« Ondine c’est affreux… »
La jeune sirène était en état de choc, recroquevillée près de la cheminée éteinte. Il n’y a pas longtemps qu’elle avait gagné la rive et perdu sa queue, un rien l’inquiétait. Autour d’elle, il y avait ses cinq sœurs, plus âgées, plus calmes. Pourtant, seulement l’une d’entre elle connaissait bien ce monde, depuis plusieurs longues années maintenant. Les autres avaient commencé leur cure de Charnel en même temps que la plus jeune mais leur âge aidait leur raison. Ce qui ne les empêchait pas d’avoir peur bien sûr, elles n’étaient pas folles…
« Calme toi Sélène, tout ira bien tu verras. »
Avait répondu une des sœurs en lui caressant tendrement la joue. L’explosion de la fabrique du bonheur n’était pas passée inaperçue et elle avait réveillée des craintes depuis longtemps enfouies. Heureusement pour les anciennes sirènes, elles n’étaient pas dans les parages quand la bombe menaçait, elles étaient sur les routes en quête de nouveau objets à vendre dans la boutique d’Ondine. C’était un travail qui incombait normalement à James mais il était avec les Larmes de Cendres ce jour là… Qu’en aurait-il été sinon ?!
« James et Ondine sont là pour nous protéger, ils connaissent bien ce monde et les gens qui y vivent ! »
Ajouta la jeune femme en regardant son autre sœur. Ondine se sentait réellement responsable de ses sœurs et elle ne savait plus quoi faire pour les rassurer. Il avait fallut les habituer à leur nouvel environnement, les consoler de l’absence de leur père, du décès de leur grand-mère… Beaucoup trop de choses, surtout que les jeunes femmes avaient des réactions très enfantines malgré leurs centaines d’années d’âge. Une attitude qu’Ondine ne pouvait pas juger : elle était passée par là elle aussi : découvrir un nouveau monde, une nouvelle culture, de nouvelles habitudes… C’était aussi beaucoup pour une seule personne, surtout quand cette dernière est aussi naïve que sa sororité.
« Elle a raison Sélène ! Nous sommes là et nous allons tout faire pour vous protéger. Tant que vous êtes ici vous êtes en sécurité tu vois : nous sommes loin de tout, personne ne songera à vous faire du mal. »
« Mais toi Ondine ? Tu es en danger sur Roméo Drive, ils ont cru que la bombe était là bas ! »
« Allons Sélène ! Ne t’inquiètes donc pas autant, cette histoire est terminée et les villageois vont tout faire pour que ça n’arrive plus, fais moi confiance. »
Ondine serra sa jeune sœur dans ses bras et le calme revint doucement dans la petite ferme. James ne tarda pas à rentrer, rassurant un peu plus les sirènes par sa présence et les nouvelles de la résistance. Le couple était plus uni que jamais même si Ondine ne pouvait s’empêcher de mourir d’inquiétude dès que son prince quittait la maison pour se rendre auprès des Larmes de Cendre. Elle avait confiance en lui mais elle savait aussi les risques qu’il prenait et craignait le jour où il ne reviendrait pas vivant…
Suite à l’incident, Ondine avait fait quelques aménagements dans sa boutique : elle avait acheté plus de fioles, d’ingrédients à potion, d’entonnoirs et autres éléments. Il n’y avait pas que ça bien sûr mais elle avait pensé à son amie Adélaïde qu’elle savait, heureusement, en bonne santé. L’ancienne sirène avait également prévu un abri dans la cave, une zone protégée où il y avait assez de vivres pour quelques jours, le même genre d’abri qu’elle avait construit avec James sous leur ferme. Il fallait s’attendre au pire maintenant, prévoir toutes les éventualités.
Quoi qu’il en soit, elle était prête et avait une boutique bien pleine pour aider un maximum d’habitants. Une chance que les autres villes n’aient pas été atteintes et que James lui ai prêté la calèche pour qu’elle puisse elle même faire le plein. Il n’était pas simple de prévoir pour tout le monde, surtout qu’elle n’avait pas encore une clientèle très garnie… Qui sait, ce terrible événement aiderait peut être son petit commerce ? Ce n’était pas réellement son but, elle n’était pas aussi égoïste, mais elle avait tout prévu pour tout ceux qu’elle connaissait à peu près.
Chantonnant tranquillement, la vendeuse arrangeait tranquillement son stock quand la petite clochette de la porte lui signala un nouveau client. Avec un grand sourire, elle fit virevolté sa robe bleu jusqu’à la caisse pour faire bon accueil. Quelle que soit la situation, Ondine avait toujours gardé le sourire et son optimisme était très difficile à éroder. C’était aussi ça le point positif de son échoppe : la bonne humeur et la joie de vivre. Sans compter qu’elle était une oreille attentive, pleine de bons conseils et bonnes d’intentions.
Une fois à son poste, son sourire redoubla d’intensité : C’était son amie, celle qu’elle attendait de voir depuis l’explosion. Avec habileté, elle se faufila hors de son comptoir et alla la prendre dans ses bras. Elles n’étaient peut-être pas aussi proches en temps normal, mais il s’agissait là d’une situation particulière. Une fois les salutations faites, Ondine la guida vers l’arrière boutique où elle lui avait réservé quelques articles.
« Je suis tellement contente de te voir, toute cette histoire de bombe m’a fait me ronger les sangs ! Tiens, je t’ai gardé quelques objets de côtés, j’espère que tu trouveras ton bonheur. J’ai tenté de faire un tri mais toute l’échoppe a été regarnie alors n’hésites pas ! Comment vas-tu ? »
Depuis qu’elle avait retrouvé sa voix, Ondine parlait beaucoup et relativement vite, comme si elle craignait qu’on lui ôte à nouveau ses cordes vocales. Adélaïde avait l’habitude mais d’autres auraient pu avoir du mal à suivre.
Emi Burton