuive dans sa lancée. Instinctivement, le vieillard se crispa, senti tous les muscles de son corps se raidir sous la pression et le poids des mensonges. Mais toujours, il conserva cette esquisse de sourire contrit, presque attristé. « Eh bien, je ne dirais pas, cela. » Sa voix était incertaine. Il ne savait trop comment se sortir de cette impasse. « En réalité, cela fait bien longtemps que les seules personnes qui m’attendent lorsque je rentre ne sont autre que mes domestiques. Mon fils, lui est… » Qu’en dire ? Comment résumer trente années de passivité et de souffrance en un seul mot ? Comment expliquer le père indigne et infâme qu’il a été, qu’il est toujours ? Comment ne pas se prendre en pitié soi-même, pour le monstre qu’il est ? Emprisonné dans sa cage de chair et d’os, se nourrissant de l’ombre et du malheur des autres, pour oublier le sien. Mort ? « Ailleurs. » Réponse évasive, accompagnée d’un geste tout aussi peu révélateur. Il espérait qu’ainsi, en se concentrant plutôt sur sa boisson aux aromates, l’autre passerait au-delà des détails et des histoires familiales sordides.
Et Ebenezer soupira de soulagement en silence lorsque Dracula embraya sur sa propre vie quotidienne. Rapidement, le vieillard ne put parvenir qu’à une seule conclusion : ils avaient plus en commun qu’il n’en doutait. « Je comprends tout à fait votre situation, j’en vis une similaire à vrai dire. Et je dois bien avouer que je ne saurais m’occuper de tout sans ma gouvernante et les autres employés. » Il devait passer son temps à travailler, et le reste à compter ce qu’il gagnait, ce sur quoi il avait si fièrement et solidement bâti sa fortune et érigé son grand manoir pourtant si vide. Il aurait auparavant voulu y entendre des rires d’enfants, le chant de sa douce et défunte épouse, l’odeur délicate des tartes dans le four, le ronronnement d’un chaton pelotonné au coin du feu. Mais il n’a eu que douleur dans chaque chambrée, souffrance à chaque recoin. Il espérait croiser Iris au moindre tournant dans le moindre couloir. Il se surprenait quotidiennement à espérer son retour, à imaginer sa silhouette d’elfe gracile ouvrir la porte d’un geste et lui sourire comme elle en avait l’habitude. Mais elle n’a pas eu le temps. Elle est partie, par sa faute. Et derrière elle a-t-elle laissé un bien aussi précieux qu’il était un fardeau pour un père incapable à la tâche. Ruminant ses pensées, Scrooge en perdit le fil de la conversation, et se décida à établir le devis définitif de cette affaire, avant de tomber pour de bon dans les méandres de sa mémoire. « Eh bien, tous frais compris, de même que le cercueil de location que vous pourrez emmener directement à votre sortie, ceci vous reviendrais à mille cinq-cents schillings, réglable en plusieurs fois si vous le souhaitez. » Il tendit une feuille parcheminée et noircie d’encre et de nombres à son interlocuteur, lui présentant dans la foulée un petit guide d’entretien et un échantillon de patine à bois ultra brillance et résistance. Avec une transaction pareille, il pouvait bien se permettre de faire un petit cadeau, la perte était largement négligeable. Une fois le marché conclu, Ebenezer se leva et enjoignit le pas à son client, afin de le raccompagner jusqu’à l’entrée du magasin, où se trouvait également son cercueil d’appoint, logé près de la vitrine. « Le plaisir fut pour moi, sire Dentspointues. Je vous ferais parvenir une missive le plus rapidement possible afin de vous communiquer les dates de livraison de votre bien, sans aucun problème. » Et dans un sourire franc, accompagné d’une poignée de main souple mais virile, il conclut : « J’espère que nous nous recroiserons sous peu, mon cher. » Tant pour son porte-monnaie que sa propre personne.
Cette nuit-là, Ebenzer Scrooge était persuadé d’être tombé sur une fontaine de jouvence résonnante de pièces d’or, intarissable, mais aussi fort sympathique. Il semblerait que certains réussissent à conserver une certaine polyvalence.


hrp: encore désolée pour le retard :kyu:
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Comme on fait son cercueil on se couche - Ebenezer EmptyDim 29 Mar - 10:44



Dracula & Ebenezer
J'ai cassé mon cercueil...

Dracula pensait bien faire, lorsque l'homme mentionna son fils, de creuser le sujet. Après tout, rares étaient ceux qui voulaient le contraire ; exposer leurs enfants aux yeux du monde était l'envie première de tout parent. C'était une parade ultime, un accomplissement, ce pourquoi vous êtes vous-mêmes nés. « Regardez, ce que j'ai accompli ! Voyez, comme j'ai éduqué cet enfant qui, peut-être, jouera un grand rôle dans l'Histoire ! ». La plupart cependant finiront simplement par reprendre le métier de leurs parents et perpétrer cette lignée ennuyeuse de gens sans ambitions, convaincus de faire quelque chose de bien.
Il était évident que ce n'était pas le cas de Monsieur Scrooge. Si Dracula s'était attendu à cette réaction, il n'aurait osé le questionner en premier lieu. Il parlait de cette voix que le vampire ne connaissait que trop bien : remplie de regrets, d'amertume, de « et si ». Cette même voix qu'il prenait lorsqu'il parlait de Lucy ou de Mina et de toutes ces choses que nous avons fait et qui nous serrent un peu le coeur à chaque fois que nous y pensons.

La conversation cependant retourna sur un chemin plus sûr, moins personnel ; un terrain neutre qui fit rapidement retrouver ses aises à Dracula. Le vieil homme finissait d'écrire et lui annonça la note finale. « Eh bien, tous frais compris, de même que le cercueil de location que vous pourrez emmener directement à votre sortie, ceci vous reviendrais à mille cinq-cents schillings, réglable en plusieurs fois si vous le souhaitez. » Dracula tâtonna sa poche à la recherche de sa bourse, la sortit et versa sur la table ce que le vendeur lui avait demandé. Il le remercia en rangeant le carnet d'entretien et l'échantillon dans les grandes poches de son manteau.

La transaction touchait à sa fin, de même que la petite interlude sociale que s'était octroyée Dracula. Le vampire prit possession de son cercueil de location et fit ses adieux au vieil homme. « Nous nous recroiserons certainement. D'ici-là, Monsieur Scrooge, portez-vous bien et merci encore de m'avoir accepté dans votre magasin aujourd'hui. Je vous en suis infiniment reconnaissant. » Il lui serra la main, mit sa capuche, prit son cercueil et sortit de son établissement.

Avec à nouveau ce petit point au coeur, plein de regrets, qui avaient refait surface. Il y avait des jours, comme celui-là, où une simple personne pouvait faire renaître beaucoup de choses en vous. Sur tout le chemin du retour, Dracula était perdu dans ses pensées. Si bien qu'il rata presque l'entrée de son manoir.
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